Interpellés jeudi dernier (20 juin 2024) au domicile du Pr. Moustapha Dicko (premier vice-président de l’ADEMA-PASJ) des leaders politiques ont été présentés lundi dernier (24 juin 2024) au procureur du Tribunal de grande instance de la commune V avant d’être placés sous mandat de dépôt. Ils sont poursuivis pour «tentative de déstabilisation, atteinte à la sûreté de l’État et troubles à l’ordre public».
Dix (sur onze) responsables des partis, regroupements de partis et organisations de la société civile signataires de la déclaration du 31 mars 2024 ont été déférés en prison lundi dernier (24 juin 2024) Tribunal de grande instance de la commune V qui les accuse de «tentative de déstabilisation, atteinte à la sûreté de l’État et troubles à l’ordre public». Ces leaders politiques (Moustapha Dicko et Yaya Sangaré de l’Adéma PASJ ; Mamadou Traoré, président parti Union ; Moulaye Haïdara du PDES ; Abdramane Korera de l’ASMA-CFP ; Malé Camara du CNDR ; Amadou Maïga vice-président du RPM, Laya Guindo, Samaba Coulibaly…) ont donc été déférés (à l’exception de Me Mohamed Ali Bathily, relâché quelques heures après son arrestation à cause de sa fonction d’avocat) malgré la protestation et la condamnation de nombreux leaders politiques du pays qui dénoncent le «deux poids, deux mesures» des autorités en place. En effet, ils sont rappelés que les partis entièrement acquis aux dirigeants actuels du pays «se réunissent quand et où ils veulent sans être inquiétés».
«Je condamne toutes les mesures visant à intimider nos compatriotes et à étouffer toutes les initiatives autres que l’approbation aveugle et servile des actions des autorités», a déclaré la semaine dernière l’ancien Premier ministre et président d’honneur du parti Yelema (Changement), Moussa Mara. Pour ce jeune leader politique, «ces manœuvres peuvent retarder mais n’empêcheront pas le retour de notre pays dans la légalité républicaine et démocratique». Le président de la Convergence pour le développement du Mali (CODEM), Housseini Amion Guindo, a également condamné «ces pratiques d’une autre époque qui relèvent de l’intimidation et du harcèlement inadmissibles dans un État de droit. Nous exigeons leur la libération immédiate et sans condition…»
Quant au président du parti Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence (FARE-AN KA WULI), l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, il a estimé qu’il est «impératif de garantir les libertés individuelles et collectives de chaque citoyen, tels que le stipulent tous nos textes fondamentaux, y compris- la Charte et la nouvelle constitution». Il a aussi demandé aux autorités de transition de «respecter ces droits inaliénables et de favoriser la concorde et la paix sociales».
Pour de nombreux analystes politiques, cette arrestation et cet emprisonnement vont dans le sens d’une radicalisation de la transition. Et elle n’est pas de nature à faciliter la décrispation politique tant souhaitée pour permettre aux autorités actuelles d’aller à l’essentiel pour un retour rapide à l’ordre constitutionnel. Rappelons que, le 10 avril dernier, un décret pris en conseil des ministres a suspendu jusqu’à «nouvel ordre» et pour «raisons d’ordre public» les activités des partis politiques et les activités à caractère politique des associations sur toute l’étendue du territoire national. Les partis, regroupements de partis et organisations de la société civile signataires de la déclaration du 31 mars 2024 ont saisi la Cour suprême afin d’annuler ledit du décret.
Ces partis signataires de la déclaration du 31 mars 2024 contestent la prolongation de la transition au-delà de la date du 26 mars 2024, une échéance qui avait pourtant été fixée par les autorités de transition elles-mêmes.