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Accès des sourds à l’information : “Nous avons aussi des droits”
Publié le dimanche 15 octobre 2023  |  Mali Tribune
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Le droit à l’information est l’un des droits primordiaux selon la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Mais, il se trouve dans la réalité que ceci n’est pas effectif et semble inaccessible à ce jour encore à une couche importante de la société en l’occurrence les personnes sourdes qui constituent 4 % de la population malienne estimée depuis 2022 à 22.395.489 habitants (RGPH5).

“Je remercie beaucoup Dieu, puisque je sais lire et écrire. Moi, c’est mon téléphone portable, ma télévision. Je suis toutes les informations concernant les actualités du pays à travers les réseaux sociaux. Souvent, quand je suis à la maison et qu’une information passe à la télévision c’est ma mère qui est chargée de me faire le compte rendu, puisse qu’il n’y a pas d’interprète à la télévision nationale du Mali”, confie Rokia Maïga, trésorière de l’Association malienne des sourds (Amasourd).

Miriam Diarra, membre de l’Amasourd également s’informe à travers WhatsApp et Facebook. “Pour nous les personnes malentendantes, lorsque nous entendons ce qui se passe dans le pays comme l’attaque au nord du Mali, on fait le débat sur ça. Ou encore on parle des problèmes de l’école, des enseignants, des mauvaises conditions de vie des handicapés que nous sommes”.

Selon Moussa Kéita, de l’Association malienne des interprètes en langue de signes (AMILS), “l’émission ‘Actu-Hebdo’ était traduite par l’ancien directeur de l’école des sourds. C’était dans le cadre d’un projet avec un partenaire et c’était payant. On a écrit plusieurs fois, on a eu plusieurs audiences avec les directeurs de l’ORTM pour présenter des documents, pour échanger. Mais jusqu’ici, aucune suite. En 2022, pour le discours de nouvel an, on nous a fait appel pour traduire l’adresse à la nation du président Assimi Goïta. Et même là, c’était le lendemain que cela a été fait, pas en direct”.

Pour l’Amasourd, l’absence de traduction du journal télé et des émissions en langage des signes est juste un manque de volonté politique. “On ne peut pas nous parler de problème de moyens. Dr Traoré Youssouf, du syndicat des médecins du Mali et qui intervient dans le cadre du projet ‘Nous avons aussi des droits’“, explique que le CNT est la seule institution à traduire ses communications pour les personnes sourdes.

Sidiki Dembélé, directeur de la télévision nationale, confirme qu’au niveau de l’ORTM, il n’y a pas encore d’interprètes en langue de signes pendant le journal pour des raisons de ressources humaines, financières et techniques. “Pour que cela soit, il va falloir recruter des interprètes en langue de signes ; changer beaucoup de choses dans le studio pour qu’il soit adapté. On l’avait essayé un moment avec des traducteurs en langue de signes. C’était du bénévolat et à un moment ils voulaient être payés ou recrutés carrément pour faire le travail. Mais, les moyens ne suivaient pas”, a-t-il ajouté.

L’accès à l’information est et demeure un droit pour toutes et tous. Si des personnes atteintes de déficience auditive cherchent de l’information, elle leur reste tout de même inaccessible dans notre pays.

Aminata Agaly Yattara

Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les droits humains (JDH) et NED.

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Accès des sourds a la sante au Mali :

Une autre exclusion !

Manque de carte d’invalidité, difficultés de s’orienter et de communiquer avec le personnel soignant en milieu sanitaire…, les sourds, malentendants et handicapés auditifs vivent un vrai chemin de croix dans nos structures de santé.

Cette jeune dame du nom de Miriam Diarra est déficiente auditive. Chaque fois qu’elle tombe malade et qu’elle doit se rendre à l’hôpital, elle est obligée de se faire accompagner par un parent, qui fait l’interprète. “Quand je suis seule avec le médecin, j’essaie de lire sur ses lèvres parce que je n’entends pas la voix. Dans le cas contraire, si je ne comprends pas bien, je dis au médecin d’écrire sur une feuille. Si mes parents ou mes frères et sœurs m’accompagnent ce sont eux mes interprètes”, ajoute-t-elle.

Selon Dr. Tembely Koné Fanta, spécialiste en médecine de famille, chargée du service adolescent jeune à l’Office national de santé de la reproduction (ONASR), Miriam est un cas isolé et même une chanceuse parmi les personnes atteintes de surdité et de déficience auditive.

“Quand j’intervenais au Centre de santé communautaire (Cscom), j’avais beaucoup de sympathie pour les gens en situation de handicap, spécifiquement les sourds au point qu’une patiente s’est attachée à moi et retournait à la maison quand elle venait au Cscom trouver que je suis absente”.

Pour Fanta Diakité, présidente du Réseau des média africains pour la santé et de l’environnement (Remapsen), “quand la femme a un problème de santé, son recours est le médecin. Mais si elle sait déjà qu’il y aura une barrière de communication avec le personnel de santé, c’est un blocage pour elle, un facteur qui va la décourager. D’où l’importance pour les structures de santé de former des médecins capables de communiquer avec elles”.

Le Syndicat des médecins du Mali en collaboration avec l’Association des interprètes en langue de signes, le Comité des femmes sourdes du Mali et l’ONG CAR.D ont mis en place un projet dénommé “Nous avons aussi des droits”. L’objectif de ce projet est de briser la barrière d’accès aux services de santé de façon générale mais au service de santé de la reproduction de façon spécifique.

“Dans un premier temps, nous avons mené une étude pour comprendre un peu quelle était la problématique des déficientes auditives. Cette étude nous a permis de mener un certain nombre d’activités, notamment les actions en lien avec la formation des prestataires de soins. Vous conviendrez que lorsqu’un déficient auditif a des difficultés de communication avec le médecin, il y a déjà de nombreux problèmes. Donc il y a eu des actions de renforcement des capacités des médecins en langue des signes, à Ségou, Sikasso et Kayes. Nous avons formé 10 médecins par région”, assure Dr. Traoré Youssouf du Syndicat des médecins du Mali.

Dr. Traoré ajoute : “Il y a aussi un certain nombre de textes qui étaient méconnus comme la loi 052 sur le genre. Nous avons tenu à faire la vulgarisation de la loi 052 sur le genre. Au-delà de cela, il y a aussi le renforcement des capacités cette fois-ci des comités des femmes sourdes du Mali sur la chaîne de procédure pénale pour qu’elles comprennent, en cas de viol et d’abus, ou bien d’agressions sexuelles, le schéma à suivre. Après, il y a eu des actions de renforcement des capacités sur les Mutilations génitales féminines, ses causes, ses conséquences. Cela a regroupé pratiquement les femmes sourdes de l’ensemble du pays, qui ont été renforcées. Donc, on avait aussi mis un certain nombre de cadres de concertation”.

Le décret d’application de la loi n°2018-027 du 12 juin 2018 relative aux droits des personnes vivant avec un handicap au Mali a été signé le 26 septembre 2021 par le président Assimi Goïta. Donc cette loi, est comme la Bible ou le Coran des personnes handicapées du Mali. C’est une loi nationale. Elle applique la Convention internationale relative aux droits des personnes handicapées qui protège toutes les personnes handicapées du monde.

Cette loi comporte tout ce que le gouvernement et l’Etat du Mali doivent faire pour le bien-être, la protection et la promotion des droits des personnes handicapées, que ce soit dans le domaine de la santé, de l’éducation, du transport, des loisirs, etc.

En plus des difficultés de communication dans les structures de santé, les déficients auditifs sont très souvent parmi les personnes démunies. A ce titre, elles ont normalement droit à une carte d’invalidité selon l’article 3 de la loi n°2018-027 du 12 juin 2018 “mais jusqu’à aujourd’hui, cette disposition n’a pas encore été mise en vigueur parce qu’aucune personne handicapée sur le territoire du Mali n’a encore obtenu cette carte à même de lui faciliter l’accès à l’hôpital, à la pharmacie”, explique Dr. Touré du Syndicat des médecins du Mali.

Aminata Agaly Yattara

Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les Droits Humains (JDH) et NED.



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