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La médiation sociale au Mali : Atout ou handicap ?
Publié le dimanche 21 juillet 2024  |  Mali Tribune
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La médiation sociale est un processus de création et de réparation du lien social et de règlement des conflits de la vie quotidienne, dans lequel un tiers impartial et indépendant tente, à travers l’organisation d’échanges entre les personnes ou les institutions, de les aider à améliorer une relation.

Dr. Moussa Coulibaly, professeur de sociologie à l’Ecole normale supérieure (EN Sup), affirme que dépositaire d’une autorité morale en général, le médiateur social intervient très souvent à la demande d’une ou des deux parties en conflit ou par le truchement d’une entité qui décide de mettre fin à un conflit.


“Il facilite le dénouement du conflit en créant les conditions d’une résolution temporaire ou définitive d’un conflit. Par conséquent, le rôle de la médiation se met en place lorsque les possibilités d’un dialogue fécond entre les belligérants ou les parties en conflit n’existent plus. Quand les parties en conflit ne s’écoutent plus, la médiation donne une chance à un règlement du conflit de manière à dégeler les tensions en trouvant une solution dans laquelle les parties en conflit se reconnaissent”, dit-il.

Selon lui, il existe fondamentalement deux types de médiation. L’une plus ancienne existant dans nos sociétés depuis des temps immémoriaux pouvant être classée dans le rang de la médiation volontaire et l’autre médiation qui est née avec le droit moderne qui donne la possibilité aux parties en conflit la possibilité d’un règlement à l’amiable qui est la médiation judiciaire.

La loi n’interdit pas aux parties en conflit de s’entendre sur un mode de règlement qui convient à l’une et à l’autre partie en conflit. Mais la médiation sociale la plus reconnue au Mali est la piste de l’arbre à palabre. En effet le griot, ou toute personne détentrice d’une autorité morale connue et reconnue peut faire une médiation. Cette tradition est une pratique culturelle jadis en vigueur dans nos sociétés séculaires.

Quant aux principes, la médiation doit être volontaire, c’est-à-dire les deux parties doivent adhérer au principe et s’engager à reconnaître ce mode de règlement. Dans la médiation, le médiateur doit être impartial, juste et intègre. Ensuite, chaque partie doit s’engager pour le respect des conclusions, des accords intervenus à la suite de la médiation.

Depuis la Charte de Kurukanfuga, la société malienne a hérité de la médiation sociale par le rôle du griot qui est un médiateur disposant de toute la légitimité pour jouer cette fonction. Des problèmes de terres, en passant par les guerres, les conflits de succession ou de couple, le rôle du médiateur est très important dans le règlement des conflits.

Mais force est de reconnaître qu’elle doit réserver une parcelle de manœuvre à la loi moderne par exemple dans les cas d’assassinats, de meurtres ou de violences qui occasionnent des pertes en vies humaines, insiste Dr. Coulibaly.

Micro trottoir

Moro Siaka Diallo, (communicateur)

“Je trouve que la médiation sociale reste l’un des anciens instruments de notre société qui aide à résoudre de façon rapide nos mésententes, à régler nos conflits avec les autres et à limiter les conséquences nuisibles. Que cela soit dans notre vie familiale, dans nos relations d’amitié et de travail, dans notre vie de couple, la médiation sociale contribue à nous garder unis dans la paix.

Cependant, elle pose de plus en plus de problèmes dans nos communautés. Son usage de façon systématique en toutes circonstances est train d’affecter ou de freiner l’exercice normal de la justice républicaine qui fonctionne sur des principes de l’Etat de droit et des droits humains. Par exemple, dans les cas de délits, de crimes ou de violations graves des droits humains, nous ne devons pas faire recours à la médiation sociale pour les gérer. Ces cas doivent être punis selon les lois et règlements en vigueur. Pour ces cas, la médiation sociale n’est pas appropriée et son usage expose toute la société à des injustices inadmissibles et à l’impunité chronique qui aboutissent très souvent à des conflits et ou drames de masse. Oui à la médiation sociale pour des cas de mésententes ou de fautes moins graves mais non à son usage pour des délits, crimes et violations graves de droits humains”.

Ali Guindo, (enseignant)

“Le Mali est un pays de culture où les médiateurs sociaux jouent un rôle très important dans le règlement des conflits et l’apaisement des cœurs et des esprits en vue d’apporter une cohésion sociale. La médiation au Mali peut se situer au niveau de deux couches sociales. D’abord les griots détenteurs des fondements de la tradition, respectés par tous. Ils peuvent jouer un grand rôle dans la médiation. Ensuite, le cousinage à plaisanterie sur lequel est fondé la cohésion sociale au Mali. Les Dogons et les Bozos, les Dogons et les Songhays, les Dogons et les Tamasheks, les Bobos et les Peuls, les Diarra et les Traoré, etc.

Le rôle de la médiation et d’intervenir entre deux communautés ou des familles en conflit pour instaurer la paix. La médiation est un grand atout dans notre pays. Il y a quelques années au moment où personne ne pouvait se rendre à Kidal, les membres de Ginna Dogon y sont allés pour prôner la paix entre les communautés et le reste du Mali”.

Attaher Cissé, (ingénieur des sciences appliquées Bamako)

“D’abord en se référant à la définition je vais axer mon intervention essentiellement sur les atouts. La médiation sociale est une solution endogène qui utilise les liens et mécanismes internes qui régissent la vie en société pour régler les différends. C’est une solution dynamique, rapide et économique contrairement aux procès de justice. Les acteurs impliqués dans la résolution sont généralement du milieu. Ils utilisent les liens et rapports communautaires qui régissent les communautés pour gérer les problèmes ou conflits conformément aux us et costumes. La médiation est rapide et prend moins de temps qu’un procès. Elle permet de choisir des solutions partagées par les parties et non imposées et aboutir à la poursuite des bonnes relations sans qu’elles soient imposées comme en justice. Au regard de tous ses avantages, je dirai que la médiation sociale est plutôt un avantage de raffermissement des liens sociaux qu’un handicap”.

Bintou Diawara

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