Les recommandations finales ont fait cas d’un pourparler avec les groupes armés, une posologie proposée, il y a sept ans, par l’imam désormais en disgrâce.
Les concertations nationales, qui ont pondu des pistes à la crise multidimensionnelle, y ont intégrer un point pertinent : la gestion des mouvements armés. Plus précisément à la thématique 1 portant sur la paix, réconciliation nationale et cohésion sociale. Le point 12 de ce chapitre fait cas, en effet, de “dialogue avec tous les mouvements armés maliens”, une redite des Assises nationales de la refondation mais un schéma rendu saillant lorsque l’ancien président du Haut Conseil Islamique conduisait les bons offices dans ce sens. La mission entamée par Mahmoud Dicko, pour approcher les leaders de groupes armés de la République, était bien partie en son temps avant d’être stoppée net avec le changement de locataire à la Primature, en fin 2018. L’avènement de Soumeylou Boubeye Maiga était passé par-là alors que son prédécesseur, Abdoulaye Idrissa Maiga, avait déjà entretenu l‘Assemblée nationale d’une telle option. C’était en juin 2017. En défendant sa DPG devant les députés, deux (2) mois après sa nomination, il annonçait notamment «une mission de bons offices afin de matérialiser le retour de l’Etat ».
L’exercice de négociation avec les mouvements armés remet ainsi en scelle, en définitive, ceux-là avec qui Mahmoud Dicko avait pris langue en tant que médiateur local et Haut représentant du Gouvernement. Ce qui avait permis à l’Imam aux sorties fracassantes de tourner dans les régions de Kidal, du Delta Intérieur et de la Boucle du Niger. Sa connaissance des leaders islamistes des mouvements armés ainsi que ses liens avec Iyag Ag Ghaly avaient fortement pesé pour en faire l’interlocuteur le mieux indiqué, y compris pour le Centre où le contrôle de zones entières par Kouffa eut raison en son temps du départ de feu Boubeye de la Primature, sur fond de drames humains à Koulogo , Ogossagou, SOBANDO, etc.
Au bout du compte, l’Etat se voit pratiquement contraint à la négociation avec les mêmes leaders rebelles que Mahmoud Dicko avait côtoyés. S’il est évident qu’on ne le verra pas reprendre du service sur ce terrain, il est de notoriété publique que de 2017 à nos jours les assises qui se sont succédé ont toutes remis la question sur la table.
Dans un rapport publié, le 28 mai 2019, le think tank International Crisis Group (ICG) avait également recommandé d’entamer des négociations avec des djihadistes. Progressivement, le schéma a fait du chemin dans l’opinion, au détour de la persistance du péril sécuritaire. Pourtant, c’est bien à cause de cette recommandation pertinente voire vitale que les relations entre IBK et AIM se sont distendues. À un point tel que l’éloignement va entraîner la rupture puis la démission du RPM celui qui fut son directeur de campagne en 2013 et non moins membre fondateur du parti.
On pourrait donc dire que ce rétro-pédalage sur la question pourrait être perçu comme une évidente nécessité de tendre la main aux compatriotes égarés. Or, si la négociation avec des leaders armés comme Iyad Ag Aly ou Amadou Kouffa ( à priori vivant) avait été prise en compte depuis cette époque, le Centre ne serait probablement pas devenu le casse-tête qu’elle est de nos jours, avec de affrontements communautaires qui sont légion sur fond d’opposition Peulhs et Dogons. Et, en dépit de l’accalmie qui avait même permis à Mopti d‘y organiser une biennale culturelle, la fracture sociale persiste encore dans cette région où les paisibles populations continuent de payer un lourd tribut. Pour juguler le mal, le ministre de la réconciliation nationale se voit contraint d’ouvrir un nouveau cadre d’échanges pour prendre en compte les préoccupations des grands absents du Dialogue inter Maliens : les groupes armés qui infestent le territoire !
En définitive, le temps a fini par ressusciter l’ombre de Mahmoud Dicko qui est loin de la mère-patrie à cause de ses divergences avec les autorités de la Transition.