Dans une vidéo de propagande diffusée le 12 décembre 2023, le leader du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM) s’en prend violemment aux régimes de Transition du Sahel (Burkina Faso, Mali et Niger) et déclare sans ambages qu’il n’y a pas de compromis possible pour ce qui est de faire du Mali un Etat islamique. La prise de Kidal, le 14 novembre dernier par les Forces armées maliennes a-t-il déclenché le compte à rebours des derniers instants d’Iyad Ag Ghali au Mali ?
Le 12 décembre 2023, le chef du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM/JNIM, affiliée à Al-Qaïda) a mis fin à plus de deux ans de silence dans une allocution de 22 minutes diffusée par le média de propagande de l’organisation, «AzZalaqa». Iyad Ag Ghali est apparu avec un nouveau costume, celui de défenseur des opprimés face à l’État central. Il fustige ainsi les pouvoirs au Mali, au Burkina Faso et au Niger et leurs «alliés infidèles», la Russie et le groupe paramilitaire Wagner.
Et, comble de l’ironie, cet impitoyable criminel dénonce le comportement des forces perpétuant (selon lui) une «boucherie monstrueuse» à l’égard des populations. «L’affrontement est entré dans une nouvelle phase», a précisé Iyad en appelant les combattants de la région à le rejoindre pour faire face à ce nouveau défi. Tout comme il appelle les musulmans des trois pays (Mali, Burkina et Niger) à se joindre à sa folie meurtrière. Mais de quels musulmans évoque-t-il, est-on tenté de se demander.
Et cela d’autant plus que le GSIM, aux abois avec la montée en puissance des Forces armées malienne (FAMa), ne cesse de s’en prendre aux cibles civiles sans distinction de confession religieuses. Sait-il combien de musulmans figurent parmi les centaines de morts et de blessés de l’attaque du bateau «Tombouctou» le 5 décembre 2023 ? Certes, il a décliné toute responsabilité dans cette attaque odieuse, mais il est clair que ses alliés de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) ne sont pas étrangers à cet abominable crime.
Combien de musulmans ont été spoliés de leur bétail (le plus souvent leur unique source de revenu) et contraints de se réfugier dans des villes comme Ménaka par les éléments du GSIM ? Combien de musulmans souffrent le martyr à cause des blocus imposés à la ville de Tombouctou par ce groupe terroriste ? Quels sont les musulmans alors sollicités par Iyad pour l’aider à vaincre les régimes de Transition du Sahel ? L’émir du crime organisé au Sahel a sans doute sa propre définition du nom «musulman». Dans sa vidéo de propagande, le leader du GSIM déclare sans ambages qu’il n’y a pas de compromis possible pour ce qui est de faire du Mali un Etat islamique. Ainsi, Iyad Ag Ghali ferme la porte au dialogue prôné par les différents fora organisés dans notre pays sur la vie et l’avenir de la nation.
Même si la Conférence d’entente nationale (CEN du 27 mars au 2 avril 2017), le Dialogue national inclusif (DNI, du 14 au 22 décembre 2019) et les Assises nationales de la Refondation (ANR, du 27 au 30 décembre 2021) ont préconisé la négociation avec Amadou Koufa et Iyad Ag Ghali pour «ramener la paix au Mali». Mais, les participants ont également réaffirmé le maintien de la forme de l’Etat unitaire, républicain, décentralisé, laïc, démocratique et social. Autant dire qu’il n’y a peu de chance d’amener Iyad à la raison par le dialogue.
Il est clair que, comme l’ont mentionné de nombreux analystes, «le chef du JNIM cherche à exploiter les dynamiques changeantes, les mécontentements et les réalignements géopolitiques dans le Sahel». A moins qu’il ne cherche à mettre la barre très haut dans la perspective d’un hypothétique dialogue. Selon certains analystes, le chef du JNIM cherche à exploiter les dynamiques changeantes, les mécontentements et les réalignements géopolitiques dans le Sahel.
Et, enfin, le timing de cette réapparition d’Iyad Ag Ghali ne doit rien au hasard. Elle lui a été imposée par l’évolution de la situation sécuritaire en sa défaveur dans le nord du pays. En effet, sa sortie intervient presqu’un mois après la reprise par l’armée de Kidal (14 novembre 2023), le bastion de ses alliés du Cadre stratégique permanent pour la paix, la sécurité et le développement (CSP-PSD)… Et comme un malheur ne vient pas seul, les autorités de la Transition viennent de confier la gouvernance de cette région (qui lui est si chère) à son grand rival : Général de Division Alhaji Ag Gamou ! Une double défaite qu’Iyad et ses alliés mettront du temps à digérer !