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Double assassinat de Kidal: que vaut la revendication d’Aqmi?
Publié le mercredi 13 novembre 2013  |  L’Informateur




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Si Al-Qaïda au Maghreb islamique a revendiqué hier les assassinats des envoyés spéciaux de RFI Ghislaine Dupont et Claude Verlon, de nombreuses interrogations demeurent. La revendication d’Aqmi est-elle crédible? Oui.
Claude Verlon et Ghislaine Dupont à Kidal au Mali, en juillet dernier. RFI
Claude Verlon et Ghislaine Dupont à Kidal au Mali, en juillet dernier.
RFI
L’agence de presse mauritanienne Sahara Medias, qui l’a diffusée hier en fin d’après-midi, est l’un des trois canaux utilisés d’ordinaire par Al-Qaïda au Maghreb islamique pour diffuser ses messages et sa propagande.

Un peu plus tôt, un homme affirmant parler au nom de la katiba -phalange combattante- d’Abdelkirm al-Targui, et s’exprimant en tamasheq, la langue des Touaregs, avait appelé l’agence avant de donner lecture d’un communiqué, rédigé quant à lui en arabe. La rhétorique employée puise dans le lexique classique du chapitre saharo-sahélien de la nébuleuse djihadiste. Ainsi, l’assassinat le 2 novembre à l’est de Kidal des envoyés spéciaux de RFI aurait été perpétré » en réponse aux crimes quotidiens commis par la France contre les Maliens et à l’oeuvre des forces africaines et internationales contre les musulmans de l’Azawad « . Il s’agirait du » prix minimum que [François] Hollande et son peuple doivent payer en contrepartie de leur nouvelle croisade « . Or, Aqmi et ses alliés, tel le Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) ont toujours promis de châtier Paris pour son engagement au Mali, que traduit le déploiement du dispositif Serval. Enfin, le « timing » de la revendication, rendue publique quatre jours après le double meurtre, paraît conforme aux usages des terroristes. « Aqmi signe toujours ses actions, nous avait indiqué dimanche soir une source sahélienne, citée dans une analyse précédente et familière du sinistre business des otages. Si tel n’est pas le cas dans les 72 heures à venir, il conviendra de privilégier l’hypothèse d’une initiative de sous-traitants désireux de monnayer leur butin humain et qui aurait mal tourné. »
Qui est Abdelkrim al-Targui?

Surnommé « le Touareg » ou « Ténéré », ce djihadiste malien réputé proche de l’Algérien Abou Zeïd, le chef d’Al Qaïda au Maghreb islamique tué en février dernier lors d’un assaut franco-tchadien, dirige la katiba « al-Ansar ». Il est le neveu de l’islamiste radical touareg Iyad ag-Ghaly, fondateur d’Ansar-Eddine (« Défenseurs de l’Islam »), mouvement associé à Aqmi et à Mujao, qu’il s’agisse de l’offensive déclenchée début 2012 ou de l’occupation des deux-tiers nord du pays qui s’en est ensuivie. Selon le chercheur Mathieu Guidère, al-Targui a joué un rôle crucial dans le rapprochement entre Ansar-Eddine et la filiale maghrébine de la galaxie créée par Oussama Ben Laden. Selon toute vraisemblance, il a hérité, à la mort de son mentor, des quatre otages enlevés en 2010 à Arlit (Niger) et aurait négocié avec Mohamed Akotey, l’émissaire de Niamey, les modalités de leur libération, le 29 octobre. De même, la phalange du « Touareg » serait impliquée dans le kidnapping en novembre à Hombori (est du Mali) de Philippe Verdon -assassiné depuis lors- et de Serge Lazarevic.

Cette revendication dissipe-t-elle les zones d’ombre?
Non, loin s’en faut. Pourquoi, s’il s’agissait bien de punir la France, n’avoir pas « exécuté » Ghislaine Dupont et Claude Verlon à Kidal même, et avoir pris le risque de les emmener sur la piste de Tin-Essako, où leurs dépouilles furent découvertes deux heures après le coup de main, à une douzaine de kilomètres du lieu de l’enlèvement?

De même, la conduite de l’opération dénote d’un amateurisme insolite: l’identification des quatre membres présumés du commando -lesquels courent toujours à ce stade- a semble-t-il été grandement facilitée par la découverte, dans le 4X4 abandonnés sur le site du crime, des numéros de téléphone de plusieurs de leurs proches. Autant d’indices qui incitent à ne pas fermer définitivement la piste d’un assaut improvisé, dont le tragique dénouement s’expliquerait par un événement fortuit -panne mécanique par exemple- ou la crainte chez des kidnappeurs cédant à la panique d’être interceptés par une patrouille ou par des hélicoptères français.
Ainsi, on ne saurait exclure qu’Aqmi ait choisi, par opportunisme ou effet d’aubaine, de « se prévaloir » à posteriori de cette attaque, et de lui donner, en recourant à sa logomachie habituelle, une coloration politique. Scénario d’autant moins incongru qu’une âpre rivalité oppose Aqmi à la mouvance al-Mourabitoun, née en août du rapprochement entre le djihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar, dissident de la franchise sahélienne d’Al-Qaïda, et le Mujao.
Yatt

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