Alors que l’Alliance des Etats du Sahel (AES) prend de plus en plus ses distances avec la France, celle-ci n’entend pas les choses de cette oreille. Du côté de l’ancienne puissance coloniale, les tentatives de reconquête du terrain perdu se multiplient comme l’a récemment fait savoir le général François Lecointre, ancien chef d’Etat-major général des armées. Pour cet officier général français, c’est une question de survie à la fois pour la France et un grand nombre de pays européens que de recoloniser le Sahel.
Depuis l’arrivée des nouvelles autorités à la tête du Mali, du Niger et du Burkina Faso, la France n’est plus perçue comme une partenaire sûre dans cette région du continent. Les divergences de points de vue ont fini par la dénonciation de plusieurs accords de coopération militaires résultant du retrait des troupes françaises de cette partie du Sahel.
La nature ayant horreur du vide, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont décidé de se serrer les coudes à travers la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) avec comme objectif “d’établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle”.
Alors que le divorce d’avec l’ancienne puissance coloniale semble consommé et que les Etats se disent désormais souverains donc maîtres de leur destin surtout sur le plan sécuritaire, la partie française donne l’impression de voir la situation sécuritaire sous un autre plan. Cela, malgré l’assistance de nouveaux partenaires à l’image de la Russie.
Admettant que le départ des forces militaires a été douloureux à digérer, le général François Lecointre garde foi que la France remettra pied au Sahel tôt ou tard. “Je suis le premier à avoir mal à avaler ça. C’est un échec français, européen et africain qui procède principalement de ce que nous n’avons pas compris que l’action devrait être une action globale : la restauration de l’Etat, le retour de l’administration, du développement. Si on n’arrive pas à faire ça simultanément et de façon coordonnée, on va à l’échec. C’est ce qui s’est passé. Ce que j’ai du mal à avaler c’est quand on dit que c’est l’échec d’une opération militaire alors que ce n’est pas ça. Je suis persuadé que dans quelques années, nous aurons l’obligation de retourner dans l’un de ces pays africains. Ce n’est pas la Russie, le Wagner ou la Chine qui vont apporter des solutions durables aux très grandes difficultés que connaissent ces pays africains”, a-t-il déclaré auprès du média français Le Figaro.
Pour cet ancien chef d’Etat-major général des armées, c’est une question de survie pour son pays et un grand nombre d’autres pays de l’Europe que la France s’emploie à embrigader dans la guerre au Sahel.
“Ce qui est notre destin commun c’est la Méditerranéen et l’Afrique où notre destin se joue. Nous, Français, avons essayé en permanence d’entraîner les Européens dans cette prise de conscience de la nécessité d’agir collectivement en Afrique et dans la Méditerranée. Je suis désolé de voir l’échec de nos engagements au Sahel. Nous ne pouvons imaginer avoir à nos portes un continent entier en train de s’enfoncer dans la destruction des appareils de gouvernement et des Etats. On s’enfonce dans une forme de chaos et de guerre civile dans beaucoup de pays. Donc cet intérêt commun là devrait faire, un jour, que l’Europe se décidera à agir comme entité politique qui ira défendre elle-même ses intérêts y compris par le moyen de l’engagement de ses armées”.