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Mali: Tombouctou, si je t’oublie...
Publié le mercredi 4 juillet 2012   |  Frat Mat


Des
© Getty Images par DR
Des militants Islamistes détruisant un lieu saint antique dans Timbuktu le 1 juillet 2012.


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Entre la rage impuissante, la douleur vive, le chagrin et la pitié, l’on ne sait quel
sentiment l’emporte face à la tragédie qui s’abat sur ce pays et menace toute l’Afrique de l’ouest.

On a vue de la destruction des mausolées de tombouctou coagule tous ses sentiments.
La condamnation unanime de ces actes inqualifiables ne doit pas masquer leur parfaite
rationalité. Croire que ces gens agissent par inadvertance ou au hasard, est une erreur d’appréciation. Il s’agit d’une guerre psychologique qui obtient ses résultats escomptés : la sidération qui annihile les velléités antagonistes, une exorbitante plus-value médiatique, la remobilisation des troupes soumises à d’autres tentations. En fait, tout cela s’inscrit
dans une logique implacable. Il faut savoir que l’Islam continue d’être travaillé par divers courants qui produisent une fracture entre une tendance exotérique qui se dit pure et une autre ésotérique, persuadée qu’elle seule est à même de créer l’harmonie du monde.
Cette lutte est une forme de guerre asymétrique, puisque la première tendance, martiale et triviale, use de la force brute, tandis que l’autre fait appel, certes, à l’énergie humaine, mais s’en remet surtout à la force de l’esprit. Dans ces conditions, peu importe les labels de ces groupes franchisés qui pullulent dans tous les pays d’Afrique de l’ouest, tous s’intègrent peu ou prou à une tendance de cette idéologie extrême qui croit réaliser une régénération spirituelle en s’attaquant aux symboles d’un islam qui revendique sa spécificité sans céder pourtant un pouce au plan doctrinal. Cet islam-là, du Maroc à Durban en passant par Abidjan et Dakar, a su préserver certaines pratiques tolérantes qui agacent, - le mot est faible -, ceux qui veulent embarquer le continent en tant que supplétif dans une guerre contre l’occident. Peu importe, au fond, que certains versent des larmes de crocodile sur les mausolées, il n’est pas nécessaire non plus d’exiger un brevet de sincérité à tous ceux qui, tout en se disant solidaires, se gaussent de ces musulmans qui guerroient entre eux. Quelle naïveté ! Nous sommes dans un monde d’une complexité que même la théorie du chaos ne peut plus appréhender. Si la richesse, elle, ne parvient pas à être globalisée, les malheurs, eux, le sont depuis des décennies. De tout cela émerge une évidence: ce monde vous oblige à être responsable même de vos ennemis. C’est d’ailleurs pour, entre autres, ces raisons que des gens de bonne volonté font de l’encadrement de la jeunesse musulmane si composite un véritable enjeu, tout comme de son intégration au système national une priorité. Comment empêcher que celle-ci se jette à la remorque de n’importe quelle caravane cherchant aventure, si aucune alternative ne lui est proposée? Des efforts restent à réaliser. Cela passe par une analyse fine des attentes que ne reflètent pas toujours les agitations de quelques représentants d’une bureaucratie islamique déconnectée des réalités de sa jeunesse, mais jouant habilement les courtiers rétribués auprès des pouvoirs publics qui s’accommodent d’eux, mais n’ont pas d’illusions excessives à leur égard. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, ceux qui perpètrent ces forfaits inouïs à tombouctou ont perdu la partie. Si rien ne leur a paru aussi urgent que ces destructions apparentes, c’est qu’ils reconnaissent la force spirituelle des saints qui ont contribué à faire de ces villes les toutes premières universités du monde. rien ne peut effacer cela. Ces saints ont fait la preuve de la vérité par la vérité. Ni donc, les préparatifs de la contre-offensive qui se prépare contre les “islamistes” qui croient d’ailleurs la conjurer en s’attribuant une puissance de feu exagérée, ni l’impasse politique de leur projet qui, au demeurant, se limite à faire de cette zone un prurit, ne semblent avoir distraits ceux-ci du furieux empressement à détruire. Mais, plus paradoxal encore, ils viennent de mieux faire connaître au monde entier l’existence de ces pôles spirituels entrecroisés, en réalité, indestructibles. L’on verra bientôt qu’ils parviendront, sans le vouloir ni pouvoir l’empêcher, à provoquer une plus grande quête spirituelle dans ces régions et bien au-delà. Certes, ils auront réussi à troubler quelques consciences, mais l’immense majorité des jeunes trouvera une noble cause, à n’en point douter. Et, pendant que ces jeunes prendront toute leur part à une des dimensions de cette guerre, d’autres, au Mali et ailleurs, intensifieront la résistance spirituelle sur les multiples autres dimensions. De la patience, il en faudra : une bataille pour l’ipséité a ses exigences. Mais l’issue de cette bataille ne fait aucun doute. Le grand souffle éternel emportera l’armée hétéroclite de ceux qui ont, dans une main, des feuillets sacrés et dans l’autre, des contrats de mercenaires qui accourent vers tous les orages en déclamant de sombres oraisons jaculatoires et s’exaltent en ricanant dans les plus terribles tragédies. Non, elle ne fait aucun doute l’issue de cette bataille qui culmine à la veille du mois de ramadan.

EL HADJ IBRAHIM SY SAVANÉ
*Ancien ministre de la
Communication. Il s’exprime, ici,
à titre personnel.

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