L’affaire fait aujourd’hui grand bruit à Bamako. Disparu mystérieusement, Mamadou Nimaga, 42 ans, marié à deux femmes toutes enceintes, père de huit enfants, a été retrouvé mort mardi dernier à Mountougoula, non loin de Bamako. Son corps était emballé dans un sac de plastique noir, attaché d’une corde et ne portant qu’une chemise tachée de sang. S’agissait-il d’une exécution ? Que s’est-il passé ?
Mardi dernier, jour de Tabaski, la famille Nimaga n’avait pas le cœur à la fête. Le corps d’un membre de cette famille, Mamadou Nimaga, a été retrouvé mutilé aux alentours de Mountougoula, dans la périphérie bamakoise. Ce vendeur de pièces détachées qui venait à peine de rentrer précipitamment d’un voyage d’affaires en Chine a été découvert, emballé dans un sac en plastique noir, attaché d’une corde et ne portant qu’une chemise tachée de sang. Il était sans pantalon.
Pourquoi un jeune commerçant apparemment sans problème a-t-il connu un tel sort ? Qui l’a tué et pourquoi? Est-ce une exécution, un crime crapuleux ou un règlement de comptes ? Ces questions, entre autres, sont aujourd’hui en cours de traitement au niveau du camp I de la gendarmerie de Bamako. Les parents de la victime, avec en tête le célèbre Nimaga N°1 qui se trouve être son homonyme, ont en effet porté plainte contre X. Des interpellations ont déjà eu lieu notamment celles d’un Inspecteur de police et d’un ferrailleur.
Les Faits
Tout commence le dimanche 13 octobre 2013, quand, après un séjour en Chine, le jeune Mamadou Nimaga prend son véhicule de marque Mercedes C220 pour rendre visite à son frère malade hospitalisé à l’hôpital Gabriel Touré. Comme d’habitude, en sortant de chez lui à Sogoniko, il prend ses deux téléphones portables. Curieusement, il ne reviendra plus jamais à la maison, laissant ainsi dans une inquiétude totale toute sa famille (ses deux femmes et 8 enfants) ainsi que ses parents. Ses deux téléphones ne répondent plus. C’est donc la mort dans l’âme que des recherches et des déclarations sont entreprises tant dans les hôpitaux que dans les brigades de gendarmerie et commissariats de police de Bamako.
Après 24 heures de recherche, un inspecteur de police du 13e Arrondissement et une femme retrouvés au volant de sa voiture.
N’ayant pas eu gain de cause à Bamako en termes d’information, la grande famille Nimaga étend ainsi ses recherches vers la ville de Fana et ses localités environnantes. C’est ainsi qu’au poste de police de Nyamana, ils apercevront le véhicule Mercédès C220 de leur frère disparu Mamadou Nimaga. Mais la voiture est conduite par un homme en civil accompagné d’une femme. Cet homme en civil se révèle être un Inspecteur de police du 13e Arrondissement, de la promotion de 1981.
Pourquoi le véhicule Mercedes C220 de la victime a été abandonné à côté d’un ferrailleur à Nyamana, pendant deux jours sans que sa présence soit signalée ?
De source policière, c’est une tierce personne qui est venue signaler la présence d’un véhicule suspect au niveau du poste de police de N’tabacoro. L’inspecteur de police Mariko qui travaille au dit poste est chargé par son chef hiérarchique de se rendre sur place pour constater les faits et ensuite enlever le véhicule. Toujours selon nos sources, en cours de route, il voit sa femme et l’embarque. Mais après, il croise les parents du disparu, qui le conduisent à la gendarmerie.
A en croire un responsable syndical de la police, l’Inspecteur Mariko a fait preuve d’une naïveté exemplaire car il devait se rendre directement au commissariat du 13e Arrondissement pour déposer le véhicule. Une faute professionnelle qu’il paye aujourd’hui parce qu’étant depuis lors interpellé pour des raisons d’enquête.
Le véhicule est retrouvé mais il n’y a toujours pas trace de son propriétaire.
Le corps mutilé dans les buissons de Mountougoula
Ce n’est que quelques jours plus tard que son corps est retrouvé. Selon nos informations sur place même à Mountougoula, le corps de Mamadou Nimaga a été découvert le mardi dernier aux environs de 15 heures par un passant du nom de Karim Ouattara. Le sieur Karim Ouattara, gardien de son état, accompagné par son chien, partait chez Seydou Saye, lui aussi gardien d’un champ proche, pour lui souhaiter les vœux de bonne fête. C’est au cours du trajet que le chien de Karim fit irruption dans un buisson à quelques mètres de la piste où se trouvait le corps en décomposition emballé d’un plastique noir. Le gardien tout stupéfait se rend de plus près pour mieux savoir de quoi il s’agissait. Pris de panique, Karim appelle Seydou Saye et lui demande de venir voir avec lui ce qui était là.
Les deux gardiens font appel sur le champ, par téléphone, à Oumar Diarra, frère du maire de ladite localité, lui aussi informe à son tour le maire Daouda Diarra. Du coup l’autorité communale saisit la brigade de la gendarmerie de Banguineda qui dépêche certains de ses éléments pour le constat. Le corps enveloppé dans le plastique noir était couvert de mouches, personne n’osait s’approcher jusqu’à l’arrivée des gendarmes, d’un médecin travaillant à Mountougoula et la présence du maire.
Selon Karim Ouattara qui a fait cette macabre découverte, un tel acte ne s’était jamais produit dans la zone. « Nous travaillons ici depuis 2006 et nous avons mis en place un système de surveillance dans tout le secteur, 24 heures sur 24. Si ce cadavre passait la nuit en cet endroit, les chiens et d’autres bêtes allaient dévorer le corps. Personne ne pouvait rester indifférent devant cette scène odieuse. Par humanisme, nous avons coopéré avec les autorités dans leur fonction. Pour nous, c’est incroyable que de telle chose se produise ici. Le corps de la victime était attaché d’une corde, il ne portait qu’une chemise tachetée de sang et sans pantalon. Notre interlocuteur nous dira que c’est sur instruction des autorités présentes qu’a eu lieu l’inhumation du corps sans autopsie par une dizaine d’hommes qui se trouvaient sur le lieu.
Nos familles sont restées meurtries et terrifiées par la découverte de ce cadavre dans leur périphérie. Le CB de la gendarmerie a lancé un communiqué par voie radio de la découverte d’un corps d’homme sans vie dans son secteur. La famille Nimaga ayant appris l’écho de cette nouvelle s’est rendue sur le lieu pour vérifier s’il ne s’agissait pas de leur frère disparu. A leur arrivée, la déception fut grande car il s’agissait bien de leur frère disparu il y a quelques jours. Sur exigence de la famille du défunt, le corps a été exhumé et transporté à la morgue de l’hôpital Gabriel Touré pour autopsie.