Avec à leur tête le ministre de la justice et des Droits de l’homme, les acteurs du pouvoir judiciaire (procureurs généraux, présidents des cours, ceux des tribunaux…) s’étaient réunis, du lundi 8 au samedi 13 janvier dernier, pour la tenue de la 2ème édition de la Semaine de la Justice. La clôture des travaux, organisée à cet effet au centre international de conférences de Bamako, a été mise à profit par le garde des Sceaux, Mamoudou Kassogué, pour non seulement revenir sur les actions majeures de 2023, mais aussi et surtout se prononcer sur les dossiers brûlants et les perspectives de l’année en cours.
Les travaux de la 2ème édition ont pris fin par un déjeuner-débat sur le bilan 2023 du département, samedi 13 janvier au CICB. Dans son intervention, le ministre a voulu se pencher sur l’état des lieux de la justice à sa prise de fonction en 2021 à nos jours, voire sur les solutions apportées aux différents défis par son équipe « dynamique ». L’occasion était également opportune pour lui de revenir sur les dossiers emblématiques ; les mesures idoines prises pour l’instauration de la confiance entre la justice et les justiciables… Le magistrat de profession n’a également ménagé aucun effort pour annoncer les perspectives du département, en ce qui concerne l’année (2024) en cours. Avant l’arrivée du staff de Kassogué, estime-t-on dans son discours, la justice malienne souffrait d’insuffisances et de manque de textes dans plusieurs domaines. Des constats qui, sans nul doute, semblaient être patents tant dans le secteur de la lutte contre la corruption et la délinquance financière, que dans le domaine de la lutte contre la cybercriminalité ; celui de la lutte contre le terrorisme ; le domaine des droits de l’homme ; celui des ressources humaines ; voire le domaine de communication du département. Avec les chantiers déjà battus et les réformes en cours, nombre important de ces vides et insuffisances sont, de nos jours, quasiment comblés grâce à la perspicacité et au dévouement des acteurs du domaine, se réjouit le ministre. Dans la lutte contre la corruption et la délinquance financière, il y avait l’absence d’un organe judiciaire à compétence nationale. Ce qui empêchait la mise en œuvre de la politique pénale cohérente. A cela s’ajoute le manque de diligence et de perspicacité consécutive au cumul de fonctions par le procureur en charge du Pôle économique et financier. S’y ajoutent les insuffisances relevées au niveau des textes concernant la saisie des biens appartenant aux personnes mises en cause dans des procédures judiciaires ; les manquements des textes en ce qui concerne la prise en charge des magistrats chargés du jugement des affaires délictuelles en première instance, voire des appels contre les jugements rendus… Dans la lutte contre la cybercriminalité, il y avait l’absence d’organe judiciaire spécifiquement dédié à ce phénomène ; l’incohérence dans l’application des textes ; l’inefficacité dans la mise en œuvre de l’action publique par les magistrats… Pour le terrorisme, poursuit Mamoudou, il y avait l’insuffisance des textes en ce qui concerne certaines techniques d’enquête ; le manque de diligence et de perspicacité consécutif au cumul de fonctions par le procureur de la République en charge du Pôle… Aussi, le garde des Sceaux énonce avoir remarqué des dysfonctionnements dans le domaine des droits de l’homme ; la surpopulation carcérale au niveau de la Maison centrale d’arrêt de Bamako…
Quelques actions majeures enregistrées par le département
Des solutions ont pu être apportées en vue de pallier les défis du moment. Ce faisant, l’équipe de Mamoudou s’est attelée à la création du pôle national économique et financier à travers la loi N°2021-051 du 29 septembre 2021 portant modification de la loi N°1-080 du 20 août 2001, modifiée, portant code de procédure pénale ; la création de l’Agence de recouvrement et de Gestion des Avoirs saisis ou confisqués par l’ordonnance N°2022-019/PT-RM du 20 septembre 2022, ratifiée par la loi N°2022-048 du 23 novembre 2022 ; la création du pôle national de lutte contre la cybercriminalité ; celle d’un parquet spécialisé au niveau du pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale organisée ; la création de la Direction nationale des droits de l’homme ; celle de l’école nationale de l’administration pénitentiaire… Des réformes relatives à l’organisation et au fonctionnement des services judiciaires (classement des juridictions, augmentation des émoluments des avocats commis d’office par l’Etat…), ont pu avoir lieu sous la transition. Des propos du ministre, « la corruption est une pratique répandue. Elle constitue un véritable drame, ronge les cadres dirigeants, ruine les ressorts du peuple, détourne vers les paradis fiscaux des ressources indispensables ». La corruption, signale-t-il, est la traduction du mépris aveugle et cynique de l’intérêt général.
Des perspectives et dossiers emblématiques cités
Exprimant son satisfecit quant au « franc succès » de la 2ème édition de la Semaine de la Justice, le responsable ajoutera que des suites seront bientôt données aux dossiers de l’OPM et de l’avion présidentiel ; voire le dossier Securiport ; celui concernant les transitaires ; le dossier Samanko, le dossier des Cotonculteurs. A cela s’ajoute le fameux dossier de l’EDM-SA, visiblement loin de connaître son épilogue avec les arrestations en cours ; le dossier COVID-19 ; celui concernant les fraudes aux logements sociaux ; le dossier de surfacturation des actes d’état civil lors des récents concours des corps ; le dossier RAS BATH ; Rose la vie chère, Chouala Bayaya Haïdara… « 1435 personnes formées en 2023 par l’INFJ ; 1,5 milliards F recouvrés par le pôle national financier, sur la base des versements volontaires, 111 dossiers traités en moins de six mois d’activités par le pôle. Il y a eu trois concours dont deux pour les auditeurs de justice. 53 missions d’inspections ont pu être menées dans les services en 2023 », indique-t-on. Quant aux perspectives, le ministre mettra l’accent sur l’adoption prochaine du code pénal et du code de procédure pénale au niveau du CNT ; les recrutements à venir ; les textes sur l’esclavage ; la traite des personnes ; les VBG ; les autorités traditionnelles ; l’assistance judiciaire ; les tarifs et les frais de justice en matière civile ; l’informatisation du casier judiciaire et des nouvelles structures créées ; l’élaboration d’un nouveau programme pour le secteur de la justice ; la création des écoles des autres professions juridiques et judiciaires ; l’organisation des états généraux de la justice…