Non-reversement de recettes dans les comptes bancaires de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan (SCI-MMA) pour un montant total de 41 millions FCFA et virement du loyer d’un espace publicitaire sur un compte bancaire n’appartenant pas à la Maison du Mali à Abidjan pour un montant de 27 millions FCFA. Auxquels s’ajoutent, l’encaissement des recettes issues de la location d’un espace publicitaire sur le compte personnel de l’Administrateur Gestionnaire de la Maison du Mali pour un montant total de 43 millions FCFA et la non-justification des dépenses pour un montant total de 32 545 400 FCFA…
Autant de pratiques qui selon le Bureau du Vérificateur Général (BVG) ont précipité la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan dans l’abîme. Avec à la clé, plus de 581 millions (581 246 994 F) de francs CFA qui ont pris une destination, jusque-là, encore inconnue pendant les exercices 2018, 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023 (30 novembre).
De l’Administrateur Gestionnaire sortant de la Maison du Mali à Abidjan, en la personne de Monsieur Lassina Diourté en passant par l’Administrateur Gestionnaire rentrant, le Sieur Drissa Coulibaly, tous deux sont impliqués dans la gestion scandaleuse des fonds de l’immeuble Maison du Mali à Abidjan. Les irrégularités financières engendrées par ces responsables et leurs bandes au niveau de cette entité étatique, pendant les exercices 2018, 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023 (30 novembre) dépassent l’entendement. D’où la paralysie de la structure à tous les niveaux à Abidjan. Ou presque.
Décidemment, la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan dans son histoire n’a jamais connu une telle hémorragie financière. Pire, elle n’a jamais été confiée à des personnalités, aussi controversées que l’ancien patron des lieux, Lassina Diourté et l’actuel responsable, Drissa Coulibaly. Presque 5 ans durant, les caisses ont coulé. Comme le fleuve Niger dans son lit. Et les gaps financiers sont comptabilisés en plusieurs centaines de millions : 581 millions de nos francs (581 246 994 FCFA).
La Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan, en abrégé SCI-MMA, n’a pas seulement perdu de sa superbe. Elle a été vidée de son âme, vendue au diable. Et jusqu’aujourd’hui, son Administrateur Gestionnaire sortant, Lassina Diourté et l’actuel responsable des lieux, Drissa Coulibaly, n’affichent qu’une image de ruine et de désolation. Et pour cause : jamais, la délinquance financière au sein de cette société d’Etat n’a atteint un tel degré.
La gestion de la Maison du Mali entre parenthèses
C’est dans le cadre des relations de coopération et d’amitié entre les Républiques du Mali et de la Côte d’Ivoire que notre pays a acquis en 1963 un terrain à usage commercial au quartier Plateau à Abidjan et construit l’immeuble de la Maison du Mali de 1976 à 1978. L’immeuble est géré par la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan qui est dirigée par un Administrateur Gestionnaire.
L’immeuble Maison du Mali comprend aujourd’hui deux (2) parties : l’Ambassade et le Consulat du Mali qui occupent l’extrême sud sur deux (2) étages ; le reste de l’immeuble, comprenant deux (2) sous-sols, un (1) rez-de-chaussée et sept (7) étages, est géré par la SCI Maison du Mali.
L’immeuble est composé en tout de 162 bureaux dont 160 occupés, 48 magasins et 61 places de parking tous occupés ainsi qu’un espace publicitaire comprenant 12 panneaux dont 10 occupés. Et la Maison du Mali a fait l’objet de travaux de réhabilitation qui ont été achevés en 2010 pour un montant total de 1 422 887 995 FCFA. La réception définitive a eu lieu en 2012 et l’immeuble a été mis en pleine exploitation.
La SCI Maison du Mali à Abidjan est gérée par un Administrateur Gestionnaire nommé par Arrêté interministériel des Ministres chargés des biens de l’Etat et des Affaires étrangères. Il bénéficie des avantages d’un Secrétaire Agent Comptable d’une Ambassade. La SCI Maison du Mali emploie 20 personnes dont cinq (5) cadres : un fonctionnaire de l’Etat du Mali qui occupe la fonction d’Administrateur Gestionnaire, un comptable chargé du recouvrement, un comptable chargé des dépenses, un chargé des contrats et un chargé des contentieux.
Jugée, pourtant, stratégique dans la politique de logements de l’Etat malien sur le territoire Ivoirien, la gestion de l’immeuble Maison du Mali à Abidjan n’a pas échappé à l’appétit vorace de ses responsables. Par petite touche, ils ont « sucé » les caisses, érigés le népotisme en mode de gestion. L’espoir tant suscité auprès du gouvernement et des maliens de la diaspora, a viré au cauchemar. Un flop magistral
L’audit sur la gestion de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan par le Bureau du Vérificateur Général avait pour objectif de s’assurer de la régularité et de la sincérité des opérations de recettes et de dépenses. Cependant, le contrôle a porté sur les opérations de recouvrement des recettes notamment les loyers des bureaux, des magasins, des parkings et des espaces publicitaires ainsi que l’exécution des dépenses.
Non reversement des recettes de la Maison du Mali
Le sport favori de l’Administrateur Gestionnaire de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan est le non reversement des recettes. Et les textes sont clairs sur ce plan.
L’article 16 des Statuts de la SCI Maison du Mali relatif aux pouvoirs des administrateurs stipule : « […] ; Il règle et arrête tous comptes avec tous créanciers ou débiteurs, touche les sommes dues à la Société et paie celles qu’elle peut devoir ; Il fait ouvrir à la Société tous comptes de dépôt de fonds, il crée tous chèques et virements pour le fonctionnement de ces comptes ; […]. » Et l’article 112 de l’Acte uniforme du 15 décembre 2010 relatif au droit commercial général de disposer : « En contrepartie de la jouissance des lieux loués, le preneur doit payer le loyer aux termes convenus entre les mains du bailleur ou de son représentant dûment mandaté. Le paiement du loyer peut être fait par correspondance ou par voie électronique. »
Afin de s’assurer du recouvrement intégral des loyers et de leur reversement sur les comptes bancaires de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan, l’équipe de vérification s’est entretenue avec l’Administrateur Gestionnaire et le Chargé de recouvrement. Elle a également effectué un rapprochement entre les recettes collectées et celles reversées dans les comptes bancaires de la SCI Maison du Mali. Du coup, il ressort que l’Administrateur Gestionnaire n’a pas reversé des recettes de la SCI Maison du Mali. En effet, il n’a pas reversé dans les comptes bancaires de la société les recettes issues de la location des magasins et des parkings. Le montant total des recettes non reversées s’élève à 41 408 000 FCFA.
Pendant ce temps, l’actuel Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali, Drissa Coulibaly a minoré des montants de loyers. L’article 6 du contrat de bail commercial signé le 1er mars 2020 entre la SCI Maison du Mali et la société Abidjan gardiennage stipule : « Le présent bail est consenti et accepté moyennant le loyer de cent soixante mille francs CFA (160 000 FCFA) par mois, charges non comprises, payable d’avance, le premier jour de chaque mois en bonnes espèces de monnaies ayant cours légal […] Taxes et charges : Il sera en outre payé par le preneur le cas échéant, au titre de charges, en même temps que le loyer, la quote-part de taxes locatives et frais de gardiennage, entretien, électricité eau des parties communes. Elles sont payables d’avance et s’élèvent : 15%. » Quant à l’article 23 du contrat de bail signé le 1er mars 2018 entre la SCI Maison du Mali et le Conseil Supérieur de la Diaspora Malienne de la Côte d’Ivoire (CSDM-CI) stipule : « Le présent bail est consenti et accepté moyennant le loyer de cent cinquante mille CFA (150 000) FCFA/mois. Charges non comprises, payables d’avance, le premier jour de chaque mois en bonnes espèces de monnaies […] Taxes et Charges : Il sera en outre payé par le preneur le cas échéant, au titre de charges, en même temps que le loyer, la quote-part de taxes locatives et frais de gardiennage, entretien, électricité eau des parties communes. Elles sont payables d’avance. 12% ».
Afin de s’assurer du respect de ces stipulations, l’équipe de vérification a fait un rapprochement entre le montant du loyer fixé dans les contrats de bail et les loyers facturés par l’Administrateur Gestionnaire et payés par les locataires durant la période sous revue. Elle a constaté que l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali a minoré des montants de loyers. En effet, il a facturé des montants inférieurs à ceux prévus par les contrats de bail de deux (2) locataires.
Pour la société Abidjan gardiennage, il a facturé un montant de 128 350 FCFA par mois au lieu de 184 000 FCFA prévus par le contrat de bail. En ce qui concerne le CSDM-CI, il a facturé le montant de 60 000 FCFA au lieu de 168 000 FCFA contractuel. Le montant total des minorations de loyers au cours de la période sous revue s’élève à 8 820 600 FCFA.
Aussi, l’Administrateur Gestionnaire, M. Drissa Coulibaly, a ordonné le virement du loyer d’un espace publicitaire sur un compte bancaire n’appartenant pas à la SCI Maison du Mali. L’article 5 du contrat de location d’espace publicitaire du 26 mai 2023, conclu entre la SCI Maison du Mali et la Banque de l’Union Côte d’Ivoire (BDU-CI), stipule : « Le montant annuel pour la location de ce panneau s’élève à la somme de VINGT-SEPT MILLIONS DE FRANCS CFA (FCFA 27 000 000) toutes taxes comprises. » Et l’article 7 du même contrat de poursuivre : « Le montant de la location est payable d’avance en totalité. Les parties conviennent que la facture sera réglée dans les 07 jours qui suivront sa réception par le preneur. »
Pour s’assurer de l’effectivité de ces stipulations, l’équipe de vérification s’est entretenue avec les responsables de l’entité. Elle a, par Mémo n°4 du 15 janvier 2024, demandé à la BDU-CI (Banque de l’union de Côte d’Ivoire) les pièces justificatives du paiement des loyers de l’espace publicitaire. Elle a constaté que l’Administrateur Gestionnaire, Drissa Coulibaly, a ordonné le paiement du loyer d’un espace publicitaire sur un compte bancaire n’appartenant pas à la SCI Maison du Mali à Abidjan. En effet, sur instruction de l’Administrateur Gestionnaire Drissa Coulibaly, en règlement de la Facture n°202301 du 30 mai 2023 émise pour la location d’un espace publicitaire, la BDU-CI a procédé au virement d’un montant de 27 millions FCFA, le 1er juin 2023, sur le compte bancaire « SCI Maison du Mali-Solidarité ». Ce compte n’appartient pas à la SCI Maison du Mali à Abidjan. Il est dédié au fonds de solidarité des employés de la SCI-MMA et n’apparait dans aucun des registres de caisse ou de banque de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan. Le montant reçu a été entièrement décaissé le même jour. Le montant de l’irrégularité s’élève à 27 millions FCFA.
Et comme si cela ne suffisait pas, l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali, M. Drissa Coulibaly a encaissé les recettes issues de la location d’un espace publicitaire sur son compte personnel. De l’examen des dispositions de l’accord et des documents y afférents, l’équipe de vérification a constaté que M. Drissa Coulibaly, l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali a encaissé les recettes issues de la location d’un espace publicitaire sur son compte personnel. En effet, sur les Factures n°05-12/04/2020 du 6 avril 2020 de 18 400 000 FCFA et n°157/17/2020 sans date de 25 000 008 FCFA adressées à la BMS de Côte d’Ivoire pour la location d’un panneau publicitaire sur le toit de la Maison du Mali, l’Administrateur Gestionnaire a donné les références de son compte personnel domicilié à ORABANK Côte d’Ivoire au lieu d’un des comptes bancaires de la SCI Maison du Mali. Ainsi, en règlement desdites factures, la BMS-CI a respectivement payé la somme de 25 000 008 FCFA par virement SWIFT du 18 décembre 2020 sur le compte indiqué sur la facture et la somme de 18 400 000 FCFA par chèque BMS-CI n°0364955 du 8 avril 2020 libellé au nom de la SCI Maison du Mali. Ce chèque a également été encaissé sur le compte de l’Administrateur Gestionnaire, le sieur Drissa Coulibaly, logé à ORABANK. Le montant total des recettes de la SCI Maison du Mali à Abidjan encaissées par l’Administrateur Gestionnaire, Drissa Coulibaly, sur son compte personnel et non reversées à la société est plus de 43 millions de nos francs (43 400 008 FCFA).
Et comble de la délinquance financière à l’immeuble Maison du Mali à Abidjan, l’équipe de vérification a décelé que l’Administrateur Gestionnaire, M. Drissa Coulibaly, a confié la gestion de l’espace publicitaire de la Maison du Mali à une entreprise dont il est le gérant. En effet, en sa qualité d’Administrateur Gestionnaire, le Sieur Drissa Coulibaly a conclu le 1er janvier 2022 un contrat de gestion de l’espace publicitaire de la Maison du Mali pour une période de 10 ans avec la société TATA COMMUNICATION. Cette société loue et encaisse ainsi les loyers d’une dizaine de panneaux publicitaires sur le toit de la Maison du Mali et doit payer annuellement la somme de 30 millions FCFA à la SCI Maison du Mali. Sur ce contrat, une personne du nom de Monsieur Oumarou MAGASSOUBA est présentée comme le gérant de la société TATA COMMUNICATION. Or, la Facture n°06/02/2022 du 14 février 2022 de TATA COMMUNICATION, d’un montant hors taxe de 30 millions FCFA soumise à la BGFIBANK (Banque Gabonaise et Française International) de Côte d’Ivoire pour la location d’un panneau publicitaire de 81 m2 situé sur le toit de la Maison du Mali, a été signée par l’Administrateur Gestionnaire de la Maison du Mali, en la personne de Drissa Coulibaly, en qualité de Gérant de la société TATA COMMUNICATION. De plus, la Facture n°3624-10-22/SCI LE MALI du 26 octobre 2022 du même montant a été signée par l’épouse de l’Administrateur Gestionnaire et le cachet apposé sur la facture porte la mention « TATA COMMUNICATION LE PDG » avec le numéro de Gestion de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan. En ce qui concerne le panneau publicitaire loué à SOCIAM, le numéro de boite postale « BP 2746 » figurant sur les Factures n°0001-11-23/Tata Communication et n°0002-12-23/Tata Communication de 20 millions FCFA chacune, toutes établies le 12 janvier 2023, appartient à l’administration de la SCI Maison du Mali à Abidjan. L’adresse figurant sur lesdites factures « Immeuble du Mali, 1er étage, porte 110 » correspond à un bureau occupé par l’administration de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali. De plus, le deuxième numéro de téléphone figurant sur le pied de page de la facture appartient à un employé de la SCI Maison du Mali que l’Administrateur Gestionnaire, Drissa Coulibaly, a recruté en 2019. En outre, l’Administrateur Gestionnaire est le signataire unique du compte bancaire de la société TATA COMMUNICATION domicilié à la BMS-CI. Le montant total des recettes irrégulièrement encaissées par l’Administrateur Gestionnaire s’élève à 100 306 000 FCFA dont 58 800 000 FCFA de la BGFI Bank et 41 506 000 FCFA de la SOCIAM.
A en croit des indiscrétions au niveau de la Maison du Mali à Abidjan, tous ces montants encaissés, irrégulièrement, par l’Administrateur Gestionnaire Drissa Coulibaly sur des comptes personnels sont assimilables à des détournements directs de fonds. Seule la Justice nous en dira de plus. Du moins à l’heure actuelle.
Non recouvrement des créances de la Maison du Mali et des paiements indus
L’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali, Drissa Coulibaly, n’a pas recouvré la totalité des créances sur les locations de bureaux et de l’espace publicitaire.
L’article 4 du contrat de gestion d’espace publicitaire conclu le 1er janvier 2022 entre la SCI-Maison du Mali et la société TATA COMMUNICATION stipule : « Au titre des rétributions, les parties conviennent que la SCI MAISON DU MALI percevra un montant global de 30 000 000 FCFA (TRENTE MILLIONS de FRANCS CFA) par an. Le premier (1er) paiement s’effectuera le 01 janvier 2023. »
Afin de s’assurer de l’application des textes, l’équipe de vérification a demandé les soldes clients de la SCI Maison du Mali. Elle a également demandé, par Mémo n°01 du 9 janvier 2024, les preuves de paiement du loyer de l’espace publicitaire.
Du coup, elle a constaté que l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali, Drissa Coulibaly, n’a pas recouvré des créances sur les loyers de quarante-cinq (45) bureaux et d’un (1) espace publicitaire de la SCI Maison du Mali. En effet, au cours de la période sous revue, l’Administrateur Gestionnaire n’a produit aucun document prouvant qu’il a posé des actes pour le recouvrement des arriérés. Le montant total des loyers non recouvrés s’élève à 51 082 395 FCFA dont 26 082 395 FCFA pour les loyers de bureaux et 25 millions FCFA pour les panneaux publicitaires.
Pire, l’actuel Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali s’est payé un salaire indu. Pourtant, l’article 2 de l’Arrêté interministériel n°2022-3032/MUHDATP-MAECISG du 14 juillet 2022 portant nomination d’un Administrateur Gestionnaire de la Maison du Mali à Abidjan stipule que « l’intéressé est assimilé à un Secrétaire Agent Comptable d’une Ambassade et bénéficie, à ce titre, des avantages prévus par la réglementation en vigueur. » Mieux, un autre arrêté ministériel (article 2 de l’Arrêté interministériel n°2018-2481/MEF-MAECI-SG) en date du 13 juillet 2018 portant nomination d’un Administrateur Gestionnaire de la Maison du Mali à Abidjan, a accordé les mêmes privilèges à l’Administrateur sortant, Lassana Diourté. Aussi, l’article 3 de l’Arrêté interministériel n°2014-2403/MDEAFP-MAEIACISG du 03 septembre 2014 portant nomination d’un Administrateur Gestionnaire de la Maison du Mali à Abidjan avait accordé des avantages prévus par la réglementation en vigueur à un autre administrateur Gestionnaire dont la gestion a précédé les deux premiers.
Cependant, l’équipe de vérification a fait un rapprochement des avantages perçus par les trois Administrateurs Gestionnaires de la SCI Maison du Mali à Abidjan et ceux prévus par leurs arrêtés de nomination. Elle a constaté que les trois patrons de la SCI Maison du Mali à Abidjan se sont payés des salaires indus. En plus de leurs salaires de fonctionnaire, et des avantages de Secrétaire Agent Comptable, ils se sont payés des salaires sur les ressources de la SCI Maison du Mali. Le montant total des salaires indus perçus par les trois (3) Administrateurs Gestionnaires de la SCI Maison du Mali, au cours de la période sous revue, s’élève à 128 331 687 FCFA.
Par ailleurs, l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali s’est accordé des avantages indus. Pour s’assurer du respect de ces dispositions réglementaires, l’équipe de vérification a examiné les avantages payés à l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali. De plus, elle a procédé à des entrevues avec l’Administrateur Gestionnaire et les comptables. Il ressort que l’homme (Drissa Coulibaly) s’est octroyé des avantages indus. En effet, il s’est accordé des gratifications en 2023 à l’occasion des fêtes de Tabaski, de Ramadan, de Maouloud, du 1er mai et s’est payé un 13ème mois de salaire pour un montant total de 14 423 000 FCFA.
Egalement, il a procédé à des achats de produits alimentaires tels que le sucre, le riz, l’huile, le beurre, les biscuits, les bonbons, les yaourts pour son domicile à hauteur de 22 418 971 FCFA. Il a aussi payé les abonnements télé à Canal+ pour un montant de 2 044 000 FCFA. Enfin, il a payé les frais de gardiennage de son domicile pour un montant total de 11 045 000 FCFA. Le montant total des avantages indus que l’Administrateur Gestionnaire, Drissa Coulibaly s’est accordés sur les fonds de la SCI Maison du Mali à Abidjan, durant la période sous revue, s’élève à 49 930 971 FCFA.
S’y ajoutent des paiements indus qu’il a effectué. Pour s’assurer de l’exécution correcte du contrat, l’équipe de vérification a fait un rapprochement entre le nombre de gardiens prévu dans le contrat et celui mentionné sur les factures de la société de gardiennage. Elle a constaté que l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali a fait des paiements indus de frais de gardiennage. En effet, le nombre d’agents facturés pour le gardiennage de la SCI Maison du Mali à Abidjan et du domicile de l’Administrateur Gestionnaire est supérieur au nombre prévu par les stipulations du contrat de gardiennage. Ainsi, durant la période sous revue, 18 gardiens ont été payés alors que 16 sont prévus dans le contrat. L’équipe de vérification n’a reçu aucune preuve de prestation des deux (2) gardiens supplémentaires. Le montant total indu payé par l’Administrateur Gestionnaire s’élève à 8 222 500 FCFA.
Plus grave, l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali a accordé des avantages indus au personnel. Après une analyse des contrats de travail du personnel de la SCI Maison du Mali, l’équipe de vérification a constaté que l’Administrateur Gestionnaire de la SCI Maison du Mali a accordé des avantages indus au personnel. En effet, pendant la période sous revue, il a accordé des gratifications au personnel de la Maison du Mali à l’occasion des fêtes de Tabaski, de Ramadan, de Maouloud et du 1er Mai alors que ces avantages ne sont pas prévus par les clauses contractuelles. Ces avantages ne sont pas non plus prévus par la convention Collective Interprofessionnelle de Côte d’Ivoire. Le montant total des avantages indus accordés par l’Administrateur Gestionnaire au personnel s’élève à 10 741 898 FCFA.
Non justification des ressources
L’Administrateur Gestionnaire Drissa Coulibaly, n’a pas justifié l’utilisation des ressources de la Maison du Mali versées sur un compte bancaire ouvert à son nom. Pour en avoir le cœur net, l’équipe de vérification a demandé les numéros, les relevés de comptes bancaires de la SCI Maison du Mali, et la liste des signataires des différents comptes bancaires pour examen. Elle a procédé à des entrevues avec les comptables et a adressé le Mémo n°01 du 9 janvier 2024 à l’Administrateur Gestionnaire. Au finish, l’équipe de vérification a constaté que l’Administrateur Gestionnaire, Drissa Coulibaly, n’a pas justifié l’utilisation des ressources de la SCI Maison du Mali versées sur un compte bancaire ouvert en son nom. En effet, de janvier à juillet 2022, il a procédé au versement de recettes de la SCI Maison du Mali sur son compte bancaire personnel domicilié à la Banque Atlantique Côte d’Ivoire (BACI). Au cours de cette période, l’Administrateur Gestionnaire a effectué 54 opérations de retrait sur ledit compte bancaire sans aucune pièce justificative alors que toutes les sommes encaissées étaient des recettes de la SCI. Le montant total des retraits non justifiés s’élève à 8 913 400 FCFA. Un autre détournement opéré sur les fonds de la Maison du Mali par l’Administrateur Gestionnaire, selon des sources que nous avons contactés.
Pendant ce temps, notre Administrateur Gestionnaire M. Drissa Coulibaly a effectué des dépenses scolaires indues. L’équipe de vérification a constaté qu’il a payé sur les fonds de la SCI Maison du Mali des fournitures scolaires pour un montant total de 1 249 835 FCFA, des frais de cantine scolaire pour un montant total de 2 700 000 FCFA, des frais de scolarité universitaires pour un montant total de 3 287 500 FCFA et les frais de scolarité d’un montant de 285 000 FCFA d’un enfant dont il n’est ni le père biologique ni le père adoptif. Le montant total des dépenses indues payées s’élève à 7 522 335 FCFA.
En plus, l’homme n’a pas pu justifier l’acquisition de parcelles sur les ressources de la Maison du Mali. Afin de s’assurer du respect des clauses, l’équipe de vérification a examiné les pièces justificatives des dépenses et les relevés bancaires. C’est ainsi, qu’elle a constaté que l’Administrateur Gestionnaire Drissa Coulibaly, a acheté sur les ressources de la Maison du Mali, une parcelle à Bassam à 20 487 100 FCFA et une autre à Yamoussoukro à 7 750 000 FCFA. Toutefois, les reçus d’acquisition sont en son nom et les titres de propriété desdites parcelles ne sont pas disponibles à la Maison du Mali. De même, il a contribué à hauteur de 6 500 000 FCFA sur les ressources de la SCI Maison du Mali, à l’acquisition d’une parcelle à Songon au profit de la SCI Maison du Mali et du personnel au nombre de 19 agents qui ont contribué sur le fonds de solidarité de la SCI Maison du Mali, sans pouvoir mettre à la disposition de l’équipe de vérification le titre de propriété de ladite parcelle. Le montant total des dépenses d’acquisition de parcelles non justifiées par l’Administrateur Gestionnaire Drissa Coulibaly, s’élève à 34 737 100 FCFA.
Non plus, il n’a pas pu justifier des indemnités de mission payées sur les ressources de la société. En effet, il n’a pas pu prouver aux enquêteurs, les ordres de mission de 11 missions effectuées au cours de la période sous revue. De plus, aucune carte d’embarquement n’a été fournie par l’Administrateur Gestionnaire de la SCI de la Maison du Mali pour ses différentes missions effectuées au Mali au cours de la période sous revue. Le montant total des indemnités de mission non justifiées par M. Coulibaly Drissa, au cours de la période sous revue s’élève à 23 061 500 FCFA.
Par la suite, il a payé des billets d’avion sans ordre de mission et carte d’embarquement. Pour s’assurer du respect de ces dispositions, l’équipe de vérification a examiné les pièces justificatives des dépenses de mission de la SCI Maison du Mali au cours de la période sous revue. Elle s’est également entretenue avec l’Assistante d’administration de la SCI Maison du Mali. Enfin, elle a demandé, par Mémo n°01 du 9 janvier 2024, la liste du personnel de la SCI de la Maison du Mali de la période sous revue. Elle a constaté que l’Administrateur Gestionnaire Drissa Coulibaly, a payé sur les fonds de la Maison du Mali à Abidjan, des billets d’avion sans ordre de mission et carte d’embarquement. En effet, il a payé 12 billets d’avion pour lui-même, des membres de sa famille, des personnes non membres du personnel de la SCI de la Maison du Mali et des bénéficiaires non identifiés. Les dépenses ainsi faites n’ont pas été justifiées par des ordres de mission et des cartes d’embarquement. Le montant total de cette irrégularité s’élève à 5 223 200 FCFA.
Ensuite viennent, des dépenses effectuées sur les fonds de la Maison du Mali à Abidjan mais jamais justifiées par l’Administrateur Gestionnaire de la société, M. Drissa Coulibaly. En effet, il a fourni des états de paiement de diverses dépenses de fonctionnement non supportées par des pièces justificatives pour un montant total de 8 802 400 FCFA. En outre, il a payé 1 million FCFA d’honoraires pour la revue des comptes et la mise à jour de la situation financière de la SCI Maison du Mali pour la période du 1er janvier 2019 au 30 juin 2022 alors que la SCI Maison du Mali n’a pas produit de comptes. Il a également payé des factures de prestation à des agents de la Maison du Mali sans preuve de réalisation desdites prestations ainsi que des dépenses sans facture pour un montant total de 22 743 000 FCFA. Le montant total des dépenses non justifiées s’élève à 32 545 400 FCFA.
Un scandale fumant
La gestion de la Société Civile Immobilière de la Maison du Mali à Abidjan (SCI-MMA) est comparable à celle d’une épicerie. D’où une saignée financière de plus de 581millions de FCFA (581 246 994 F) pendant les exercices 2018, 2019, 2020, 2021, 2022 et 2023 (30 novembre). Sur ce montant, environ 350 millions de nos francs sont assimilables à des détournements directs de fonds publics. Et les dénonciations faites à la Justice par le Vérificateur général donnent des déductions sur les différentes opérations de recettes réalisées par l’Administrateur Gestionnaire de la société, M. Drissa Coulibaly.
Décidément, la Maison du Mali à Abidjan a été sacrifiée sur l’autel d’intérêts égoïstes. Autrement dit, la caisse de la société a subi une saignée financière de plusieurs centaines de millions de francs CFA.
En réalité, cette mauvaise gestion est le fruit d’un système bien huilé, mis en place par les « princes » de la Maison du Mali à Abidjan.
Selon ce système, les responsables de la société veillent aux « bons soins » de leurs pots et de leur propre personne: enveloppes de fin du mois, marchés de gré à gré, bons de carburant à gogo, voyages en miniature et autres cadeaux en nature. Du moins, s’ils veulent éviter les « ennuis ».
Face à de telles pratiques qui ont occasionné un trou de plusieurs centaines de millions de francs CFA dans la caisse de la Maison du Mali à Abidjan, le Vérificateur, a transmis une dénonciation de faits au Président de la Section des Comptes de la Cour Suprême et au Procureur de la République chargé du Pôle National Economique et Financier relativement, aux irrégularités financières d’un montant de 581 millions de francs CFA (581 246 994 F).
Depuis, les responsables de la Maison du Mali à Abidjan ne dorment plus que d’un œil. Dossier à suivre !