La fièvre typhoïde est une infection qui touche annuellement 9 millions de personnes dont environ 110 000 cas mortels selon une estimation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2019. Elle fait partie de la famille des salmonelloses. Et le risque est élevé chez les personnes qui n’ont pas accès à l’eau potable et à des services d’assainissement suffisants. En cette période pluvieuse, le risque de contamination est assez élevé. Pour mieux comprendre cette maladie, Dr. Charles Dara, spécialiste en maladies infectieuses et tropicales à l’Hôpital du Mali, a accepté de nous édifier.
Mali Tribune : Qu’est-ce que la fièvre typhoïde et quelles en sont les causes ?
Dr. Charles Dara : La fièvre typhoïde est une toxi-infection due à un bacille appelé salmonella strictement humaine qui est contagieuse et n’entraine pas une immunisation, c’est-à-dire on peut faire cette maladie de façon répétitive chaque fois qu’on est exposé aux germes. Elle est causée par un microbe appelé salmonella typhi et sa contamination est en rapport avec une hygiène précaire, qui se propage par l’intermédiaire des aliments ou de l’eau contaminée. Une fois la bactérie ingérée, elle se multiplie et passe dans la circulation sanguine.
Mali Tribune : Comment se manifeste cette infection bactérienne et quelles sont ses voies de transmission à l’homme ?
Dr. C. D. : Cette infection se manifeste par un tableau polymorphe. En un premier temps on retrouve des signes évocateurs à type de céphalées tenaces, de vertiges, d’insomnie rebelle, de constipation opiniâtre et d’épistaxis. Une fièvre d’ascension progressive, augmentant d’un degré le matin et diminuant d’un demi-degré le soir atteignant 40° au bout de 5 à 6 jours. On peut avoir des signes moins spécifiques à type d’inconfort gastrique, une toux sèche, une asthénie.
En un second temps, le tableau clinique se manifestera par une fièvre en plateau à 40°C, une dissociation du pouls et de la température (le pouls est moins accéléré que ne le voudrait la température). Sur le plan digestif, la constipation est remplacée par une diarrhée fétide, ocre “appelée en jus de melon”, une splénomégalie inconstante (50 % des cas) est retrouvée.
L’évolution peut entraîner des troubles neurologiques et des complications chirurgicales. Les voies de transmission sont directes : par contact interhumain à travers les mains sales et indirecte : par contact avec les objets contaminés (ingestion d’eau et d’aliments contaminés d’origine animale).
Mali Tribune : Existe-t-il une différence entre la fièvre typhoïde et la paratyphoïde ?
Dr. C. D. : La différence entre la fièvre typhoïde et paratyphoïde se retrouve sur le plan bactériologique donc au laboratoire. Cliniquement ils présentent des tableaux similaires. La fièvre typhoïde et paratyphoïde sont des infections bactériennes systématiques au point de départ digestif, et les bactéries responsables appartiennent au genre salmonella enterica sérotypes typhi (qui est une bactérie qui infecte l’appareil intestinal et le sang) et paratyphoïde. En gros, ils viennent des mêmes sources et sont courantes dans de nombreux pays.
Mali Tribune : Fièvre typhoïde et paludisme, comment faire le distinguo ?
Dr. C. D. : Dans nos pays en voie de développement, il n’est pas rare de retrouver une co-infection paludisme et fièvre typhoïde. Les deux maladies sont rencontrées fréquemment dans le même espace (zone précaire).
Sur le plan médical, les deux maladies sont dues à des germes différents : le paludisme est causé par un parasite et la fièvre typhoïde par une bactérie.
Il est difficile pour un malade de faire la différence entre les deux pathologies et la meilleure façon pour faire un diagnostic est de se rendre dans un service de santé le plus proche où une analyse sanguine vous confirmera. Ce sont deux maladies différentes dont les symptômes peuvent être similaires.
Mali Tribune : Quelle est la charge nationale de morbidité de la typhoïde ?
Dr. C. D. : A ce jour, il est difficile de donner des chiffres quant à la charge de la fièvre typhoïde au Mali. Les données disponibles sont les résultats d’enquêtes ponctuelles et éparses.
Mali Tribune : Peut-on guérir définitivement de la fièvre typhoïde ?
Dr. C. D. : L’évolution normale sous traitement est la guérison. Donc nous retenons qu’une fièvre typhoïde correctement prise en charge aboutit à une guérison définitive. Mais la maladie n’étant pas immunisante, on peut se réinfecter si jamais on rentre en contact avec la bacille responsable.
Ainsi lorsqu’on est traité de la fièvre, il est important de bien suivre les mesures suivantes : prendre les antibiotiques pendant toute la durée du traitement, se laver les mains au savon et avec de l’eau après chaque sortie de toilette afin de diminuer le risque de contamination de la maladie. Pour éviter la maladie, la vaccination est recommandée surtout dans les zones d’endémie.