BAMAKO - Des opérations étaient en cours lundi au Mali pour retrouver au plus vite les assassins des deux journalistes français froidement abattus samedi près de Kidal (nord-est), dont les corps doivent être rapatriés à Paris.
Des "opérations pour identifier un certain nombre de personnes dans des campements" ont été lancées dimanche et étaient toujours "en cours" lundi pour retrouver les auteurs de l'enlèvement suivi du meurtre par balles des deux journalistes de Radio France Internationale (RFI), Ghislaine Dupont et Claude Verlon, a déclaré le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius.
"A l'heure actuelle, on n'a pas de certitude sur qui a commis cet assassinat". "On va tout faire pour retrouver les assassins, les punir, les châtier", a assuré Laurent Fabius. Des enquêteurs français devaient quitter Paris lundi pour Bamako, a-t-on appris de source proche de l'enquête en France.
Une source à la gendarmerie de Gao, la grande ville du nord du Mali, a affirmé qu'une "dizaine de suspects" avaient été interpellés "dans la région de Kidal" depuis les meurtres, ce qu'a démenti Paris.
Cette source à la gendarmerie de Gao a affirmé que "les services maliens et français travaillent ensemble" dans la traque des assassins des journalistes enlevés à Kidal peu avant d'être tués à une dizaine de kilomètres de la ville. A Paris, l'entourage du ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a démenti qu'il y ait eu des interpellations: "Pour nous, France et Serval, (nom de l'opération militaire française au Mali, NDLR), aucune arrestation".
Mais les militaires français disposent "d'indications permettant de remonter la trace" des meurtriers des deux reporters français, selon l'entourage de M. Le Drian. Les corps de Ghislaine Dupont, 57 ans, et Claude Verlon, 55 ans, ont été ramenés de Kidal (1.500 km au nord-est de Bamako), via Gao, par un avion militaire français dimanche soir à l'aéroport à Bamako.
Délégation de RFI à Bamako
Des membres de la direction de RFI se trouvent depuis dimanche soir dans la capitale malienne pour organiser leur rapatriement en France, au plus tôt lundi. La délégation, conduite par Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde, qui comprend RFI, doit rencontrer en fin de matinée le président malien Ibrahim Boubacar Keïta, puis son Premier ministre Oumar Tatam Ly.
Elle doit également participer à une marche organisée à Bamako par les journalistes maliens à la mémoire de leurs deux confrères français, avant une cérémonie officielle en leur honneur.
Selon Laurent Fabius, Ghislaine Dupont "a été assassinée de deux balles dans la poitrine", et Claude Verlon "a reçu trois balles en pleine tête", mais il n'y avait "aucune trace d'impact" sur le véhicule, donc "il n'y a pas eu (...) de combat".
De nombreuses zones d'ombre demeurent sur les causes et les circonstances de la mort de deux professionnels aguerris, enlevés en plein jour, dans une ville qui est une zone de non-droit et où, selon le ministre malien de la Défense, Soumeilou Boubèye Maïga, "la souveraineté de l'Etat n'est pas effective".
Selon lui, "la situation de Kidal est telle que toutes les infiltrations sont possibles", dont celle d'islamistes armés radicaux de groupes liés à Al-Qaïda qui avaient occupé la ville et tout le nord du Mali pendant plusieurs mois en 2012, avant de fuir l'arrivée de l'armée française en janvier 2013.
Selon le témoignage d'Ambéry Ag Rhissa, le représentant du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA, rébellion touareg) que les journalistes venaient d'interviewer et qui a assisté à l'enlèvement, les agresseurs parlaient tamachek, la langue des Touareg.
Kidal est le berceau de la communauté touareg et du MNLA, organisation qui a condamné les deux assassinats, mais qui est profondément divisée entre partisans d'un dialogue avec Bamako et jusqu'aux-boutistes qui recherchent la confrontation.
Selon le porte-parole de l'état-major français, le colonel Gilles Jaron, l'hypothèse d'une exécution alors que les ravisseurs tentaient d'échapper à leurs poursuivants ne tient pas.
Il a indiqué que les forces françaises basées à l'aéroport de Kidal, alertées de l'enlèvement, ont envoyé une patrouille et deux hélicoptères sur place, mais ont découvert les corps des deux journalistes sans avoir vu ou affronté les meurtriers.
bur-stb/de/ggy/hba