Des Législatives sans engouement pour une Assemblée de façade, ce calme plat normal inquiète pourtant les observateurs. Le présent scrutin est caractérisé par le manque d’engouement des populations provoqué et entretenu par l’absence de vision, de plan programmatique et de cohérence de la part des candidats qui peinent même à convaincre sur leur utilité; au point qu’ils n’arrivent même plus à faire semblant.
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C’est à mon sens, une mauvaise leçon de démocratie à corriger très vite. Il n’est donc pas surprenant que les officiels de la MINUSMA et les observateurs étrangers s’ennuient à mourir à Bamako. Ces spécialistes en gestion des malaises annonciateurs de crises et de conflits sociopolitiques et Experts en prévention de ceux-ci, lors du déroulement des joutes électorales, continuent à se tourner les pouces et à remuer leurs méninges pour l’élaboration de leurs rapports d’analyse. En effet, il faut être malien ou avoir bien étudié les enjeux des scrutins législatifs au Mali, pour se rendre compte que quels que soient les résultats qui sortiront des urnes, IBK aura sa « majorité opérationnelle » pour gouverner sans aucune difficulté contre même, éventuellement, une majorité numérique que détiendrait l’ « opposition ». En réalité, RAS ‘‘ il n’ya rien à signaler ici’’ !
Les Listes Electorales Génétiquement Modifiées (LEGM)
Pour comprendre les enjeux (ou l’absence d’enjeux) des élections législatives du 24 novembre prochain au Mali, il faut juste analyser les considérations les plus courantes qui président à l’inscription des candidats sur telle ou telle liste.
A l’analyse, ce sont deux critères majeurs qui se disputent souvent et se partagent quelquefois les faveurs des listes électorales en compétition. Il s’agit de la logique économique et de la logique sociologique.
La logique économique et financière impose aux candidats les moins riches d’opter pour les listes qui coûtent moins et dont les chances de succès sont très infimes.
Tandis que les plus riches qui ne sont mus que par le bénéfice du précieux sésame qu’est l’immunité parlementaire, ont la part belle sur les listes à l’issue victorieuse presque certaine. Ces candidats de luxe financent la campagne de toute la liste qui les a accueillis et peuvent même, des fois, se permettre de destiner leurs salaires et indemnités attachés à leur prochain statut de député, à la trésorerie du parti qui les a investis sur ses listes.
Alors que la logique sociologique obéit, elle, à des règles qui accordent à certaines catégories sociales des privilèges symboliques dans la société malienne. C’est ainsi que les notables, membres de grandes familles coutumières et religieuses sont courtisés par toutes les alliances, parce que leur seule présence sur une liste lui garantit une victoire certaine. Un consensus très large au sein de la société malienne, accorde une légitimité absolue à cette forme de discrimination positive qui favorise un climat social de paix et de stabilité dans les relations au sein et entre les différentes communautés.
Ces considérations sont acceptées, respectées, peut-être même exigées et légalisées tacitement par tous les partis, de la droite à la gauche, du centre aux extrêmes. La conséquence extraordinaire, c’est que des partis s’affrontent dans certaines localités qui mettent aux prises des alliances rivales et se retrouvent ailleurs en tant que alliés objectifs dans une même alliance.
Un militant peut donc combattre son parti sans le quitter, le temps des élections; pourvu simplement que cela participe à la défense et à la préservation de ses intérêts. Parce que pendant les élections locales, les partis n’ont plus aucun intérêt à défendre; ils sont tous provisoirement dissouts de fait. Les affinités familiales, communautaires, religieuses sont les seuls critères qui déterminent les inscriptions des candidats sur les listes d’abord et les choix des électeurs ensuite. Ces critères étant eux-aussi imbriqués à l’infini, la lecture, même socio-anthropologique, est rendue tellement complexe au point qu’elle devient inutile, parce que sans intérêt politique. Mêmes les hommes politiques supposés être courageux et modernes, n’émettent des critiques contre cette situation qu’en mode « off the record ».
Du point de vue de l’approche scientifique, il s’avère plus sage et plus pertinent de ne lier cette situation cocasse dite « à la malienne » à aucune autre déjà existante quelque part et de lui consacrer plutôt une étude spécifique. C’est un cas d’école sur lequel les spécialistes devraient s’accorder pour expliquer certains phénomènes politiques et sociaux propres au Mali et prévenir ainsi certaines crises très improbables.
Un confrère me racontait la difficulté qu’éprouvait son ami candidat à battre campagne pour la liste qui l’a investi parce que celle-ci est en compétition contre une autre liste sur laquelle figure un candidat dont la famille est socialement alliée à la sienne (leurs deux familles ayant toujours cheminé ensemble). Si maintenant le cousinage à plaisanterie vient compléter ce complexe décor, nous avons déjà une parfaite idée de la future configuration de l’Assemblée Nationale quels que puissent être les prochains résultats du présent scrutin. Elle sera une Assemblée dans laquelle les partis politiques réessayeront de reprendre du service en veillant à ne pas gêner le Président IBK, après que les alliances électorales eurent terminé leur boulot dans le respect des règles qui gouvernent les relations inter et intra-communautaires.
Le pire scénario pour IBK: Minorité Arithmétique, mais Majorité Opérationnelle
D’où le calme olympien du Président IBK, malgré le risque réel que son parti soit mis en minorité à l’hémicycle. Il sait plus que tout le monde que si ce scénario arrivait à se dessiner, ce serait une simple minorité arithmétique sans aucune valeur opérationnelle; du pur exotisme institutionnel dont il peut parfaitement s’accommoder.
C’est pourquoi ‘‘il n’ya rien à signaler’’
Vivement une « Assemblée des sages » (un vrai contre-pouvoir pour équilibrer les pouvoirs) pour parfaire la démocratie malienne.