La menace des Etats de l’AES relative à leur retrait avec effet immédiat de la CEDEAO semble non seulement porté fruit, mais aussi et surtout elle a mis en branle les présidents de l’organisation sous régionale, au point de désigner un facilitateur en la personne du Président Togolais Faure Eyadema. Ce dernier a pris son bâton de pèlerin pour une série de visites auprès de ses pairs afin de convenir d’un plan négocié de sortie de crise qui frappe certains Etats de la communauté et cela avant le sommet des chefs d’Etat et de gouvernements. Pour rappel Faure Eyadema est le facilitateur désigné par la CEDEAO pour négocier avec les Etats de l’AES, qui dans leurs velléités sécessionniste sont déterminés à tourner dos à la CEDEAO. Faure Eyadema passe pour être ce président qui peut parler sans intermédiaire avec tous ces chefs d’Etat qui sont rupture de ban avec la CEDEAO. Adoubé de cette qualité, Faure parviendra-t-il à faire fléchir les chefs d’Etat de l’Alliance des Etats du Sahel qui ont non seulement claqué la porte de la communauté, mais aussi qui semblent déterminés à ne pas faire marche arrière ? Que feraient les chefs d’Etats de la CEDEAO si les Etats du sahel refusaient de revenir sur leur décision de se retirer de la communauté ?
La tâche serait certes ardue pour le Président togolais, mais les signes d’un compromis sont également perceptibles, car les peuples des pays de l’AES semblent clairement prendre fait et cause pour la CEDEAO et n’entendent nullement la quitter pour des raisons d’agenda politiques. En effet, le peuple Malien dans sa grande majorité semble rejeter toute idée de retrait de la CEDEAO, alors même que c’est le pays du colonel Assimi Goita qui est la locomotive de l’AES. Pour preuve le meeting de soutien à la décision de retrait du Mali de la CEDEAO a été boycotté par le peuple, mieux le Conseil National du Patronat du Mali, CNPM, n’a pas donné une suite favorable à la sollicitation du gouvernement de prendre fait et cause pour le retrait de la CEDEAO. Tout porte à croire que c’est le même scénario dans tous les deux autres pays de l’AES, à savoir le Niger et le Burkina Faso. Donc le facilitateur de la CEDEAO, le Président togolais Faure Eyadema peut bien gagner sa bataille à condition de pouvoir convaincre ses pairs de l’organisation sous régionale. Ces derniers doivent adopter une posture modérée, réconciliant plutôt que jusqu’auboutiste. Faure a désormais le vent en poupe et sa posture moins belliqueuse fait de lui un interlocuteur crédible aux yeux des autorités militaires des Etats de l’AES. Il lui reste maintenant à manier le bâton et la Carotte. Disons beaucoup plus la carotte que le bâton, pour parvenir à un compromis avec le Colonel Assimi Goita, le Capitaine Ibrahim Traoré et le Général Aboudramane Tiani.
Adoubé de cette qualité, Faure parviendra-t-il à faire fléchir les chefs d’Etat de l’Alliance des Etats du Sahel qui ont non seulement claqué la porte de la communauté, mais aussi qui semblent déterminés à ne pas faire marche arrière ?
L’énorme chance que le facilitateur de la CEDEAO semble avoir et qui va être un atout majeur dans sa délicate mission est sans nul doute la non adhésion des peuples de l’AES à ce projet de retrait de la CEDEAO. Ils y voient une volonté manifeste des autorités des Etats de l’AES de se maintenir tout simplement au pouvoir et d’échapper aux sanctions de la CEDEAO, mais nullement la défense des intérêts des peuples. Donc Faure jouera sur cet atout et surtout l’aura qu’il a et la confiance que les trois chefs d’Etat de l’AES lui accordent pour convaincre les autres chefs d’Etat de la CEDEAO à être flexible. Si tant est que l’unité, la cohésion et le vivre ensemble au sein de la communauté sont les préoccupations majeures de tous les chefs d’Etat de la CEDEAO, il n y a pas de raison qu’un compromis ne soit pas trouvé. Le facilitateur doit persuader les trois chefs d’Etats à mettre beaucoup d’eau dans leur Gnamakou Dji.
Que feraient les chefs d’Etats de la CEDEAO si les Etats du sahel refusaient de revenir sur leur décision de se retirer de la communauté ?
Si toutes les tentatives de médiation venaient à échouer, ce qui restera pour les chefs d’Etat de la CEDEAO est le bâton pour sanctionner les trois chefs d’Etats pour leur indélicatesse. La nature de ces sanctions restera à définir, car celles déjà infligées font plus mal aux peuples qu’aux dirigeants. Il faut tout de même reconnaitre que l’organisation sous régionale a parfois pêché par son laxisme et sa méthode non pédagogique. Sers réactions ont été souvent épidermiques et ses sanctions disproportionnées. Donc des véritables réformes sont nécessaires afin que la CEDEAO se donne les moyens d’agir en amont pour éviter d’être chaque fois mis devant les faits accomplis. Le différend qui l’oppose aux trois Etats du sahel, loin d’être une fin en soi, doit plutôt être un cas d’école qui doit être étudié dans les laboratoires de la CEDEAO, afin d’éviter en amont des crises pareilles qui fragilisent à coup sûr la communauté.
En somme, il n’est jamais trop tard pour bien faire, la CEDEAO est appelée à faire son mea maxima culpa de n’avoir pas su dissuader les chefs d’Etat à renoncer à un troisième mandat et de n’avoir pas persuadé ceux qui se sont accaparé illégalement du pouvoir. La CEDEAO doit faire sienne cette célèbre phrase de Montesquieu : « Pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir… » La force en attente attend-elle toujours d’être constituée ?