Le Mali va célébrer la semaine prochaine l’Aïd El Fitr, la fin du ramadan. A quelques jours de la fête, l’ambiance est festive dans les marchés de Bamako, déjà bien achalandés pour tout âge et toutes les bourses. Le constat est plus amer dans certains ateliers de couture. Faute d’électricité, le travail est ralenti ou presque arrêté. Quelques ateliers tournent grâce à des groupes électrogènes. Malheureusement, cela a un coût !
Dans un quartier de la Commune II du district de Bamako, le regard Boua est figé sur l’horloge de son téléphone. Les nombreux appels entrants sont pourtant ignorés. Il est plutôt préoccupé à faire le décompte de chaque minute passée. D’une petite voix, il lâche quelques mots après un long moment de silence. « On ne sait plus quoi faire ». Il poursuit « On ne parvient plus à travailler. Avant de quitter la maison, je me rassure qu’il y a de l’électricité ici, mais une fois sur place, souvent on se rend compte qu’elle est partie », déplore le tailleur. A quelques jours de la fête du ramadan, la journée de Boua n’a pas encore commencé. Il est 12h passées.
Bien que très sollicités en ces périodes, plusieurs tailleurs dans la capitale comme Boua sont obligés de réduire leurs activités par manque d’électricité. Sur les trois machines installées à l’intérieur de son atelier, une seule est fonctionnelle présentement. Les deux autres sont débranchées et rangées de côté. Ses employés sont en chômage partiel pour le moment.
Afin de pouvoir satisfaire ses clients pendant cette période, le chef d’atelier avait acheté un groupe électrogène, quelques mois plutôt. Aujourd’hui, l’appareil est en panne. Impossible de le faire redémarrer pour l’instant. Sans d’autres alternatives, le tailleur a décidé de ne pas prendre des habits de fête cette année afin d’éviter les accrochages avec ses clients.
Contrairement à Boua, les machines tournent à plein temps chez Vicky en Commune III, mais sur un groupe électrogène. Les préparatifs vont bon train selon Issiaka Koné, le promoteur « Le marché n’est pas comme les années précédentes, mais on continue de travailler », explique le tailleur.
Pour satisfaire toutes les demandes de ses clients à l’approche de la fête, le promoteur se fait aider par 4 jeunes. Il doit surtout débourser une fortune en carburant. Une situation très difficile pour les chefs d’ateliers, pense Issiaka. « On paie les ouvriers, les matériels, le loyer. Pour faire un ou deux complets, je suis obligé de prendre au minimum 3 000 FCFA d’essence. Alors qu’avant 10 000 à 15 000 de crédit pouvait faire la moitié du mois, maintenant on dépense plus que le triple voire le quatriple de nos recettes dans le carburant seulement », regrette-t-il.
Avec une consommation mensuelle d’environ 30 000 FCFA en énergie, le chef d’atelier dit débourser aujourd’hui « 15 000 FCFA tous les deux jours en carburant » pour faire tourner le groupe électrogène, soit un budget supplémentaire de près de 200 000 FCFA.
Ce délestage dans la capitale a eu une incidence considérable sur les prix de confection des habits. Les tenues faites avant à 10 000 sont aujourd’hui cousues entre 12 500 à 15 000 FCFA, voire plus selon les endroits.
Cette augmentation est justifiée selon certaines clientes comme Mme Keita, directrice d’école. « Depuis le début du délestage, mon tailleur m’a informée de la situation actuelle. On comprend un peu la position des tailleurs parce que ce sont aussi des chefs de famille qui vivent aussi de ce métier ».
Aux dires du Vicky ce changement de tarif de confection des habits ne peut pas être appliqué à tous les clients. Selon lui, « les clients ne sont pas pareils. Ceux qui n’ont pas de moyens si je leur demande d’ajouter 2000 ou 3000 sur les habits, tu les mets dans les problèmes. Des fois, quand j’explique notre situation à d’autres, elles acceptent nos tarifs actuels, par contre certaines se plaignent et ça peut créer un problème entre nous. On est obligé de faire avec ».
Dernière leurs machines à coudre, Boua et Vicky disent tous travailler aujourd’hui pour maintenir la clientèle. Une clientèle qui se fait de plus en plus rare. Sinon disent-ils « fête ou pas, tous les tailleurs voient leurs revenus diminuer par manque d’électricité ».
Kadiatou Mouyi Doumbia
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Fête et marché des bœufs :
Les clients se font rares dans les garbals
Mardi ou mercredi prochain les Maliens célébreront l’Aïd el-Fitr, la plus importante fête religieuse musulmane qui consacre la fin du ramadan. Contrairement à la fête de tabaski où des moutons sont immolés, à l’Aïd el-fitr, des bœufs sont égorgés pour satisfaire les besoins de viande. A quelques jours de cette fête, les garbals de la capitale sont inondés de bœufs. Par contre les clients se font rares en raison du marasme économique.
L’achat de bœuf se fait généralement par tontine ou cotisation dans les différents grins ou services. Quelques rares services font le bon samaritain pour leurs employés en leur payant un ou des bovidés. Sous un tronc d’arbre ce mercredi matin, un groupe de personnes fait l’état des finances de leur caisse en vue d’acheter un bœuf. Mais l’état de la cagnotte reste très faible pour s’en offrir. Lors des discussions, ils ont décidé que chacun fasse un effort supplémentaire pour arrondir la somme au moins à 375.000 FCFA avant de se rendre dans un garbal pour discuter avec un vendeur de bœuf.
Pour l’heure, en marge de la célébration de la fête de l’ l’Aïd el-fitr, Bamako est inondé de bœuf. Que ce soit dans les principaux garbals de la capitale que nous avons sillonnés et ceux qui engraissent des bœufs en privé dans le but de les revendre à des particuliers.
Malgré cette abondance, le marché de bovidés reste timide en raison des difficultés économiques et financières que le pays traverse depuis plusieurs années de cela. La situation économique fait que les clients sont rares dans les différents points de vente. Ceux qui y vont rebroussent chemin aussitôt en raison des prix jugés exorbitants.
“Je suis venu juste prendre la température du marché des bœufs. Mais les prix que les vendeurs de bœufs avancent laissent fuir la clientèle. Par exemple, on m’a montré un bœuf moyen pour 385.000 F CFA. Ce que je n’ai pas”, a laissé entendre un client au garbal de Faladié.
Les vendeurs des bœufs espèrent que, malgré le marasme économique du pays d’ici dimanche, les clients vont venir. “L’année dernière, c’était comme ça. Les Maliens ont acheté des bœufs à des prix plus chers que cette année. Cette année malgré que les clients viennent en compte-gouttes, on espère que d’ici dimanche, le garbal sera vide”, a espéré Hamady Diallo vendeur de bœufs au garbal de Faladié. Selon ce dernier, la hausse du prix des bœufs s’explique par l’insécurité grandissante au Centre du pays et aussi le coût élevé du prix de l’aliment bétail.
“Pour avoir un bon bœuf à abattre la veille de la fête de ramadan, il faut commencer à débourser dans les 400. 000 F CFA ou au-delà. Lors des discussions avec les clients, on fait des petites réductions. Il faut aussi comprendre qu’en raison de la hausse du prix de l’aliment bétail qui a augmenté de façon considérable sur le marché en plus du contexte sécuritaire du pays on fait de notre mieux. La plupart des bétails qui pullulent Bamako viennent soit du Centre du pays ou les alentours de Bamako.
Au Centre du pays, les djihadistes nous fatiguent énormément parce qu’à chaque poste de contrôle, ils nous demandent de payer de l’argent. Si on refuse, ils réquisitionnent tous les chargements des bétails”, a-t-il ajouté.