Après la marche organisée par les femmes de l’hôpital Gabriel Touré, nous avons approché la direction de l’hôpital pour savoir de quoi il s’agit. C’est le directeur, Dr. Lasseni Konaté, qui nous a reçus.
Dans cette affaire qui a fait un grand bruit à Bamako, les femmes de l’hôpital estiment que depuis l’arrivée du directeur, M. Lasseni Konaté, qu’elles manquent de tout dans le cadre de leur fonction. Elles ont affirmé lors de la marche que les ristournes ne sont payées et que les laboratoires manquent des produits nécessaires pour le travail.
Aussi, la question des blouses était au cœur des revendications. Selon les responsables des femmes et organisatrices du mouvement, ce n’est pas le manque de moyen qui est à la base de la grogne, mais plutôt la mauvaise volonté et l’incapacité du DG, Konaté à faire face aux problèmes.
Pour le directeur de l’hôpital, Dr. Lasseni Konaté, c’est un autre son cloche. En effet, selon lui, «le problème c’est que depuis mon arrivée, j’ai décidé de mettre fin à des pratiques frauduleuses. Mon agent comptable est très vigilent, il ne cesse de mettre à nue des systèmes frauduleux mis en place par des travailleurs. Chaque jour pratiquement, nous demandons à un agent de rembourser des sommes détournées. Cette nouvelle situation crée un manque à gagner considérable chez certains agents véreux qui ne parviennent plus à faire des affaires avec l’agent comptable», a-t-il précisé.
Sur la question de l’absence de draps et de l’insuffisance de plateau technique, évoquée par les représentantes des femmes, le DG a répondu par-ci : «Je vous rappelle que c’est nous qui avons donnés des draps à l’opération SERVAL. On avait au moins 200 draps au début de l’opération SERVAL, mais il se pourrait qu’il n’y ait plus de draps aujourd’hui. Le Ministre Makadji, en son temps, nous a offert 46 matelas.
Par rapport au plateau technique, le même ministre, deux jours après l’opération SERVAL, nous a offert un scanner et une radio. Moins d’un mois, on me fait savoir que la mémoire de ces appareils est trop petite.
Pendant que nous possédons des appareils neufs, des travailleurs font savoir aux malades que les mémoires des dits appareils sont remplies, donc incapables de faire le travail. Et ils se permettent de transporter les malades avec notre ambulance, avec notre carburant et nos chauffeurs à une autre clinique dont le nom est «La Rosette».
Quand un malade est hospitalisé à l’hôpital Gabriel Touré, il paye 30.000 FCFA pour le scanner, ils le transportent pour aller lui faire payer 65.000 FCFA à la clinique «La Rosette» moyennant leur pourcentage. Ces genres de situations sont inadmissibles. Quand un malade venait, je ne sais pas comment ils s’arrangeaient pour trouver une solution afin d’encaisser les frais de la radio sans passer par la caisse. Alors qu’au regard de la loi hospitalière, seul l’agent comptable et ses agents sont habilités à percevoir de l’argent.
Personne d’autre ne doit toucher à l’argent. Nous avons constaté et surpris des gens remettant directement l’argent des patients à nos agents de la radio et je les ai contraint (agents hospitaliers) à le rembourser au niveau de l’hôpital. Des internes qui opèrent les malades entre 80.000 FCFA et 150.000 FCFA, et empochent cet argent au détriment de l’hôpital. Et en fin de période, ce sont ces mêmes agents qui se présentent pour demander et exiger des ristournes ou autres avantages», a-t-il dit
Avant d’ajouter ceci : «Malheureusement, on n’est dans une pratique ou la loi nous autorise à nous endetter, cela pour équiper l’hôpital ou construire des salles. Quand j’arrivais, l’hôpital avait 18 millions en recette ce qui était insuffisants pour payer le salaire des contractuels qui se levait à peu près à 23 millions. Tout l’argent que l’hôpital avait en décembre 2012 s’élevait à 18 millions. Dieu merci, avec les différentes mesures et un nouveau logiciel, de 18 millions, nous sommes passés au 31 octobre 2013, le certificat d’encaissement fait ressortir un crédit de plus de 84 millions.
Mais il se trouve qu’auparavant l’hôpital s’était endetté pour payer des ristournes, des primes de garde. Il est arrivé un moment où, nous n’étions mêmes pas crédibles aux yeux des banques. Les banques nous ont donc fait savoir même qu’elles ne peuvent pas faire ce que nous faisons à l’hôpital, c’est-à-dire prendre de l’argent frais et le distribuer pour des ristournes. Le syndicat est au courant de tout cela.
Le problème c’est que le secrétaire général du syndicat voulait avoir un poste de responsabilité au sein de l’hôpital comme il ne l’a pas eu, il est en train de dire à ses militants le contraire de ce qu’on lui dit. Contrairement à ce qu’ils sont en train de divulguer, je n’ai jamais refusé de recevoir quelqu’un, surtout un agent de l’hôpital.
D’ailleurs, nous sommes le seul centre hospitalier à disposer d’un chargé de communication et d’un conseiller juridique. Nous nous réunissons périodiquement avec les chefs de services, et j’ai demandé depuis août que le personnel me propose la liste des matériels pour l’année prochaine. Il faut rappeler que Gabriel Touré a reçu 80%des blessés de guerre que notre pays a traversé», a-t-il conclu.
Par rapport au paiement des ristournes
Elles sont régies par l’article 77 de la loi n°02-050 du 22 juillet 2002 qui stipule que «chaque établissement hospitalier met en œuvre sur ses excédents une politique d’intéressement de son personnel aux résultats de l’exercice écoulé».
Sur ce point, le directeur s’est exprimé en ces termes : «J’ai à ce titre initié une demande aux fins de paiements des dites ristournes. Le dossier a été bloqué par le contrôleur financier, qui est par essence le conseiller du directeur. Etant une experte en la matière, Madame le contrôleur financier, a bloqué ma demande.
Interpellée à ce sujet, elle a donné des explications comme quoi l’hôpital ne peut pas être endetté à plus de 96 millions et payer des ristournes, mais elle a estimé que si l’on voulait le faire, on pouvait puisque ce sont nos ressources propres.
Elle a estimé qu’au moment de la régularisation au niveau de la banque, elle ne prendrait pas la responsabilité. Je lui ai donc demandé de venir expliquer cela au comité syndical et, chose qui a été faite lors d’une assemblée générale d’information et le comité était même sensible à ses explications. Mais il a suffi que le secrétaire général ne soit pas nommé, pour que les choses se détériorent.
A la fin mars 2013, ce certificat a montré qu’on avait 50 millions, et c’est suite à ces grèves et meeting interminables que nos recettes ont baissé et n’arrivaient plus à atteindre 40 millions de CFA. A la date d’aujourd’hui nous avons épongé nos dettes auprès de la banque soit plus de 96 millions, mais aussi payé les salaires des contractuels, les indemnités de responsabilités, les primes de garde. Ce sont les ristournes qu’on n’a pas pu payer. La réalité économique ne nous permet pas de payer les ristournes.
De nos jours les recettes disponibles ont été déjà positionnées pour le paiement des salaires des contractuels. D’ailleurs la loi citée plus haut ne fait obligation que si des ressources sont disponibles, n’existant pas je ne sais pas comment payer une quelconque ristourne. Ce qu’ils oublient, c’est que je gagnerais plus en cas de partage de ristournes, mais je ne peux pas accepter qu’on paie des ristournes avec l’argent des salaires des contractuels qui est le droit le plus absolu.
Le logiciel installé et qui fait partie des doléances permet de tracer toutes les entrées de l’hôpital, du coup toute fraude est impossible. Par rapport au téléphone, j’ai estimé que les factures de téléphones étaient trop élevées, car s’élevant souvent à 3 millions. J’ai donc demandé à ce qu’on réduise cela, actuellement les factures ne dépassent plus 100 à 150.000 FCFA.
Depuis que je suis là, mon adjoint et moi utilisons nos propres téléphones pour communiquer. Entre temps avec l’arrivée de l’opération SERVAL, Orange-Mali a donné à quelques responsables de l’hôpital des téléphones dont la consommation est gratuite et cette situation aussi pose problème. Les badges devaient être confectionnés en fonction des travailleurs».