Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Annonces    Femmes    Nécrologie    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Politique
Article
Politique

Mali : quatre mois après sa disparition forcée, des experts de l’ONU exigent la libération du militant El Bachir Thiam
Publié le mercredi 10 septembre 2025  |  ohchr.org
Comment


Des experts* des Nations Unies ont appelé aujourd'hui les autorités maliennes à révéler le sort et le lieu où se trouve le journaliste et militant El Bachir Thiam, disparu il y a quatre mois.

« Le Mali doit libérer immédiatement et sans condition El Bachir Thiam et les autres victimes de disparitions forcées, et mettre fin à la répression contre les acteurs de la société civile, les défenseurs des droits humains et les opposants politiques ou ceux qui sont perçus comme tels », ont déclaré les experts.

El Bachir Thiam est journaliste pour le site MaliActu et membre de plusieurs organisations de la société civile et mouvements politiques, dont le parti politique Yelema – Le Changement, dirigé par l'ancien Premier ministre Moussa Mara, le Collectif Sirako et un mouvement de jeunesse appelant au retour à l'ordre constitutionnel, dont il est le porte-parole et le responsable de la communication.

Thiam aurait été enlevé le 8 mai 2025, devant plusieurs témoins dans la ville de Kati, par un groupe d'au moins cinq hommes cagoulés et non identifiés soupçonnés d'être des agents des services de renseignement maliens – plus précisément de l'Agence nationale de la Sécurité d'État (ANSE) – ou des éléments de la gendarmerie du Camp I de Bamako, qui circulaient dans un véhicule TOYOTA V8 4x4 gris aux vitres teintées et sans plaque d'immatriculation. Ses proches et ses collègues l'auraient recherché en vain dans les commissariats et les gendarmeries de Bamako et de Kati. Depuis lors, le sort et le lieu où se trouve Thiam restent inconnus.

« Au fil du temps, l'état de Thiam risque de se détériorer davantage et aura des conséquences graves sur sa santé physique et psychologique», ont déclaré les experts.

Le 17 juillet 2025, Thiam Mariam Dagnon, épouse d'El Bachir Thiam, a déposé une plainte pour enlèvement et disparition auprès du procureur de la République du tribunal de grande instance de Kati. L'enlèvement et la disparition forcée présumés de Thiam ont eu lieu dans le contexte de mouvements de protestation pacifiques initiés au début du mois de mai 2025 par plusieurs mouvements et partis politiques, ainsi que par des acteurs et des organisations de la société civile, à la suite de l'adoption en avril 2025 par les autorités de transition maliennes de lois draconiennes restreignant davantage l'espace civique.

« Les autorités étatiques qui détiennent des personnes et refusent de reconnaître qu'elles sont en détention ou de révéler leur sort ou leur lieu de détention les placent hors de la protection de la loi et commettent le crime de disparition forcée de personnes, tel que défini dans le Code pénal malien. De tels actes constituent une disparition forcée, quelle que soit la durée de la détention ou de la dissimulation », ont déclaré les experts.

« La disparition forcée d'El Bachir Thiam et d'autres personnes constitue une violation flagrante des obligations juridiques internationales du Mali. »

Les experts ont souligné que les autorités maliennes auraient recours de plus en plus souvent aux disparitions forcées comme arme pour semer la peur et réduire au silence les acteurs de la société civile, les défenseurs des droits humains, les opposants politiques ou ceux qui sont perçus comme tels.

« Ces actions suivent un schéma récurrent. La fréquence de cette pratique, son caractère organisé et les méthodes utilisées indiquent un caractère systématique », ont-ils déclaré.

« L'ANSE agit avec un sentiment manifeste d'impunité et d’etre dans son droit », ont déclaré les experts. Ils ont noté que, selon la législation malienne, l'ANSE est placée sous l'autorité directe du président de la République et que ses agents ne peuvent être poursuivis dans l'exercice de leurs fonctions, sauf s'ils ont commis une infraction grave du fait de la négligence ou de la violation flagrante des procédures (articles 8 et 9 de l'ordonnance du 1er octobre 2021 portant création de l'ANSE), mais ils ne font l'objet d'aucune surveillance ni d'aucun contrôle rigoureux. « Du fait qu'elle relève directement du président de la République, les actions de l'ANSE soulèvent des questions de responsabilité pénale au regard du droit malien et international. »

« Le cas de Thiam reflète la persistance et l'escalade des violations des droits humains à l'encontre des membres des partis politiques d'opposition, des organisations de la société civile, des journalistes et des défenseurs des droits humains au Mali », ont déclaré les experts, rappelant que plusieurs titulaires de mandat avaient exprimé des préoccupations similaires en 2021, 2024 ainsi qu'en février, avril et août 2025.

Ils ont noté que la situation a continué à se détériorer, comme en témoigne la signature ou l'adoption de plusieurs lois draconiennes, notamment un décret présidentiel du 13 mai qui a dissous tous les partis politiques et « organisations à caractère politique » au Mali.

Les experts ont écrit au gouvernement malien et continueront à suivre de près la situation.

*Les experts :

Eduardo Gonzalez, Expert indépendant sur la situation des droits de l'homme au Mali;
Gabriella Citroni (Présidente-Rapporteuse), Grażyna Baranowska (Vice-Présidente), Aua Baldé, Ana Lorena Delgadillo Pérez and Mohammed Al-Obaidi, Groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires ;
Irene Khan, Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression;
Gina Romero, Rapporteuse Spéciale sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d'association.
Les rapporteurs spéciaux/experts indépendants/groupes de travail sont des experts indépendants des droits de l'homme nommés par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies. Ensemble, ces experts sont désignés comme les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les experts des procédures spéciales travaillent sur la base du volontariat ; ils ne font pas partie du personnel des Nations unies et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Bien que le Bureau des droits de l'homme des Nations unies fasse office de secrétariat pour les procédures spéciales, les experts exercent leurs fonctions à titre individuel et sont indépendants de tout gouvernement ou organisation, y compris du Haut-Commissariat aux droits de l'homme et des Nations unies. Tous points de vue ou opinions présentés sont uniquement ceux de l'auteur et ne représentent pas nécessairement ceux de l'ONU ou du HCDH.

Les observations et recommandations spécifiques formulées à un pays par les mécanismes des droits de l'homme des Nations unies, y compris les procédures spéciales, les organes de traités et l'examen périodique universel, peuvent être consultées sur l'index universel des droits de l'homme

ohchr.org
Commentaires