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Ty Cherie, présidente de Faso Baara Ton et porte-parole de fonds pour la paix au Mali : “Il est temps qu’on entende la voix de la société civile à l’ONU”
Publié le mercredi 11 septembre 2024  |  Mali Tribune
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Mme Diagouraga Tiguida dite Ty Chérie, fonctionnaire de l’Etat français, agent d’accueil à la mairie de Paris, présidente de l’association Faso Baara Ton et porte-parole du Fonds pour la paix au Mali, se bat pour le Mali, pour le retour de la paix. Avec elle, nous avons abordé les enjeux actuels du Mali et ce que son organisation compte mener comme actions. Entretien.

Mali-Tribune : Quelle lecture faites-vous des crises maliennes ?




Ty Chérie : La sécurité est la colonne vertébrale. Je suis un fanatique des porteurs d’uniforme. J’ai tout donné, mais je n’ai pas la même vision que ceux qui sont au pouvoir. Ceux qui, parmi eux ont des visions, n’ont pas le pouvoir.

Dans la lutte contre l’insécurité, on ne peut pas exclure le peuple. Dans le cas du Mali, c’est comme les trois piliers de la cuisine : la population, l’armée et les dozo. Il faut une collaboration entre ces trois piliers. Il faut que l’Etat collabore avec la population.

Le Mali fait 1 240 000 km2. Il n’est pas facile à sécuriser. On a la chance que les dozo nous aident. On a vu dans l’inter-fleuve comment les dozo ont tenu. Maintenant, avec leur désarmement, presque tous les villages ont signé des accords avec les terroristes. Pis, le fléau des videomans. Certains vont jusqu’à dire, “voici le nombre de militaires qui ont pris la route pour telle localité”…

La Transition ne veut pas de mon aide, sinon moi je soutiens la Transition. Et si tu soutiens, si tu aimes quelqu’un, tu lui dis la vérité. C’est ce que je fais. En matière de diplomatie, les terroristes nous dépassent. Ils sont présents partout et surtout savent utiliser les créneaux.

J’avais fait des propositions par rapport à l’Office du Niger. Avec le système instauré par la Transition, Choguel même a parlé de trafic d’or, il est difficile de s’en sortir. L’injustice, n’en parlons pas ! Vous avez vu le cas des engrais qui n’en étaient pas ! Rien n’a été fait, malgré que les fournisseurs sont connus.

Mali-Tribune : Vous avez une organisation de la société civile, le Front pour la paix. Quels sont vos objectifs ?

Ty Chérie : Je suis très triste pour ce beau pays Maliba qui était un exemple dans le monde à l’époque de Modibo Kéita. Le Mali était premier dans tous les domaines. Nous étions les premiers à avoir une compagnie aérienne “Air Mali”. C’était nos enseignants qui étaient délégués pour donner des cours dans d’autres régions. Depuis le départ de Modibo Kéita, on a tout détruit jour après jour.

Sous le président Moussa Traoré, il y avait un peu de sécurité. Avec Alpha Oumar Konaré également. Mais, aujourd’hui, nous nous sommes retrouvés dans une situation cancérisée. On a l’insécurité totale partout. Nous avions formulé des propositions par voie de courrier au président Assimi sur comment lutter contre la crise alimentaire.

Malheureusement, nos propositions sont restées lettres mortes. Depuis des années on se bat pour avoir des dirigeants capables, valables mais malheureusement on tombe toujours sur des gens qui veulent se servir et non servir la nation. Ils ne manquent pas de propositions.

Avec le fleuve Niger au Mali, nous pouvons nourrir toutes la Cédéao. C’est inadmissible que le peuple malien n’ait pas à manger.

Mali-Tribune : Qu’est-ce que le Front a mené comme actions jusqu’ici ?

Ty Chérie : Comme nos slogans disent non “Front pour la paix au Mali” : “Non à la guerre, Place à la paix, Non à l’internationalisation de la crise malienne”. Nous sommes dans une guerre géopolitique et la guerre au Mali a pris une autre tournure, une autre forme. Le conflit inter Maliens s’est transformé en une crise internationale. Partout où il y’a la Russie, les États-Unis ne sont pas loin et vice-versa.

Exemple, le Soudan. L’année dernière, on a vu l’Ukraine au Soudan contre les intérêts Russes. On voit la même chose au Mali. L’Ukraine a affirmé avoir soutenu nos rebelles lors de la bataille du 27 juillet 2024. L’Ukraine a promis de combattre les intérêts russes partout dans le monde. Pour nous éviter le schéma de l’Afghanistan, du Soudan ou de la Lybie, pour protéger nos FAMa, protéger l’ensemble des garants de notre sécurité, sensibiliser les dozo et la population, nous on dit stop.

La guerre ne résout pas tous les problèmes. La guerre n’est pas la solution. En Afghanistan, après des années de guerre, avec des moyens colossaux, la Russie, aujourd’hui notre partenaire principal, a fini par quitter avec une troupe estimée à 150 000 hommes. L’Otan, avec à sa tête les Etats-Unis avec 130 000 hommes, a échoué. C’est pour dire que le tout militaire n’est pas la bonne option.

Mali-Tribune : Vous avez écrit aux autorités. Quels retours avez-vous obtenu d’elles ?

Ty Chérie : Je commence par les déficits de communication. Cela fait 4 ans qu’on a dénoncé qu’on remplace les vrais journalistes, les vrais acteurs, les spécialistes en communication, ceux qui connaissent l’enjeu savent quoi dire, quoi faire, parce que chaque mot compte. Nous sommes en guerre. On a substitué des vidéomans aux communicateurs.

Nous avons dénoncé cet état de fait pendant 4 ans. Il y a 10 mois, on a publié dans les journaux une sorte de lettre à Assimi pour dénoncer cela en donnant les conséquences pour le Mali en matière de diplomatie, de crédibilité.

Aujourd’hui, il y a trois terrorismes : économique, de guerre et un terrorisme en matière de communication. Nous avons adressé un courrier au président de la Transition pour demander la fin de la guerre et appeler au dialogue. Le courrier a été publié le 8 août dans le journal La Lettre du Peuple. Le 12 août, il y a le journal 22-Septembre qui a publié. Malheureusement, nous n’avons pas été écoutés.

La conséquence a été la montée de l’Algérie au créneau au niveau des Nations unies. Si Assimi nous avait écouté, il n’y allait pas avoir affrontements entre le Mali et l’Algérie.

Mali-Tribune : Pourquoi voulez-vous partir aux Nations unies pour vous expliquer ?

Ty Chérie : Nous allons aux Nations unies pour représenter la société civile, faire entendre notre version. La semaine passée, il y a eu une rencontre aux Nations unies. Le représentant permanent du Mali au Nations unis a défendu plus la Russie que le Mali.

Après, il y a Chérif Koné, qui doit passer à l’ONU pour s’exprimer. Nous, en tant que société civile, souhaitons aussi nous exprimer à l’ONU, nous faire entendre. Le monde entier doit nous entendre, pour qu’on rétablisse la vérité sur l’armée malienne que des médias étrangers veulent salir.

J’ai suivi “Sky News”, un média social suivi par 24 millions d’abonnés qui ne fait que mal parler de l’armée malienne. L’armée malienne a une très mauvaise image dans le monde entier. Si on a la chance d’être à l’ONU, on profitera pour rendre hommage à cette armée républicaine. L’armée malienne a une histoire.

Je me rappelle au temps d’IBK, les militaires quittaient le front malade sans avoir les soins d’urgence. Mais avec tout ça, ils ont tenu au front. Leurs parents ignoraient carrément leur décès. Leurs camarades au front n’ont jamais abandonné malgré ces difficultés. Ils ont fait face à l’ennemi pour que le Mali reste debout. Je profiterai pour rendre hommage aussi aux dozo et expliquer exactement la situation du Mali, ce que le peuple malien pense, ce qu’on ressent et qu’est-ce qu’on propose comme solution devant l’ONU.

Il est temps qu’on entende la voix de la société civile. Il est temps que l’ensemble du peuple malien se mobilise, qu’on cherche des médias internationaux et nationaux qu’on parle de la bravoure de l’armée malienne pour qu’on puisse laver leur honneur et leur dignité. On veut aller pour dire que nous ne sommes pas d’accord avec tout ce qui passe au Mali.

Mali-Tribune : Pensez-vous que les autorités seront d’accord avec vos idées ?

Ty Chérie : Peut-être qu’on ne vous a pas dit que je suis têtue et que je ne suis pas manipulable (rire !) Là, les autorités n’ont pas leur mot à dire. C’est une question civile entre nous civils. Ils n’ont pas leur mot à dire. Pendant 4 ans, on a fait des propositions, on ne nous a pas écoutés.

Propos recueillis par

Alexis Kalambry

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