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Situation critique pour de nombreuses familles au Mali en cette veille de fête : Une «Tabaskrise» sans précédent !
Publié le mardi 11 juin 2024  |  Le challenger
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© aBamako.com par FS
Vente de moutons dans le cadre de l`opération Tabaski
La Vente de moutons dans le cadre de l`opération Tabaski se fait sur plusieurs places publiques à Bamako.
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A une semaine de la fête de Tabaski, critique est la situation de très nombreux chefs de famille à Bamako, qui se demandent comment faire face aux dépenses de la fête avec les poches vides, les moutons “inachetables” à cause de leurs prix exorbitants, comme tout le reste. En somme la «Tabaskrise» comme diraient nos voisins de l’ouest.

La Tabaski est une fête importante pour les musulmans. C’est un jour de prière, de communion dans la joie et surtout de festin. Mais de plus en plus et particulièrement cette année, elle est devenue un moment d’angoisse pour de nombreux chefs de famille. Non pas à cause des inévitables dépenses qu’elle occasionne habituellement, mais de la crise financière aiguë ressentie par de nombreuses couches de la population. La crise énergétique n’est pas étrangère à cette situation. Car non seulement elle rend notre quotidien difficilement supportable (chaleur, ténèbres, etc) mais aussi frappe de plein fouet le portefeuille de milliers de responsables de familles dont l’activité est tributaire de l’électricité qu’ils ne voient presque plus. Ainsi à ce jour, la plupart des personnes que nous avons interrogées se demandent comment s’offrir le mouton à immoler le jour de la fête pour sacrifier au rituel certes, mais aussi pour la consommation familiale.Non pas qu’il n’y ait pas ces ruminants sur le marché mais pour deux bonnes raisons d’abord parce que leurs prix ont excessivement augmenté et sont hors de portée des clients au faible revenu, qui constitue la majorité des acheteurs. Ensuite, parce que c’est surtout le fonds qui manque le plus, le nerf de la guerre !


Au parc de bétail de Faladiè, en Commune 6 du district de Bamako, les clients se plaignent de la cherté des moutons. A cause surtout de la chaîne des intermédiaires qui cherchent à tirer le maximum de profits.

Souleymane Guindo, un habitant de Sokorodji vient d’acheter un bélier à 80.000 FCFA. «Cette année, c’est encore plus cher. Les prix varient entre 70.000 et 200.000 selon la qualité de la bête. Avec les vendeurs, c’est abordable. Contrairement aux revendeurs qui compliquent le marché, car ils veulent gagner plus sur les moutons. Nous savons que tout est actuellement cher mais c’est encore excessif avec ces revendeurs.»

Mme Traoré est à son troisième point de vente sans succès. Les prix des moutons, explique-t-elle, dépassent ses moyens. «Je suis ici depuis le matin, presque épuisée. Je me demande si ce n’est pas parce que je suis femme. C’est vrai que nous sommes en crise, mais les vendeurs exagèrent. 75.000 à 100.000, combien de chefs de famille peuvent avoir cela, surtout que les activités sont paralysées depuis des mois, faute de courant», nous confie-t-elle en baissant la voix.

Issa Togo, originaire de Koro, dans le centre du pays, a du mal à contenir sa colère. Venu récupérer ses deux béliers envoyés du village, il explique que les commerçants de bétail exagèrent. «Ils te montrent un agneau à prix d’or. Ils avancent les difficultés du transport à partir du centre du Mali en proie à l’insécurité, aussi l’alimentation et l’entretien des bêtes. Ce qui n’est pas faux, mais cela ne pourra suffire pour expliquer le prix exorbitant. Ils veulent profiter de la situation pour se faire de l’argent, c’est tout», clame notre interlocuteur.

Salif Diarra, discute avec un vendeur au marché de bétail de Sabalibougou. «J’ai visité presque tous les marchés de la capitale. Ce sont les mêmes prix. Si ici je ne trouve pas de mouton, j’achèterai un cabri au lieu d’un agneau à un prix élevé.».

Ousmane Diakité est maçon en chômage technique. «Je suis maçon et actuellement je peux dire que je suis en chômage. Avec la crise énergétique, nos chefs de chantiers travaillent avec l’électricité et puisqu’on en trouve rarement, ils ne nous payent plus. Donc nous sommes obligés d’aller chercher ailleurs. Mais c’est peine perdue puisque tout le monde se cherche maintenant. A la veille de la fête comme ça, j’ai l’impression de devenir fou car ma famille n’a pas encore de quoi mettre le jour de la fête, à plus forte raison acheter un mouton. Imaginez-vous mon petit garçon a déjà aiguisé les couteaux avant même de voir le mouton, ce qui est déjà une pression, car je dois à tout prix amener le mouton à la maison. Nous allons prier Dieu sinon ça ne va pas du tout.»

Pour Mahamadou Kanté, les hommes font face à une chose qui dépasse leur taille. «Je ne connais pas pour les autres mais, moi, je suis dans une grande famille. Si par malheur je n’arrivais pas à avoir un mouton pour la fête, je serais montré du doigt et on me traiterait de fainéant. Avec la crise que nous connaissons, c’est très difficile d’avoir du pain à mettre sur la table à plus raison d’acheter un mouton. Moi, je fais des transactions via Orange et la majeure partie de mes clients sont soit dans l’alimentation, soit dans des grandes boutiques et tous ceux-là travaillent avec le courant. Je pense qu’il n’y aura pas de fête pour moi car si mes clients ne trouvent pas, comment moi je vais avoir à plus forte raison préparer une fête.

Modibo Coulibaly est conducteur de mototaxi. Il gère mieux la préparation de la fête. «Depuis plus de six mois, j’avais commencé à économiser de l’argent pour la fête. Alhamdoulilah, j’ai pu acheter les habits de la famille. Maintenant ça reste le mouton et je me bats pour l’avoir».

Drissa Diarra est gérant d’une boutique d’alimentation. Il évoque la situation morose sur le marché. «A cause des délestages, je fais des grosses pertes sur mes marchandises, les clients viennent de moins en moins, le chiffre d’affaires baisse. Pour ce qui est de la fête, on prie Dieu pour qu’il fasse un miracle sinon rien ne bouge. En dehors de la boutique, on essaie de taper de tous les côtés mais rien. Même pour avoir des prêts à la banque, on n’en trouve pas. La fête de cette année ne sera pas comme les autres années. Heureusement qu’en Islam, le mouton n’est pas obligatoire pour celui qui n’a pas les moyens. Donc si ça continue sur cette lancée, nous allons devoir attendre l’année prochaine ».

Les vendeurs de Moutons ont leurs arguments

Chaka Dembélé, vendeur, a fait un long trajet de plus 200 kilomètres avec les ruminants. «Je viens de Ségou, du village de Taterema plus précisément. Cette année comme d’habitude, les acheteurs se plaignent du prix des béliers sur le marché. Mais ce qu’il faut comprendre, c’est que nous aussi avons des difficultés, notamment pour le transport, au cours duquel on perd souvent des moutons. Cette année sur le trajet de mon village à Bamako, j’en ai perdu 3. Je vois maintenant un autre qui s’accroupit et a de la peine à se remettre de la fatigue. C’est un gros bélier qui n’arrive ni à manger ni à boire alors que je l’ai achetée à 250. 000 Fcfa. Son traitement avec des vétérinaires nous coûte cher : 3500 Fcfa par piqûre, jusqu’à ce qu’il se rétablisse. Tout le monde sait aussi qu’à Bamako, les aliments pour le bétail ne sont pas faciles à avoir. Par exemple, le prix du tourteau dépasse notre entendement et nos bourses. Par exemple, même en ce moment, vous voyez que les moutons n’ont rien à manger. C’est difficile. Le sac du tourteau coûte 15000 Fcfa et en seulement deux jours, c’est fini. Aussi sur le trajet, on a des difficultés aux postes de contrôle. Sinon si le tourteau baisse, certainement il y aura des impacts sur la cherté du prix du mouton.»

A en croire Lamine Fofana, éleveur de mouton «la réalité, c’est que les gens n’ont pas d’argent…..Ici nos prix varient entre 50.000 Fcfa et 300.000 Fcfa. On en a pour toutes les bourses. Et on veut que chacun puisse fêter en toute tranquillité. Mais le problème est que les gens n’ont pas d’argent. Sinon ce n’est pas par gaieté de cœur qu’on vend les béliers à certains prix. Notre souhait est que chacun puisse avoir un bon bélier pour bien fêter en famille. Il faut qu’ensemble chacun fasse un petit effort de solidarité pour que chacun tire son épingle du jeu».

Comme quoi le Mali vit à l’heure de la “Tabaskrise”.

Ousmane Tangara, Broulaye Koné et Rokia Coulibaly, stagiaires

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