Dans son histoire le Mali a connu quatre coups d'Etat et seulement deux transitions au véritable sens du terme.
La première vraie transition est celle de 1991 qui malgré qu'elle consacrait une véritable révolution politique et institutionnelle par l'avènement de la Démocratie et du multipartisme, n'a duré que quatorze mois et a accompli trois tâches principales : la signature du pacte national, la conférence nationale qui a permis d’écrire une nouvelle Constitution et l'organisation des scrutins référendaire, présidentiel et législatif.
La seconde vraie transition est celle de 2012, certes très mouvementée qui a duré dix-huit mois et s'est consacrée à la reconquête du territoire avec l'aide de l'armée française, la signature de l'accord intérimaire de paix de Ouagadougou avec les séparatistes Touaregs et l'organisation de l'élection présidentielle pour un retour à l'ordre constitutionnel.
En 1968, le retour à l'ordre constitutionnel s'est effectué en 1979 avec l'élection du chef de la junte militaire comme Président de la République onze ans après le coup d'Etat.
En décembre 2024 comme un air de déjà vu, le retour à l'ordre constitutionnel n'est pas encore la première des priorités cinq années bientôt après le coup d'Etat, ce qui chez nous correspond à un mandat présidentiel, une durée de transition qui de surcroît n'est soutenue ou justifiée par aucun texte ou accord politique.
En effet, le 27 novembre 2024 le Président de la transition au cours du premier conseil des ministres a déroulé la feuille de route du nouveau gouvernement et fixé huit actions prioritaires dont la dernière est la préparation d'élections crédibles et transparentes contrairement à 1991 et 2012 où la préparation des élections a toujours figuré parmi les deux premières priorités avec la sécurité.
Cette relégation de l'organisation des élections donc du retour à l'ordre constitutionnel au dernier rang des priorités, nous interroge et nous interpelle sur les réelles intentions des militaires qui assument désormais les pleins pouvoirs (Présidence, Primature et CNT) depuis le limogeage du premier ministre civil le 20 novembre 2024.
Ce déclassement nous interpelle d'autant plus qu'il n'est fait allusion à aucune ébauche de calendrier au cours de ce conseil des ministres. Contrairement à certains qui se sont enthousiasmés à la seule évocation de l'organisation des élections par le chef de la transition, nous sommes quant à nous demeurés sur notre faim car en la matière " il y a loin de la coupe aux lèvres ! " comme on le dit couramment et la simple annonce de la préparation des élections sans calendrier ni échéances ne saurait nullement être un gage de retour rapide à l'ordre constitutionnel !
Nous restons dubitatifs pour ne pas dire plus et attendons de voir !
Une chose est sûre cependant, pour le retour à l'ordre constitutionnel nous sommes de plus en plus proches du scénario de 1979 que de celui de 1992 ou de 2013 !