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Mali-Mètre : Dépités, les Maliens ne font plus des élections une priorité
Publié le jeudi 4 avril 2024  |  Le Matin
Manifestation
© aBamako.com par MS
Manifestation du mouvement Yerewolo Debout sur les Remparts à Bamako pour le départ des forces françaises du Mali
Bamako, le 18 février 2022. Le mouvement Yerewolo Debout sur les Remparts a organisé une manifestation à Bamako pour célébrer le départ des soldats français du Mali
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Au moment où des acteurs politiques (associations et partis) et des organisations de défense des droits humains craignent une «dérive dictatoriale» de la transition au Mali, les citoyens disent se retrouver dans la gestion de leurs autorités à travers l’enquête d’opinion «Mali-Mètre 2024» de la Fondation Friedrich Ebert (FES) rendue publique le 23 mars 2024. Autrement, la défiance des Maliens vis-à-vis de la classe politique demeure toujours.

Neuf Maliens (tous sexes confondus) sur dix sont satisfaits de la gestion de la transition ! Tel est le niveau de satisfaction de la gestion de la transition exprimé dans «Mali-Mètre 2024», l’enquête d’opinion de la Fondation Friedrich Ebert (FES) rendue publique le 23 mars 2024. Dans ce lot, plus de 71 % se disent très satisfaits contre 25 % plutôt satisfaits. Rien de surprenant puisque cela traduit aussi la satisfaction par rapport à l’évolution de la situation générale du pays. En effet, pour quatre 4/5 (81 %), «la situation générale du pays s’est améliorée au cours des douze derniers mois». Ils sont seulement 8 % à défendre qu’elle se soit détériorée au cours de la même période.

Plus surprenant, le retour rapide à l’ordre constitutionnel ne figure pas parmi les «défis et priorités» énumérés par les personnes sondées. La lutte contre l’insécurité (60 %), la lutte contre l’insécurité alimentaire (52 %), la lutte contre le chômage des jeunes (42 %) et la lutte contre les délestages (39 %) sont les défis majeurs cités. La lutte contre l’insécurité (61 %), la création d’emploi (43 %), la lutte contre l’insécurité alimentaire (38 %), la lutte contre la pauvreté (24 %), l’amélioration du système éducatif (21 %)… sont donc les actions prioritaires à mettre en œuvre par le gouvernement de transition.

N’empêche que les Maliens font aujourd’hui plus confiance au président de la Transition qu’à son gouvernement. En effet, selon cette enquête d’opinions, 4/5 Maliens (86 %) reconnaissent faire plus confiance au président de la transition, contre seulement 6 % pour le gouvernement et 1 % pour le Conseil national de transition (CNT). Ils son ainsi 9/10 citoyens à être satisfaits du président de la transition, avec 83 % très satisfaits et 15 % plutôt satisfaits. Et 4 Maliens sur 5 font confiance à la transition (62% beaucoup confiance et 21 % assez confiance) pour «conduire le pays vers une démocratie plus stable et à un renforcement de la bonne gouvernance».

Les résultats de cette enquête (qui ne souffre d’aucune partialité) sont publiés (23 mars 2024) au moment où des acteurs politiques (associations et partis) et des organisations de défense des droits humains craignent une «dérive dictatoriale» de la transition au Mali. Selon eux, la dissolution de partis et d’associations vont au-delà de la raison d’Etat pour être une menace aux acquis de la démocratie. Tout comme la multiplication des interpellations au nom de la loi sur la cybercriminalité qui, dans la pratique, est plus liberticide que préventive. Pour de nombreux acteurs politiques, «on ne peut pas aujourd’hui s’exprimer librement sur la situation du pays sans risque de retrouver derrière les barreaux».

Mais, «Mali-Mètre 2024» prouve que les acteurs politique, surtout ceux du Mouvement démocratique, ne sont pas toujours sur la même longueur d’ondes que la population malienne. Cette enquête démontre que la défiance des Maliens vis-à-vis de la classe politique est loin de s’estompée. Convaincus que la classe politique est en partie responsable des maux qui ont plongé le pays dans la léthargie actuelle, les Maliens accorde plus de priorité à la refondation de l’Etat afin de réinstaurer à la politique les valeurs d’une gouvernance vertueuse. C’est pourquoi ils ne sont pas pressés d’aller aux élections, notamment à présidentielle.

«Le Mali est un pays presque plongé dans le coma par la gestion des politiciens. Ce n’est pas une thérapie de choc dont il a besoin, mais de soins méticuleux sur une certaine période pour le débarrasser des métastases de la mauvaise gouvernance source de tous les périls, de tous les maux et de toutes les crises», pense un enseignant à la retraite. Ils sont très nombreux nos interlocuteurs qui sont de son avis. «Il faut soigner le pays, le relever avant de penser aux élections. Si les élections pouvaient sauver un pays, le nôtre n’en serait pas là aujourd’hui», réplique-t-il

On comprend alors aisément que plus de quatre Maliens sur dix (87 %) approuvent la décision de reporter les élections contre 8 % qui estiment qu’il s’agit d’une mauvaise décision… En tout cas, même si «Mali-Mètre» n’est qu’une «cartographie des perceptions des populations maliennes au moment de la collecte des données (du 5 au 17 janvier 2024)», pas donc une «une vérités absolue», ses résultats sont néanmoins des bons indicateurs pour l’opinion nationale et internationale, pour les acteurs politiques, pour les analystes politiques…

Visiblement, les Maliens ne veulent plus de cette «démocratie de façade» qui a conduit leur pays dans le pétrin qu’ils vivent aujourd’hui.



Moussa Bolly
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