Les djihadistes viennent d’appuyer là où ça fait mal. Avec la destruction des mausolées à Tombouctou, ce n’est plus seulement une « fuite destructrice » qu’ils espèrent. Les islamistes radicaux partent à l’assaut de la laïcité de la République.
Aurions-nous perdu cette capacité de nous indigner ? Alors indignons-nous devant un parmi tous ces « actes criminels et barbares » qui ont lieu dans les régions du Nord occupées. Le gouvernement ne nous montre pas tant que ça le chemin à suivre, mais comme à l’accoutumée, on ne retiendra que ce communiqué. Ce 30 juin, on apprenait ainsi que « des groupes extrémistes armés s’en sont pris aux mausolées et aux tombes de la ville de Tombouctou ». Des islamistes, alors maîtres du terrain, auraient donc décidé de faire la nique au pouvoir central de Bamako. Qu’avaient à dire nos gouvernants puisqu’ils n’exercent aucun pouvoir effectif sur le terrain là-bas, la réalité de l’ordre revenant aux mouvements rebelles et islamistes ? En détruisant ou saccageant ces monuments de pierres inappropriées aux yeux de leur religion, les nouveaux maîtres des lieux entendent fonder un monde nouveau. C’est plus qu’un acte politique : c’est une défiance morale qu’ils posent. Mais comme nous savons que dans ces principales villes occupées, AQMI n’est pas partout maître, il lui reste la carte Ançardine dans son jeu, surtout à Kidal et Tombouctou. Cette dernière a sa légitimité entre les mains d’Iyad Ag Ghaly qui, tel le Sphinx, se tait pour l’heure et …rumine.
La segmentation en cours au Nord du Mali
Peut-on croire à ces pratiques de violence qui s’étalent sous nos yeux, des pratiques qui n’auraient rien à voir avec l’Islam, religion de paix et de tolérance ? Des pratiques obscurantistes, en somme, relevait le communiqué gouvernemental. On n’a pas entendu la réactivité des milieux associatifs et religieux. Demain, dans les rues de nos grandes villes, des pancartes et des voix de l’association COREN porteront encore plus haut la réaction de dépit. L’association des leaders religieux du Mali condamne « le crime de Tombouctou » et affirme : « Même le Prophète (PSL) Lui-même allait visiter des tombes et des mausolées ».
Cette intolérance, l’OCI la dénonce à travers des actes posés par des fanatiques. Le HCI au Mali a fait entendre sa différence. Même condamnation du côté de l’Algérie. Le recteur Aubader de la mosquée de Paris, du Maroc aussi. Le Procureur de la CPI, Mme F. Bensouda, assimile ces destructions à des « crimes de guerre ». Le gouvernement malien, de son côté, s’apprête à « engager des poursuites contre leurs auteurs ». Un gouvernement qui se dit pris de saisissement. On se souviendra que c’est une déclaration de l’UNESCO qui avait mis le feu aux poudres avec « Tombouctou, patrimoine mondiale en péril ». Nous retenons que même la porte en bois de la mosquée de Sidi Yahia de Tombouctou a été détruite. Une porte fermée depuis des décennies. A la mosquée de Paris, sur l’une des portes d’entrée, le célèbre verset il est écrit : « Lakadja koum », comme l’appellent les fidèles. Une parole de Dieu qui nous annonce la venue d’un messager parmi nous, sur le cœur de qui pèse ce que nous endurons. On l’appelle le prophète « harrissoum aleykoum ».
Nous avons appris ce qu’il avait dit sous l’arbre de « houdibiya ». Nous avons appris de nos maîtres coraniques ce qu’il avait dit sur la Cité « Makka » après le dernier pèlerinage. Oui, lui Mohamed (PSL) s’en retournerait vivre dans la Cité des Ansars à Médine ; quand bien même la Mecque demeure la vie qui lui est la plus chère au monde. Nos Islamistes radicaux du Nord cheminent par petites marches. C’est une menace sourde et permanente. La puissance publique assure la sûreté intérieure, la diplomatie et la défense. Le Conseil des ministres approuve « la saisine de la CPI et un groupe de travail est à pied d’œuvre ».
Peut-on seulement ester en justice dans le cas de ces destructions de biens immatériels ?
Cela vient à propos car nous pensons à l’infortune de la plainte déposée en son temps contre les crimes commues à Aguel’hoc et autres. Dans ces cas de « crimes de guerre », les autorités ont-elles seulement mieux ficelé leurs dossiers ? N’y avait-il pas d’hypothèques juridiques à lever d’abord ?