Le gouvernement, formé, mercredi 27 novembre, après le limogeage de Choguel Kokalla Maïga, écarte de la gestion du pays la branche politique dont l’œuvre a été parachevée le 19 août 2020 par les militaires du Conseil national pour le salut du peuple (CNSP).
La nomination du général de division, Abdoulaye Maïga, en qualité de Premier ministre, met définitivement fin à la cohabitation entre les acteurs du coup d’État du 19 août 2020 contre le président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). La nouvelle équipe gouvernementale ne reflète que l’aspiration des militaires à s’accaparer de tous les leviers du pays.Insolite. La formation du gouvernement du 27 novembre lève un coin de voile sur les intentions réelles des militaires, autres acteurs de la chute du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) le 19 août 2020.
Ils viennent de s’accaparer de tous les leviers politico- économiques du pays avec la formation d’une nouvelle équipe gouvernementale dirigée par un général de division. Cette militarisation du gouvernement intervient après celle de l’administration publique (gouverneurs, préfets, sous-préfets), les directions nationales. Elle met définitivement fin à la cohabitation instaurée depuis le départ d’IBK de Koulouba.
L’éviction de la branche politique du soulèvement populaire contre le régime du président Keïta laisse le champ libre aux militaires d’être les seuls maîtres à bord du bateau de la transition. Alors qu’il était convenu d’une transition civile pour conduire le pays à une vie constitutionnelle normale.«Si ce n’est pas toi… C’est donc quelqu’un des tiens…».
Ce passage d’une des fables de Jean de La Fontaine sied bien à la situation politique de notre pays. Et le nouveau gouvernement n’est que le reflet de cela. Cette caporalisation du pays, surtout pour une transition dont la principale mission est de rassembler les Maliens pour qu’ils relèvent les défis auxquels ils font face depuis la mise sous tutelle de leur pays en 2012 par des puissances impérialistes, est inédite dans l’histoire politique récente de notre pays. Depuis le coup d’État du 26 mars 1991 à celui de 2020, en passant par celui de mars 2012, les politiques et les militaires ont conduit les transitions avec des fortunes diverses. Mais, celle en cours vient de marquer un pas décisif en s’accaparant tout, abandonnant en plein vol l’aile politique. Et cela ne se fait pas sans dégâts !
En 1991 comme en 2012, la gestion du pays n’a pas été solitaire. Militaires et civils se sont donné la main dans un gouvernement dit d’union nationale pour diriger le pays. Cette gestion, même si souvent, elle a été parsemée d’embûches, a eu le mérite de baisser les tensions politiques entre les acteurs desdites transitions.
Et cela au grand bonheur du peuple malien. Chaque partie a joué sa partition pour que le pays s’en sorte mieux, en nouant et en renforçant les relations avec d’autres pays. Elles ont même travaillé de sorte que les prix des produits de première nécessité baissent pour soulager les chefs de famille, en proie à d’énormes difficultés financières. Le contraire de celle en cours qui continue de demander au peuple malien de serrer la ceinture.
Ainsi, la nomination du général de division, Abdoulaye Maïga, à la tête du gouvernement, boucle le cycle du verrouillage de la militarisation des institutions de la République. Elle met définitivement fin à la cohabitation avec les acteurs civils, dont ils ont parachevé l’œuvre. Après l’achèvement, c’est l’heure de l’accaparement du rôle des civils dans la transition. Maintenant, ils ont le pouvoir politique et militaire. Et le pays respire à leur volonté. Les militaires ont parachevé et accaparé tout après avoir mis les civils à la porte du pouvoir.Cela n’est pas une surprise.
Depuis qu’ils ont mis fin de façon musclée à la présidence de Bah N’Daou et de son Premier ministre Moctar Ouane, il fallait un jour s’attendre au limogeage de Choguel Kokalla Maïga de la primature pour que les militaires se donnent les pleins pouvoirs. Voilà les pleins pouvoirs entre leurs mains. Mais, la montagne a déjà accouché d’une souris. Le gouvernement n’est ni technocrate ni politique.
Difficile dans ces conditions que le pays bouge. Nous continuerons avec le même surplace depuis la formation du premier gouvernement en 2020, toujours en demandant la résilience au peuple désemparé par une gestion opaque de certains dossiers brûlants de la Nation.Le Mali, à cette phase de son histoire, n’a pas besoin de pilotage à vue encore moins d’une crise politique.
Pour ce faire, l’ouverture est nécessaire pour des hommes animés d’une volonté et d’une vison pour le Mali.