Afin de satisfaire, tant bien que mal, les exigences du système de pourvoi des postes dans notre pays, surtout quand il s’agit de postes clés et sensibles, l’adage « l’homme qu’il faut à la place qu’il faut » a fait un bon bout de chemin au fil des dernières décennies, constituant parfois un centre d’émulation tous azimuts.
Parfois sous forme de slogan mobilisateur d’une part et pour toutes sortes de propagandes de proximité d’autre part, des politiciens de divers bords l’ont judicieusement mis sur orbite et exploité à dessein, sans jamais croire à sa portée spirituelle surtout en direction d’un grand public désemparé.
Néanmoins, dans la foulée de la recherche continue d’une bonne adéquation homme/poste, cet adage continue de défrayer la chronique, sur rajout d’une expression complémentaire utile , à savoir » le moment qu’il faut », conjoncture et mouvement accéléré des sciences et de l’économie obligent.
C’est une vérité élémentaire de dire que le Mali, pays à vocation traditionnellement culturelle, regorge, depuis fort longtemps, de compétences académiques et d’expertises avérées notamment dans le domaine du management stratégique des hommes.
Mais tout de même, il est malheureux de constater que la volonté politique qui doit sous-tendre les actions de développement, de bonne gouvernance locale ou nationale, fait défaut si elle n’est pas tout simplement travestie pour servir des intérêts purement personnels, basés sur des considérations bassement matérielles.
Et pourtant, contrairement à ce qui se passe ailleurs, le Mali, par le temps qui court, ne souffre nullement de pénurie préjudiciable d’encadrement de contact, qualifié et motivé.
Cependant, l’on note amèrement que les discours, les paroles mielleuses ne collent pas du tout avec les pratiques quotidiennes, les comportements des élus sur le terrain, surtout dans le Mali profond où ils contrastent visiblement avec les soucis permanents des populations.
C’est ainsi que depuis fort longtemps, les problèmes majeurs qui secouent l’ensemble du pays, au-delà des difficultés d’un environnement socio économique particulièrement vulnérable, persistent à cause des défaillances de gestion efficace et efficiente des forces vives disposées et disponibles.
En attente de meilleurs jours de salut commun, les populations continuent à s’interroger sur une problématique à caractère récurrent, qui plonge constamment le pays dans une longue période d’hibernation, de démotivation, de désœuvrement des travailleurs méritants, lesquels continuent, malgré tout, à faire preuve d’un haut degré de conscience professionnelle quand ils sont sollicités pour des causes justes.
Et, chaque fois qu’un responsable, à quelque niveau que ce soit, est écarté, remplacé souvent par un proche du « nouveau patron », un rival en puissance, pressé de régler des comptes en gestation , on assiste à des promotions orientées généralement sur » la tête du client », à des affectations arbitraires guidées par une volonté apparente ou réelle de règlement de problèmes de personnes, de profit à tirer opportunément dans un « partage de gâteau » prévisible.
Tout cela correspond , en fait, à une fausse préoccupation de récadrillage stratégique pour servir des intérêts inavoués, quand ce n’est pas tout simplement des » mises au frigo » parce que tel ou tel cadre doit être définitivement « dégagé » du système pour avoir grandement joui des avantages d’un poste juteux occupé, pour avoir affiché des affinités quelconques avec des anciens responsables de régimes en disgrâce, décriés à tort ou à raison.
Pour sa marche inébranlable vers son destin, le Mali nouveau a besoin de toutes les compétences nationales, reconnues et appréciées.
Certes, le tableau est encore sombre relativement à l’optimisation du capital humain, mais il le sera davantage si les véritables obstacles et freins sont objectivement mis à nu par ceux qui ont la conduite des affaires du pays.
Il est évident que les écueils qui sont un peu partout déplorés interpellent nos autorités politiques et administratives, la société civile, l’ensemble des forces vives de notre pays dans une optique de redressement et d’assainissement de la gestion des affaires nationales.
Il parait donc urgent que les maliennes et les maliens fassent violence sur eux-mêmes, qu’ils acceptent pour de bon, dans un ultime sursaut national, d’aborder la réalité de face, celle qui va permettre aux uns et aux autres de s’engager résolument dans une véritable révolution des cœurs et des esprits en vue de changer les mentalités et les modes de pensée .
Chaque citoyen appelle, de ses vœux appuyés, des changements en profondeur dans la vie et l’évolution du pays.
Les leaders actuels, tournés vers l’avenir avec une certaine expérience pratique des techniques modernes de gestion, doivent être capables d’opérer ces changements que d’autres risqueraient de nous imposer, tôt ou tard, par la force des choses.
La restauration de cercles de qualité à divers niveaux de réflexion, de décision et d’action au service de l’Etat, est à privilégier , ne serait-ce que pour promouvoir, entre autres retombées positives attendues, la formation-action, la circulation de l’information par des circuits courts et sans aucun court circuit , pour renforcer les aptitudes des cadres nationaux à relever efficacement les défis qui se posent à notre pays.
Par Chirfi Moulaye HAIDARA, Chercheur indépendant.