Avec la Transition, le Mali continue de se vider de ses détenteurs de capitaux. Il nous revient de bonne source qu’un richissime et célèbre commerçant de la place est sur le point de s’installer armes et bagages au Sénégal voisin. Nous tairons non nom pour une question de convenance et nécessité de protection de nos sources, lesquelles affirment avoir aperçu à Dakar l’entièreté ou presque du parc-automobile de l’intéressé. On y trouve, confie-t-on, tout ce qu’on peut imaginer comme véhicules de marque de dernière génération et dans une intrigante proportion. En tout cas, les commentaires et supputations vont bon train dans les milieux maliens de Dakar quant aux intentions du commerçant de s’expatrier, en dépit de sa proximité avec le pouvoir. Certains évoquent un déménagement en vue d’éviter une pression fiscale de plus en plus intenable sur le privé malien, tandis que d’autres subodorent une anticipation de l’avènement de la nouvelle législation en gestation sur la procédure pénale au Mali. En vertu de laquelle les confiscations de biens peuvent intervenir dès le déclenchement d’une procédure d’atteinte aux biens de l’Etat.
La réciprocité aux dépens de soi-même
On est tenté d’en déduire finalement un effet boomerang des options souverainistes en vertu desquelles le Mali s’est éloignée de la France, en dépit de nos liens séculaires. Il s’agit du douloureux épisode qui défraie la chronique depuis une semaine, avec l’expulsion sans ménagement de Maliens résidant en France par leur pays d’origine. On parle d’une vingtaine environ de compatriotes obligés par la sécurité aéroportuaire de Senou à rebrousser chemin. En cause, le malheur de détenir les nationalités de deux pays qui entretiennent un régime de sans – visa, consécutivement au retrait des forces françaises du Mali et à la crise diplomatique subséquente. Il ressort en effet de nos recoupements que lesdits voyageurs, détenteurs de la double nationalité, ont tout simplement surestimé l’esprit de discernement des autorités maliennes en empruntant la destination Bamako sans les précautions exigibles de n’importe quel citoyen français. Or avec leur passeport du pays d’accueil, la partie malienne a visiblement choisi de ne considérer que leur identité française et de les traiter sans discernement comme des citoyens inadmissibles dans leur propre bercail. Il ne leur est peut-être pas irréprochable d’avoir accordé la préférence aux documents administratifs d’un pays détesté par leur pays d’origine, mais la sanction paraît d’autant triviale et excessive que la diaspora malienne – dont la participation à l’économie nationale dépasse l’aide publique au développement – souffre probablement plus de la réciprocité au bercail qu’au pays d’adoption. Et dire que les binationaux se comptent également parmi les joueurs maliens à la CAN.