L’historienne Penda Mbow a affirmé, jeudi à Berlin (Allemagne), que le Sénégal ne peut pas connaître la même situation que le Mali, dont une bonne partie du territoire avait été occupée par des islamistes armés, fondant son optimisme sur la différence entre les évolutions de ces deux pays voisins.
"Ce sont les évolutions des deux Etats qui se trouvent différentes de part et d’autre. Je me fonde sur notre évolution et les aspects qui caractérisent les deux pays", a dit Penda Mbow, lors d’une conférence internationale sur "les musulmans et la société : la participation citoyenne et politique".
La rencontre, organisée par la Fondation Konrad Adenauer (FKA), réunit des participants de neuf pays, en plus des Allemands.
"Le Mali est un vieux pays où il n’y a pas de mobilité dans la société. Ce sont les mêmes catégories sociales qui gouvernent le Mali depuis Soundiata Keïta", a expliqué l’universitaire sénégalaise, qui faisait partie de la dizaine de panélistes invités à cette manifestation d’une journée.
Elle a souligné qu’elle "reste très optimiste tant qu’on a une bonne société civile, très forte, des groupes religieux conscients de leurs limites, et un Etat qui se consolide".
"Le Mali, qui n’a pas beaucoup de ressources - je ne dis pas que le Sénégal a beaucoup de ressources -, est un pays continental immense, qui a du mal à avoir prise sur tout son territoire", a rappelé Penda Mbow, enseignante au département d’histoire de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
Elle a ajouté : "Le problème identitaire est le fait d’un groupe ethnique qui est à cheval sur plusieurs pays, dans une zone de transition qui est le Sahel, et cherche le démantèlement de l’Etat malien, avec l’appui de forces extérieures".
Elle fonde aussi son analyse sur le fait que le Sénégal et le Mali n’ont "pas la même composition sociale et ethnique". "Ce ne sont pas les mêmes groupes (islamistes)", a-t-elle affirmé, précisant que les deux pays ne sont pas confrontés aux mêmes problèmes.
"Le Mali avait une armée qui n’a pas pu faire face, et le Sénégal a une armée républicaine, une armée de métier, et les questions de sécurité se posent moins au Sénégal qu’au Mali", a encore signalé Penda Mbow.
Des groupuscules armés, dont les plus connus sont Ansar Dine, Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO), ont conquis le Nord du Mali en mars 2012, avant d’en être chassés un an plus tard par une force militaire conduite par la France.
Sous l’égide de la France, une force armée multinationale comprenant des éléments nigériens, sénégalais et tchadiens s’est déployée dans le Nord du pays, à partir du 10 janvier 2013, pour y chasser les islamistes.
A la suite de cette intervention, un accord a été signé en juin par les rebelles et le gouvernement malien, pour permettre la tenue d’une élection présidentielle à l’échelle du territoire national. Cette élection organisée en août-septembre a été remportée par l’ancien Premier ministre Ibrahim Boubacar Keïta.