La réponse est logiquement affirmative. L’Imam Mahmoud Dicko récent certainement un profond regret d’avoir été l’un des principaux artisans de la chute d’IBK et son régime. Mais qui l’aurait cru, il y a cinq ans ? Notamment lorsque des méga meetings étaient organisés par le M5-RFP, dont son mouvement politico-religieux (la Coordination des mouvements, associations et Sympathisants (CMAS) de Mahmoud Dicko) était une principale composante. Alors que lui-même jouait le rôle d’ « Autorité Morale » de la contestation qui a œuvré à renverser le régime du « Mandé Mansa ».
En 2020, la place de l’Indépendance de la capitale malienne était régulièrement prise d’assaut chaque vendredi, pour davantage mobiliser et préparer la population à mener la lutte pour le renversement du régime d’Ibrahim Boubacar KEITA (IBK). En cette période, l’IMAM était pleinement devenu un incontournable acteur du jeu politique national, loin de la sphère de sa mosquée et de la théologie musulmane. A cette époque, il bénéficiait de tous les qualificatifs de la part des nombreux manifestants. Dont certains, ses fans, lui ont attribué le qualificatif de ” l’ÉCLAIRÉ, LE TRÈS RESPECTÉ ET LE SAGE”.
Lors de ces contestations, l’Imam Dicko aura tout dit pour humilier et affaiblir le président Ibrahima Boubacar KEITA. Et finalement son mouvement de contestation eut gain de cause, car celui-ci perdit le pouvoir. Mais hélas, une donne très importante avait échappé à l’ex « Autorité Morale » et à tous ceux qui combattaient IBK et son régime : l’intervention des militaires pour s’accaparer du pouvoir d’Etat pour le conserver. Cela, au-dépens du M5-RFP et des membres de son Comité Stratégique.
Oui, l’hypothèse de l’irruption des militaires sur la scène politique n’aurait pas été envisagée par les acteurs politiques de la contestation. Même si elle avait été envisagée, certainement pas la conservation du pouvoir. D’ailleurs, ils étaient rarissimes, les analystes et observateurs qui auraient fait des réflexions et analyses dans ce sens.
Depuis la chute du régime d’Ibrahim Boubacar KEITA et l’arrivée de l’armée au pouvoir, les principaux auteurs politiques et sociaux, à l’origine des grands meetings organisés au boulevard de l’indépendance, ont été écartés de l’exercice du pouvoir. Certains sont toujours en prison. Les acteurs des partis politiques classiques, à quelque exception près, ne sont plus audibles, ni visibles sur la scène politique. Ce sont désormais les mouvements de propagande politique, présumés proches du pouvoir transitionnel, qui ont pignon sur rue au Mali.
L’IMAM DICKO qui, depuis les premières heures n’était plus en odeur de sainteté avec les militaires au pouvoir, a dû s’exiler. Son protégé Issa Kaou Djim, qui a été trop vite débarqué du Conseil National de Transition (CNT), séjourne actuellement en prison. Même sort pour Clément Dembélé et Ben le Cerveau, et d’autres acteurs qui étaient pourtant proches du pouvoir militaire transitionnel. Tous, y compris bien sûr l’Imam Dicko, sont certainement dans le regret d’avoir milité pour faire chuter IBK. Quoi qu’il en soit, ils seraient aujourd’hui très nombreux à avoir perdu la fougue et le dynamisme politique de l’année 2020 où ils étaient face IBK. La donne a beaucoup changé. Le pouvoir est strictement détenu par les militaires qui n’ont rien à avoir avec les calculs de la politique politicienne des partis politiques classiques. Les détenteurs du pouvoir transitionnel ont tracé et clairement défini leur ligne de conduite politique : soit vous êtes avec eux ou vous êtes considérés comme opposés à eux. C’est désormais, la seule alternative politique au Mali. Dès lors, toute personne qui se positionne comme un obstacle à leur logique ou leur vision actuelle de la gestion, est considérée comme un ennemi. Surtout que la lutte contre le terrorisme semble être la seule préoccupation des militaires au pouvoir. Qui surveilleraient de près les fanatiques religieux musulmans, adeptes de la Charia.
L’IMAM DICKO qui est bien respecté, fait souvent l’objet des critiques. Certains milieux proches du pouvoir transitionnel le soupçonnent de militer en faveur de l’instauration d’un État islamique. Et cela expliquerait sa distance politique avec les militaires au pouvoir. Son séjour prolongé en Algérie ne renforce-t-il pas les doutes que les uns et les autres émettent sur sa propension à s’accaparer par tous les moyens du pouvoir pour proclamer un Califat ?
Son faux retour annoncé au pays, le 14 novembre dernier, par son entourage, n’était-il pas un test pour jauger sa popularité auprès des masses. Mais aussi et surtout, pour se faire une idée de la réaction des autorités transitoires maliennes. Ce qui est sûr, le faux retour annoncé par ses proches va continuer à faire l’objet de plusieurs interprétations politiques. Mais l’Imam serait-il vraiment contraint de rester à l’exil ? Jusqu’à quand ?