Quand la vie confortable des uns est indexée sur l’expropriation d’autres, et que les premiers l’ignorent parce qu’un mécanisme pervers est mis en œuvre pour taire la vérité, que l’on fait donc diversion, cela conduit à l’émergence du plus pernicieux danger pour la société : les uns vivent avec le butin de la piraterie internationale.
Ceux qui pillaient avant et durant la colonisation sont devenus les acheteurs qui fixent les prix des matières premières d’Afrique subsaharienne à l’instar de l’exploitation de l’uranium du Niger par le Commissariat à l’Energie Atomique, AREVA et ORANO.
Le procédé demeure vivace parce qu’il assure l’épanouissement de certains et le maintien des autres dans la pauvreté. Le cas du Mali ne fait pas exception.
Et dans des situations comme celle imposée au Mali actuellement, le sursaut patriotique existentiel est d’une nécessité absolue. Alors les dissensions internes doivent s’effacer parce que la vie, la survie du pays est menacée, voire celle des mélano-africains à terme.
A celles et ceux qui, malheureusement, oubliant les leçons du passé, perdent leur énergie dans le débat stérile entre régimes civil ou militaire militaire, il faudrait dire ceci : quand la vie de la nation est menacée dans sa substance par des prédateurs sans foi ni loi, il faut taire les débats futiles par le fait qu’ils fragilisent la nation face l’ennemi. En de tels moments, l’armée devient le dernier rempart. C’était le cas du GPRF en 1944 en France avec de Gaulle. Un coup d’état qui n’a jamais été qualifié comme tel. Aussi, il importe de rappeler que les résistants à la pénétration coloniale du 19ème siècle s’étaient si joyeusement étripés entre eux que le futur colonisateur n’avait eus qu’à les ramasser les uns après les autres. Nous ne devons pas l’oublier.
Parfois l’histoire bégaie et le scénario peut se répéter. Pour preuve, nous avons eu droit aux embargos, menace d’interventions entre autres d’une CEDEAO financée et instrumentalisée par des entités extérieures à l’Afrique. Et dans chaque pays de l’AES les forces centrifuges sont à la manœuvre. Comme des enfants de cœur, nous avons occulté ce passé peu glorieux.
Pourtant, le démon d’hier, sous le capitalisme industriel du 19ème, a renforcé son inhumanité sous le capitalisme financier des 20ème et 21èmesiècles.
Demeurent tenaces dans leur vision les tenants occidentaux de cette jactance intellectuelle justifiant les tragédies disséminées déci-delà par la soldatesque décérébrée occidentale guidée par des démons, des capitaines d’industries.
Pour preuves, nous les avions évoqués dans une contribution de septembre 2024 « L’Afrique dans la tourmente », les propos de l’ancien chef de la diplomatie européenne, Josep Borrel, et de l’ancien chef d’état-major des armées françaises, le général François Lecointre appellent à l’invasion militaire de l’Afrique. Ils étaient en mission commandée.
Cela nous renvoie encore à Aimé CÉSAIRE qui, en 1950, dans le « Discours sur le colonialisme », disait qu’Hitler s’exprimait par la voix des Sarraut, RP. Barde, RP. Muller, Ernest Renan qui préconisaient l’expropriation des peuples extra-européens de leurs richesses (ressources) pour cause d’utilité publique. C’était les voix de l’impérialisme justifiant ses actes de brigandage international par la volonté divine.
Après les monarchies de droit divin, levé de rideau pour les pillards de droit divin
Pourtant, et plus factuellement, les premiers panafricanistes francophones ont toujours souhaité une coopération mutuellement fructueuse entre la France et ses anciennes colonies. Mais le complexe de supériorité multiséculaire aidant, aucune des autorités françaises des 3ème, 4ème et 5ème république n’en a voulu, le reste de l’Occident a suivi. Pire, tous ces Africains préconisant une vraie indépendance et la coopération furent assassinés, Um NYOBÉ, Félix MOUMIÉ, Patrice E. LUMUMBA, Sylvanius OLYMPIO, Modibo KEÏTA, Thomas SANKARA ou trainés dans la boue, Ahmed Sékou TOURÉ.
Et ce capitalisme sans âme, préexistant à l’impérialisme, s’est mué en Cosa Nostra avec des meneurs permutables en fonction des zones à conquérir. La France reste encore le meneur en Afrique noire francophone, parfois anglophone avec la tentative de partition du Nigéria par Charles de Gaulle en 1967-1970 (guerre du Biafra).
Cette mafia mondiale, tantôt appelée communauté internationale, tantôt OTAN dont le capo dei capo s’appelle actuellement Donald TRUMP a décidé de s’emparer du Sahel. C’était dans les tuyaux depuis longtemps, mais l’arrivée de trois empêcheurs de piller en douce et leurs amis dans les trois pays de l’AES, rend l’entreprise plus urgente et aussi plus ardue.
Ces dirigeants de l’AES ont vu que le diable avait donné la main à leurs pays en signe d’amitié, mais c’était pour ne plus la lâcher afin qu’elle ne puisse plus réagir à son entreprise sordide de pillage et de contrôle perpétuel.
Ces dirigeants de l’AES disent ce qu’annonçait le premier président guinéen, Ahmed Sékou TOURÉ :
«Quand tu es félicité par le colon, c'est que tu es mauvais pour ton peuple. Quand ils disent que tu es mauvais, c'est que tu es bon pour ton peuple. Le jour où ils diront que je suis bon, c'est que je vous ai trahi.»
Maintenant, ce n’est plus le colon, c’est l’esprit de colon, ce qui est plus pernicieux. Nous ne sommes plus dans les propos attribués à Jomo KENYATTA, Desmond TUTU ou Kenneth KAUNDA : «Quand les Blancs sont venus en Afrique, nous avions la terre et ils avaient la Bible. Ils nous ont demandé de fermer les yeux pour prier ; quand nous les avons ouverts, nous avions la Bible et ils avaient la terre».
Les mêmes, puisqu’ils ne peuvent plus donner de la bible, s’adonnent à des péroraisons sur la démocratie et les droits de l’homme. Aux noms de ces concepts, qui ne sont réellement appliqués nulle part, ils envahissent des pays, massacrent des populations. Risible : aux noms de la démocratie et des droits de l’homme on commet des atrocités. L’Irak et la Libye le savent.
Il y a un variant dans les causes avancées, les prétextes pour attaquer des pays : la défense des chrétiens contre les attaques de Boko Haram (une création de la CIA selon Mikaela Honung) au Nigéria. En effet, Donald TRUMP aurait donné l’ordre à l’armée étatsunienne de préparer une attaque contre le pays qui ne défendrait pas assez la minorité chrétienne. En réalité, il y a volonté de faire main basse sur les ressources du Nigéria avec la complicité de certains producteurs de pétrole d’Arabie qui ne souhaite pas d’un Nigéria qui pourrait leur faire de l’ombre. Les conséquences d’une déstabilisation du Nigéria se ressentiront dramatiquement dans toute l’Afrique de l’ouest avec des ondes par ricochet partout en Afrique.
Tous ces éléments convergent vers la volonté d’occuper le Sahel par la violence désinhibée et assumée. Conception sous-tendue par la vision d’un monde considéré comme patrimoine des plus puissants souvent d’obédience américaine. L’Algérienne, en ce moment, lance une offensive diplomatique de charme vers les États-Unis en vue d’être invitée à participer à la curée.
Au Mali comme en Afrique, nous avons le choix entre courber l’échine, ce qui demeure le cas depuis les traites négrières arabo-musulmane et atlantique, ou nous unir pour éviter encore une Afrique dévastée, pillée et souillée sans retenue.
Comme par extraordinaire, nous colportons ce vilain défaut de nous refuser à lire entre les lignes. Josep BORREL, ancien chef de la diplomatie européenne, dans son envolée sur le « jardin européen » à préserver du 13 octobre 2022 devant les futurs diplomates européens a proposé l’envahissement des zones périphériques de ce jardin, on y entend Afrique avec tout ce que cela présuppose de barbarie militaire, de mensonges fabriqués pour légitimer les massacres de masse, des actes abominables.
Il est dommage qu’en Afrique subsaharienne nous nous fermions à toute anticipation pour contrer les abominations planifiées contre nous. Mieux, lorsque des dignitaires occidentaux se permettent des sorties appelant à envahir l’Afrique, aucun dirigeant africain ne réplique, à notre connaissance, comme après les propos insultants de Josep BORREL, et l’apologie du meurtre de François LECOINTRE cités plus haut.
La mutualisation des efforts, la dotation de nos armées en équipements militaires redoutables y compris des armes proscrites par les conventions internationale et dont disposent cependant certaines puissances, les échanges d’informations entre pays africains fiables devient incontournable parce que la meute capitaliste dévouée se prépare pour un retour en Afrique.
Le risque pour l’Afrique est la mise en application de la théorie de RENAN : «La régénération des races inférieures ou abâtardies par les races supérieures est dans l’ordre providentiel de l’humanité…»
Si cet occident belliqueux met encore le pied en Afrique, il n’y aura pas seulement « la régénération » mise en avant par RENAN, mais le grand remplacement, un shift des mélanodermes par les leucodermes. Ce sera pire que la conjonction de la barbarie des traites arabo-musulmanes et atlantiques.
Il est temps que, dans leur rapport avec l’Afrique subsaharienne, l’Occident et le monde arabe remettent en question leurs visions tronquées parfois structurées autour de la malédiction de Canaan entre autres tropismes éculés qui perdurent.