C’est le choc et la colère à Kobadani après l’effondrement d’une mine dans la localité de Kangaba dans l’Ouest du pays. Un drame qui a coûté la vie à plus de 73 personnes dans une localité située à plus de 130 kilomètres de la capitale malienne.
“C’est ici !”, s’exclame un jeune orpailleur, le doigt pointé vers une des entrées du tunnel entièrement enseveli sous la terre. Ce lieu n’est plus qu’une étendue vaste, un paysage dévasté. Un site marqué par des vallées et des hauteurs, donnant l’illusion d’une colline, bien que ce ne soit que le résultat d’un lieu sculpté par des bulldozers et des pioches maniées par les chercheurs d’or.
Ce site de la société Toubani Ressources est exploité artisanalement par des orpailleurs. Une compagnie minière canadienne de son ancien nom African Gold Group.
Un drame sans pareil dans cette petite localité située à une dizaine de kilomètres de la frontière guinéenne. Où 73 corps ont été retrouvés ensevelis sous la terre.
Yaya Karambé arrive à peine à marcher. Le jeune homme originaire de Bandiagara est l’un des rares rescapés de l’effondrement de la mine d’or de Kobadani. Les plaies sur son torse et sa jambe témoignent de la gravité de l’incident. Avant de nous raconter la scène, il sort de sa poche un antidouleur, un comprimé jaune qu’il avale avec une gorgée d’eau : “Le jour de l’accident je travaillais dans la mine. Et soudain il y’a eu un grand bruit… on sentait du sable qui tombait sur nos têtes… je ne sais pas comment j’ai pu m’en sortir… même si je suis blessé”.
Un mode de travail risqué
Les incidents sont fréquents sur les sites d’orpaillages, mais c’est la première fois qu’il y a autant de mort à Kobadani dans l’effondrement d’une mine d’or. Les lieux y sont exploités de manière anarchique sans un respect scrupuleux des règles de sécurité. “J’étais là le jour de l’accident nous avons dû utiliser des bulldozers pour quelques personnes”, raconte Souleymane Sangaré, un orpailleur. Il alerte sur leur mode de travail : “Vous voyez ces galeries… les orpailleurs y pénètrent à la recherche de l’or et il arrive que la mine s’effondre. Et tant que quelqu’un ne les aide pas ils ne peuvent pas s’en sortir. C’est ainsi que de nombreuses personnes perdent la vie à la recherche de l’or”.
Le ministre des Mines et son homologue de l’Environnement se sont rendus sur les lieux du drame pour présenter les condoléances du gouvernement. Ils ont appelé au respect des mesures sécuritaires sans pour autant proposer des mesures concrètes pour éviter ces genres d’éboulements meurtriers.
“Nous ne voulons plus de Toubani Ressources ici”
Dans cette zone de l’ouest du Mali, l’orpaillage a pris le dessus sur l’agriculture. Après le tragique incident, la colère des habitants du village ne faiblit pas. Nombreux sont ceux qui voient d’un mauvais œil la présence de la société Toubani Ressources. Mécontents de voir l’exploitation du site exclusivement réservée aux conditions de la compagnie minière.
“Le problème c’est que l’état a donné le permis à une société qui ne respecte pas les lieux”, fustige Diakaridia Camara, maire de la Commune. L’élu local range bien son écharpe tricolore avant d’expliquer : “Cela fait 10 ans que ça dure. La compagnie Toubani Ressources gère le site comme une mine artisanale. Cela n’est pas normal. Nous ne voulons plus de Toubani Ressources ici”.
A Kangaba, l’orpaillage traditionnel a une place importante dans l’économie. Cette gestion repose essentiellement sur les “Tomboloma”. Karamoko Fofana est membre de la jeunesse, il appelle à une implication locale : “Il faudrait aussi impliquer la jeunesse, les ‘tomboloma’. S’ils s’occupaient de la surveillance des sites ils auraient pu informer à temps et éviter des drames de ce genre”.
Le jeune homme fonde sa confiance sur une enquête juste : “Nous voulons qu’une enquête soit réalisée afin que nous puissions situer les responsabilités et que la vérité soit connue”.