La nouvelle est tombée en milieu de semaine sur fond de reprise des hostilités diplomatiques avec l’Algérie. Alors que les observateurs attendaient la forme d’un apaisement entre Bamako et Alger, les autorités de transition ont surpris par un double communiqué : l’un accusant formellement l’Algérie d’immixtion dans les affaires intérieures du Mali, l’autre annonçant le décès de l’Accord pour la paix après sa longue agonie.
Sur la première sortie, la partie malienne prend à partie le redoutable voisin dont elle décrie posture inamicale ainsi que la partition vicieuse qu’elle joue dans la déstabilisation de toute la région sahélienne par l’exportation de terrorisme. Autant dire que les ficelles de ce fléau, pour le Mali, sont tirées par Alger auquel les autorités de transition exigent une cessation immédiate de leurs manœuvres.
Sur le second aspect, le Mali ne dénonce pas fondamentalement le contenu de l’Accord. Les autorités de transition en veulent plutôt aux principaux groupes signataires pour leur attitude malveillante et une mauvaise foi entretenues à leurs yeux par le chef de file d’une médiation internationale taxée par ailleurs d’incapacité dans la mise en œuvre des engagements.
Après plusieurs années d’agonie traduite par la rupture du dialogue et l’ascendant de l’option militaire et la reprise des hostilités sur le terrain, les démons qui pendaient au nez des parties se sont finalement manifestés par l’officialisation de la fin de l’APR, le jeudi 25 janvier 2024.
Les autorités de transition lui préfèrent un mécanisme national de résorption de la crise du Nord, sur fond d’exclusion tacite des groupes signataires récemment chassés de Kidal et poursuivis par l’Etat malien pour accointances avec les terroristes.
La réaction du CPS-SPD ne s’est d’ailleurs pas fait attendre. Dans le communiqué que lui a inspiré la décision de Bamako, la CMA et mouvements affiliés, tout en rappelant la communauté à ses responsabilités de garant de l’Accord, insiste sur ses acquis en termes de préservation de l’unité et leur remise en cause par une démarche qu’ils jugent unilatérale du gouvernement. Même son de cloche du côté des autorités algériennes, dont le rôle est magnifié par le CSP qui tire vraisemblablement parti de leurs hostilités diplomatiques avec le Mali. Dans un communiqué publié dans le sillage des accusations de Bamako, Alger n’a pas jugé opportun de réagir aux accusations d’actes subversifs que lui imputent les autorités de transition. Ces dernières sont en revanche prises pour seules responsables de l’impasse ayant affecté la mise en œuvre de l’Accord et préviennent des implications fâcheuses de la décision de lui préférer l’option militaire comme solution à la crise du septentrion malien. Le principal garant de l’APR met en garde, en clair, contre « les germes d’une guerre civile » et les risques latents de remise en cause de l’unité et de l’intégrité territoriale que comporte cette démarche que les autorités algériennes disent avoir longtemps pressentie chez la partie malienne. Selon le communiqué du ministère algérien des Affaires Étrangères, le renoncement du Mali à l’option politique se traduisaient depuis deux ans par les signes avant-coureurs suivant, entre autres : la contestation de l’intégrité de la médiation internationale, le rejet des initiatives de relance de la mise en œuvre de l’accord, la demande de retrait de la Minusma, l’intensification des programmes d’armement financés par des pays tiers et le recours à des mercenaires.
Ainsi acté par son principal garant, le décès de l’Accord intervient à la fois sur fond de crise diplomatique sans précédent et dans un contexte de crise sécuritaire qui accentue depuis 10 ans la dépendance économique du septentrion malien de l’Algérie où sont réfugiés par ailleurs les mouvements armés les plus bellicistes.