BAMAKO, La rébellion touareg du MNLA a évacué jeudi deux bâtiments publics à Kidal (nord-est du Mali) après plusieurs mois d'occupation, décision contestée par des partisans qui ont saccagé des édifices dans la ville où l'ONU est intervenue.
"Les rebelles (du Mouvement national de libération de l'Azawad, MNLA), conformément à leurs engagements, ont libéré ce jeudi le gouvernorat et la radio de Kidal", a déclaré à l'AFP Abdoulaye Bathily, numéro deux de la mission de l'ONU au Mali (Minusma), arrivé sur place mercredi.
Une source au gouvernorat de Kidal a indiqué sous couvert d'anonymat que les soldats maliens avaient aussitôt pris le contrôle du gouvernorat après le départ des rebelles, mais pas la radio (ORTM), où étaient déployés jeudi soir les soldats de la Minusma.
Le gouvernorat et l'ORTM étaient occupés depuis environ neuf mois par des hommes du MNLA. La décision de les évacuer, annoncée le 9 novembre, a divisé les partisans de la rébellion.
Plusieurs pro-rebelles qui s'y opposaient ont organisé des sit-in de protestation, des manifestants ont saccagé jeudi après-midi une partie du gouvernorat ainsi que d'autres édifices publics proches, selon des habitants.
Depuis Ouagadougou, le vice-président du MNLA, Mahamadou Djéri Maïga, s'est
défendu de toute instrumentalisation des partisans dans les "échauffourées", assurant que c'est "la population de la ville-même" qui a agi.
Le calme est revenu après des discussions avec des hommes du MNLA, a expliqué M. Bathily de la Minusma. "La base n'était pas pour cette décision, mais j'ai rencontré tout le monde, et ça c'est bien passé finalement", a-t-il affirmé.
Le chef de la Minusma, Bert Koenders, a salué le respect par les rebelles touareg d'engagements pris dans le cadre d'un accord signé en juin à Ouagadougou avec le gouvernement malien. Cet accord prévoit des discussions de paix pour lesquelles aucune date n'a encore été fixée.
"Dans l'intérêt des parties et de la population, il est nécessaire d'entamer rapidement des pourparlers inclusifs de paix", a dit M. Koenders, invitant à la retenue "durant cette période importante pour le dialogue, la réconciliation et la paix au Mali".
Les législatives "auront lieu" comme prévu
Ces développements surviennent à dix jours d'élections législatives censées parachever la transition politique au Mali qui, entre 2012 et 2013, a connu 18 mois de crise politico-militaire marquée par un coup d'Etat et l'occupation du Nord par des groupes armés.
Le premier tour des législatives est prévu le 24 novembre, un éventuel second tour le 15 décembre. Mais le pays peine à être sécurisé: les jihadistes ont mené plusieurs attaques ces dernières semaines dans le Nord. Le 2 novembre, deux journalistes français ont été enlevés et tués à Kidal, fief des rebelles touareg et chef-lieu d'une région devenue une "zone de non-droit", selon plusieurs responsables maliens.
En marge d'une conférence internationale à Rabat, le chef de la diplomatie malienne, Zahabi Ould Sidi Mohamed, a déclaré à l'AFP que les législatives "auront lieu sur l'ensemble du territoire malien, y compris à Kidal (...) et personne ne peut les empêcher".
Le MNLA avait repris pied à Kidal après une intervention militaire franco-africaine déclenchée en janvier 2013 - et toujours en cours - qui a permis de chasser des grandes villes les groupes islamistes armés qui ont occupé le Nord malien près de dix mois.
Ces groupes liés à Al-Qaïda avaient profité d'une offensive contre l'armée malienne, déclenchée par le MNLA en janvier 2012, pour s'emparer avec lui du nord du pays avant de l'en évincer.
L'armée française, fer de lance de l'offensive anti-islamistes armés, poursuit la traque des jihadistes et a annoncé avoir mené dans la nuit de mercredi à jeudi une "opération spéciale" dans une zone désertique, à environ "200-250 km à l'ouest de Tessalit", plus au nord de Kidal.
Plusieurs membres d'Al-Qaïda ont été neutralisés et du matériel a été saisi, a indiqué le chef d'état-major français, l'amiral Edouard Guillaud.
"Au moins trois jihadistes ont été tués", a indiqué une source militaire malienne jointe à Kidal, parlant de "frappes aériennes".