Le Mali possède un énorme potentiel agricole inexploité du fait de sa diversité agroécologique… Le pays n’a pas encore atteint l’objectif du PDDAA d’une croissance annuelle de 6 % de la productivité agricole que 7 des 13 années (RESAKSS, 2018). Le manque d’investissement concret en est une raison essentielle.
Malgré des initiatives politiques comme la mise en place du Programme national d’investissement dans le secteur agricole (PNISA/2015-2025), l’Agriculture souffre au Mali de soutien politique et financier à la hauteur du potentiel existant et de l’ambition exprimée dans les discours politiques. Le PNISA est un document sectoriel du Mali à portée nationale qui a pour objectif principal de faire du secteur rural le moteur de l’économie nationale, assurant la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations urbaines et rurales et générant des emplois et des revenus significatifs dans une logique de développement durable.
Il a été doté d’un Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA) axé sur la promotion de cinq chaînes de valeur prioritaires que sont le riz, le maïs, le millet et sorgho, les pêches en eau douce et les produits de l’élevage. Le PNISA est structuré autour des axes stratégiques comme, entre autres, le renforcement des capacités des acteurs (publics, privés et organisations de la société civile participant à des activités de développement agricole) ; les investissements, notamment dans des systèmes fonciers plus sûrs, la gestion des ressources naturelles, l’irrigation et des systèmes de gestion des eaux ; les mesures visant à promouvoir la production et la compétitivité des secteurs agro-silvo-pastoraux et halieutiques ; la formation et la recherche à l’appui aux systèmes de production ; l’amélioration de la protection sociale pour répondre au problème de l’insécurité alimentaire et de la nutrition.
Il faut rappeler que le Mali consacre officiellement près de 15 % de son budget au développement agricole et rural. Et en plus des fonds publics, d’importants flux financiers sont mobilisés par les différents acteurs du secteur agricole. Mais, malgré le vaste potentiel agricole dont dispose le Mali et le volume de financement dédié à l’agriculture, la faim et la malnutrition persistent dans notre pays où, dans les centres urbains, manger à sa faim est une équation de plus en plus difficile à résoudre.
A quoi servent alors tant d’investissements ? Quels sont les goulots d’étranglement ? Comment judicieusement investir dans l’agriculture pour que ce secteur soit le tremplin de l’émergence socio-économique du pays ? Des réponses à ces questions dépendent la concrétisation du rêve de faire du Mali une puissance agricole, autosuffisante et exportatrice de produits agricoles transformés.
Moussa Bolly
Des contraintes à lever pour consolider les acquis et optimiser les perspectives
Malgré une production céréalière qui ne cesse de croître, le
Mali importe une grande partie de sa consommation et une
partie de la population est en insécurité alimentaire
Selon une étude défendue par des chercheurs maliens, il y a quelques années, il faut lever certaines contraintes majeures pour booster le secteur agricole au Mali. Ils ont par exemple recommandé d’investir dans les programmes de formation des techniciens de mécanisation. Ce qui peut se faire grâce à un dynamique partenariat public-privé. En effet, l’Etat en collaboration avec le secteur privé peut s’investir dans la formation des jeunes dans les centres d’apprentissage et de formation ruraux.
Ces formations aideront à créer un pool de jeunes qui seront de bons mécaniciens sachant utiliser et maintenir les différents équipements, y compris des équipements motorisés. Ces programmes de formation peuvent être aussi couplés à une composante «crédit» pour permettre aux jeunes sortants de s’installer à leur propre compte comme mécaniciens dans les zones où il y a une demande solvable pour leurs services.
La seconde recommandation porte sur le développement des modèles innovants de crédit à moyen terme avec les experts de la finance agricole (comme les baux d’équipements), de vulgarisation et de recherche pour permettre un meilleur accès aux équipements. Nos chercheurs ont aussi recommandé le développement des services de prestation de services de mécanisation rentables (custom hier services en anglais) qui offriront un accès aux services de mécanisation (le labour par exemple) pour ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter des équipements pour eux-mêmes et où la disponibilité de la terre est un facteur limitant.
Renforcer l’appui aux services vétérinaires (privés et publics) dans les zones où la culture attelée est importante, couplé à un programme de conditionnement (complémentation alimentaire) des animaux de trait pour l’accès aux aliments bétail avant le début de la période de labour ; promouvoir des programmes de vulgarisation (privé publique) afin de mieux rentabiliser le parc des tracteurs sont aussi, entre autres recommandations formulées dans leur étude.
Pour le rentabiliser, le parc des tracteurs peut être utilisé pour des activités autres que le labour et le transport. Par exemple aux Etats Unis dans la période de «l’essor des tracteurs», rappelle-t-on, les producteurs ont tiré profit de la force du tracteur («Power take off shift» en anglais) pour tourner beaucoup d’équipements, y compris les groupes électrogènes, comme le Mali l’a connu avec des plateformes multifonctionnelles…