La désormais inopportune sortie de Mme la Ministre en charge de l’énergie et de l’eau, continue d’alimenter les débats, car peu de résultats positifs ont été constatés, la situation s’est même empirée. Au cours de son show médiatique, pardon, de sa grande interview qui a valeur de communication sur les antennes de la chaine nationale, elle semble signer l’arrêt de mort de l’EDM- sa en mettant en porte à faux les acteurs travaillant dans le secteur énergétique. Désormais les partenaires, qu’ils soient financiers ou sociaux, tout comme le personnel de la société vont se regarder en chiens de faïence, car la confiance s’est fortement détériorée entre eux. En qualifiant les agents d’EDM de cadres véreux pour ne pas dire des voleurs, en affirmant Urbi et Orbi qu’une cinquantaine de citernes se sont volatilisées en 4 jours, elle aura mis en difficulté les cadres et agents dans la gestion de l’EDM. Aujourd’hui on peut affirmer sans risque de se tromper qu’aucune banque n’a confiance en cette société et aucun partenaire technique et financier ne serait prêt à s’engager. Alors que sans l’apport de tous les acteurs travaillant dans ce secteur il serait difficile de sauver l’EDM. La sortie de Mme la ministre n’a-t-elle pas finalement aggravée la crise ? L’intensification du délestage n’est-elle pas un acte de sabotage des agents que Mme la ministre a incriminés ? Que reste-t-il à Bintou Camara après son échec à résoudre la crise énergétique?
Sa nomination comme ministre, bien qu’elle viole la législation en vigueur, car elle était la commissaire aux comptes de la société, donc tenue par les secrets professionnels, a suscité un réel espoir, car connaissant la société de fond en comble, elle était censée être la personne indiquée pour inoculer la dose nécessaire pour la survie de l’EDM. Mais cet espoir s’est estompé après sa malencontreuse sortie et surtout par la stratégie qu’elle a utilisée pour sortir la société EDM-sa dans l’ornière, à savoir jeter l’entière responsabilité de la crise aux cadres et agents de la société. Le hic est que la ministre Camara s’est contentée de dénoncer sans un réel plan de sortie de crise, ni une proposition de solution à court, moy et long terme. En effet ce qu’elle a dénoncé c’est seulement l’incurie des agents et cadres chargés de la gouvernance de la société. Elle a mis le curseur sur le vol de carburant et dans une moindre mesure le manque de ressources financières et la vétusté des matériels. Sauf que ces problèmes sont connus depuis belle lurette et tous les régimes en ont connu et ont fait de leur mieux pour maintenir la fourniture de courant avec bien entendu quelques délestages surtout pendant la période de forte chaleur. Ce qui était attendu de Mme la ministre c’était d’apporter la thérapie nécessaire pour sortir de l’obscurité, mais en lieu et place des propositions de sortie de crise, elle a discrédité la société au point que nul ne lui fera encore confiance. Pour rappel sa sortie a eu trois conséquences majeures sur la société EDM-sa ;
La première conséquence est que la ministre en charge de l’énergie a mis en porte faux les agents de l’EDM avec les usagers du courant, autrement dit les clients ne font plus confiance aux agents de l’EDM, ces derniers sont désormais exposés à la vindicte populaire. Aujourd’hui la sécurité des travailleurs n’est pas assurée. Cette situation pourrait engendrer un sabotage de la part des agents ou encore un boycott, voire une grève déclenchée par les syndicats. Pour rappel les syndicats, pour répondre du berger à la bergère, ont fustigé le comportement de la ministre qui à leurs yeux fait partie des problèmes de l’EDM. Ils se disent choquer par les propos qu’elle a tenus à leur égard et ils se réservent le droit de réagir, une menace à peine voilée ?
La deuxième conséquence de la sortie de Mme la ministre est le discrédit qu’elle a porté sur la société EDM-sa. Pour une société qui est endettée jusqu’à hauteur de 600 milliards et dont une bonne partie de cette dette est due aux fournisseurs, qui n’ont d’autres qualificatifs pour Mme la ministre que des détourneurs voire voleurs de carburant, alors le sort financier de cette société est hypothétique. En d’autres termes aucune banque sérieuse ne s’engagera à financer une société en état de faillite et minée par des pratiques malsaines. Toutes les banques de la place réfléchiront mille fois avant de s’engager dans une aventure à l’issue incertaine. D’où une inquiétude majeure quant à la sortie de crise de la société. Mme la ministre endosse l’entière responsabilité du discrédit, surtout quand elle généralise.
La troisième conséquence de sa sortie est la fuite des partenaires techniques et financiers. Nul ne peut mettre en doute la rentabilité de l’EDM si elle est bien gérée, donc elle est attractive à bien des égards. Mais les partenaires techniques et financiers, qu’ils soient des nationaux ou internationaux s’engageront difficilement sans des garanties de bonne gestion de la société, alors que l’EDM- sa n’a pas bonne presse pour attirer. Qu’on ne s’y trompe pas sans la libéralisation du secteur énergétique la situation ne va guère s’améliorer. Et pour qu’elle soit attrayante il faut des cadres et agents vertueux et désintéressés pour redresser le secteur. Donc la sortie de Mme la ministre a encore contribué à installer le doute dans l’esprit des investisseurs ou tout au moins à leur dire d’attendre jusqu’à ce que la gouvernance de la société énergie du Mali soit vertueuse entre temps les citoyens maliens crèveront de faim et de soif.
En somme, pour avoir contribué à affaisser la société par sa sortie médiatique, Mme la ministre vient de se disqualifier à continuer à piloter le département stratégique de l’énergie et de l’eau. Va-t-elle tirer les conséquences de son échec en rendant le tablier ou bien elle sera démise de ses fonctions comme nous en avons vu dans les Républiques non bananières.