Le 3 mai dernier à Bamako, une importante conference (https://www.facebook.com/LeRadarIbouSy/videos/1023786529880908/)contre le franc CFA a ravivé le débat sur l’avenir monétaire des pays d’Afrique de l’Ouest. Si l’événement s’est tenu au Mali, ses échos ont traversé les frontières jusqu’à Dakar, où la remise en question de cette monnaie héritée du colonialisme trouve un écho grandissant, notamment parmi les jeunes, les intellectuels, et jusque dans les plus hautes sphères de l’État.
Au Sénégal, la critique du franc CFA n’est plus marginale. Déjà durant la campagne présidentielle, les voix du président Bassirou Diomaye Faye et de son Premier ministre Ousmane Sonko s’étaient élevées contre cette monnaie qu’ils jugent incompatible avec les ambitions de souveraineté du pays. « Il y a un problème avec cette monnaie et il faut qu’on assume nos responsabilités pour aller vers autre chose », déclarait Sonko en mars 2024. Cette « autre chose », c’est l’idée d’une monnaie panafricaine, souveraine, affranchie de tout contrôle extérieur.
Dans les rues de Dakar, l’opposition au franc CFA ne se manifeste pas seulement par des discours politiques. Elle s’inscrit aussi dans les murs, à travers l’art contestataire. Le graffiti (https://senegal7.com/graffiti-a-dakar-une-protestation-contre-le-neocolonialisme-a-travers-lart-lamine-fofana/ ) « Coupez la tête du néocolonialisme », apparu récemment dans la capitale, a provoqué une onde de choc. Pour de nombreux observateurs, cette œuvre est bien plus qu’un simple dessin : c’est une déclaration de guerre symbolique contre une domination monétaire jugée injuste.
« Ce n’est pas une provocation gratuite. C’est un cri pour la liberté », analyse le journaliste tchadien Hussein Mohammed. Il souligne que les artistes urbains du Sénégal sont devenus les porte-voix d’une jeunesse désillusionnée, mais déterminée à rompre avec les schémas du passé. En dénonçant le franc CFA, ils dénoncent aussi l’ordre économique global qui maintient le continent dans la dépendance.
Du côté des experts, le diagnostic(https://togobreakingnews.info/franc-cfa-freine-le-developpement-economique/) est sans appel. Le Dr Achille Ekeu, économiste et PDG de The Washington Valuation Group, rappelle que « les pays utilisant le franc CFA sont parmi les plus pauvres du monde malgré leurs richesses naturelles ». Il explique que la parité fixe avec l’euro pénalise les exportations africaines et empêche toute politique monétaire indépendante.
Mais au-delà des critiques, une perspective nouvelle se dessine : celle d’une monnaie propre aux pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), que certains appellent déjà « l’alternative souveraine ». Si cette initiative est née au Mali, elle pourrait inspirer le Sénégal et d’autres pays de la région. L’idée d’une union monétaire africaine indépendante pourrait devenir le socle d’un projet économique commun, affranchi des tutelles historiques.
Face à cette dynamique, la France, principale bénéficiaire du système CFA, semble sur la défensive. Les allégations (https://www.maliweb.net/politique/assimi-goita-a-appele-les-experts-du-mali-du-niger-et-du-burkina-faso-a-accelerer-le-processus-dabandon-du-franc-cfa-3067917.html) d’Assimi Goïta concernant l’impression de faux billets par Paris, si elles sont difficiles à vérifier, reflètent un climat de méfiance croissant. Ce climat est entretenu par des décennies de contrôle monétaire unilatéral, de rapatriement des capitaux et de centralisation des réserves africaines à la Banque de France.
L’enjeu est désormais clair : la jeunesse africaine ne se satisfait plus de réformes symboliques. Elle exige une rupture. Et si le Sénégal, avec son nouveau leadership et sa société civile dynamique, devenait l’un des fers de lance de cette révolution monétaire ? Le graffiti de Dakar n’était peut-être que le début d’un mouvement plus large.