26 dénonciations faites à la Justices portant sur un montant de 20, 51 milliards FCFA. Pour chaque dénonciation faite au Procureur, le Vérificateur Général invoque l’article 16 de la loi 03-030 l’instituant (cette loi a été abrogée et remplacée par la loi 2012-009 du 08 février 2012) qui indique que lors d’une vérification, il peut saisir directement le Procureur de la République chargé du Pôle économique et financier ou le Juge de paix à compétence étendue dès lors qu’il est en présence de faits susceptibles d’infractions à la loi pénale. A cet effet, la loi ne lui demande pas de transmettre un rapport entier de vérification à la Justice mais juste les faits infractionnels et les preuves qui les appuient.
Toutefois, il faut noter que d’autres structures avaient l’habitude de transmettre des rapports du Bureau du Vérificateur général (BVG) à la justice sans faire de distinction entre les cas de fraude et ceux relatifs à la mauvaise gestion. Il s’agit notamment de la Casca (Cellule d’appui aux services de contrôle de l’administration). Dans le cas de la mauvaise gestion, le BVG formule des recommandations de remboursement ou de recouvrement mais transmet au Procureur uniquement les actes susceptibles de fraudes pour permettre à la Justice d’aller à l’essentiel et circonscrire son travail par les limites fixées par la loi.
La capacité de saisine de la Justice par le Vérificateur Général est une innovation unique dans le dispositif malien de contrôle administratif des finances publiques. Cette particularité est considérée comme une valeur ajoutée considérable pour la promotion d’une meilleure gouvernance, et c’est pour cette raison que le BVG en a fait un sacerdoce.
Notons qu’en 2008, dans un document officiel du Cgsp (Contrôle général des services publics) intitulé «évaluation de la mise en œuvre des recommandations issues du rapport annuel 2006 du Vérificateur Général», la partie 4.1.3 intitulée ‘’Situation des manques à gagner’’, il est écrit : «l’analyse du tableau a permis de constater que sur une incidence financière totale de 102 655 170 675 F Cfa d’irrégularités constatées, les structures ont reconnu 32 024 951 340 FCFA. Les montants régularisés et ou justifiés se chiffrent à 26 855 325 425 F Cfa». Dans la partie 4.1.4 Situation des Irrégularités ayant fait l’objet de poursuites judicaires, le document précise : «Il ressort de ce tableau que 14 dossiers ont été transmis à la justice pour un montant total de 31 400 967 152 F Cfa dont 21 702 735 390 ont été régularisés ou justifiés».
Le BVG n’a pas été associé à ces différents calculs et ne comprend pas la signification des termes régularisés ou justifiées. La justice du haut de sa souveraineté n’informe pas le BVG de la suite donnée aux différentes dénonciations. Elle en informe néanmoins la Direction du Contentieux de l’Etat.
En vue de faciliter le traitement par la Justice des dossiers transmis, l’entame du second mandat de Vérificateur général a été consacrée à l’amélioration de la collaboration entre le BVG et l’autorité judicaire. A cette fin, de nouvelles plateformes d’échanges ont été organisées. De plus, la création et le fonctionnement d’une Cellule Juridique animée par un Vérificateur-Magistrat s’inscrit dans cet objectif. Ainsi, en 2013, 8 dossiers de dénonciation ont été officiellement transmis au Procureur en charge du pôle économique de Bamako en présence de la Directrice du Contentieux général de l’Etat et du Procureur général de la république. Ces dossiers portent sur 7 vérifications effectuées en 2011 et une vérification effectuée en 2012, pour un montant total de près de 8 milliards de F Cfa, compromis du fait de la fraude. Pour renforcer ces dénonciations, des dossiers complets ont été montés comprenant des notes explicatives, notes de synthèses, courrier formel de dénonciation et des copies des rapports sectoriels ainsi que les preuves concrètes qui les soutiennent.
Sans influencer le travail de la justice, le Vgal dira que le temps de la justice n’est pas celui de l’opinion nationale qui, elle, est impatiente ; le but visé étant de fournir le maximum de preuves à la justice pour démontrer que les sommes en jeu ne sont point des affirmations gratuites.
Certains faits dénoncés par le Vérificateur général à la Justice ont conduit à des peines d’emprisonnement et des remboursements de sommes frauduleusement soustraites à l’Etat. Il s’agit notamment du cas de la vérification financière effectuée en 2005 auprès de l’Office du Niger (Ségou). D’autres dossiers transmis ont été classés sans suite par la Justice. Les raisons qui justifient leur classement sans suite reste du ressort exclusif de la justice, et le BVG n’entend point passer outre.
Enfin, il est à noter que la saisine de la justice par le Vgal est réelle, effective et scientifiquement élaborée par ses soins. Elle occupe une place de 1er plan dans ses réalisations car la réussite des missions que la loi lui assigne est à ce prix là. Le sacro saint principe de la séparation des pouvoirs, pilier de tout Etat de droit, oblige le BVG à arrêter ses travaux là où commencent ceux de la justice.
En définitive notons qu’au total 26 dénonciations ont été faites à la Justice, portant sur un montant total de 20, 51 milliards F Cfa.