Le général Amadou Aya Sanogo devrait être entendu par le juge d’instruction Yaya Karambé au tribunal de première instance de la commune III du district de Bamako le mardi 19 novembre dernier, mais l’audition a été reportée sine die sans raison valable. Qui bloque la justice à faire son travail ?
Le mardi 19 Novembre dernier tous les projecteurs étaient braqués sur le tribunal de 1ère instance de la Commune III (pôle économique).Très tôt le matin, la presse nationale et internationale avait déjà pris d’assaut les lieux, afin de ne rater le moindre détail de la comparution du Général Amadou Haya Sanogo, cité dans l’affaire de disparition et d’assassinats de nombreux militaires à l’issue des événements du 30 avril 2012 et du 30 septembre 2013.
Quelques policiers du 14ème arrondissement étaient également présents pour assurer la sécurité. Mais curieusement, la vedette de l’événement, l’acteur principal du ‘’cinéma’’, le généralissime de circonstance Amadou Aya Sanogo n’a pas été au rendez-vous. Et pourtant le juge d’instruction en charge du dossier Yaya Karembé était bel et bien présent dans son bureau au tribunal à la date et à l’heure indiquées pour l’audition. Il y’a bien anguille sous roche.
Qui veut étouffer l’affaire?
On n’a pas besoin de boule de Crystal, ni de 12 cauris pour reconnaître que le Général Amadou Haya Sanogo est protégé. Très protégé, trop protégé par des gens d’en haut. Mais aussi, par certains leaders religieux. Ce n’est pas chose gagnée d’espérer que le pouvoir actuel d’IBK serrait prêt à livrer à la justice, un important maillon de son bras armé, l’ex chef de la junte Amadou Haya Sanogo. C’est pourquoi, depuis l’ouverture de ce dossier extrêmement sensible, on n’a pas cessé de faire tourner en bourrique l’opinion nationale et internationale. La justice nationale avec. Il a fallu le courage de l’actuel ministre de la défense, Soumbeylou Boubèye Maiga pour que cette affaire puisse connaître un début de déblocage. Et cela se comprend aisément, si l’on sait que c’est lui qui fut le premier responsable politique embarqué manu militari comme une boite de sardine à Kati, le jour du putsch. Sans pour autant le dire publiquement, on savait qu’en véritable stratège Boubèye allait laver cet affront public. A part lui , c’est le silence total chez les gens d’IBK. Même le brillant ministre de la justice, Me Bathily ,un féru des caméras de l’ORTM, s’est tue comme une carpe. Du coup, les juges roupillent à poings fermés sur ce dossier.
Ce sommeil judiciaire qui dure depuis le 30 avril, commence à faire un joli pataquès. Le seul qui avait haussé le ton, le juge d’instruction Yaya Karambé, est resté vraiment seul à pédaler dans la choucroute. Personne d’autres pour sécher les larmes des parents des victimes.
Pourtant le pouvoir actuel a intérêt à clarifier sa position dans cette affaire pour dissiper le flou persistant qui l’entoure. Surtout qu’il s’agit de mort d’hommes avec préméditation. Au bénéfice de déboulonner un peu l’impopularité de l’homme fort du moment (IBK) qui ne jouit plus comme on pouvait l’imaginer de grande crédibilité auprès des Maliens. Et ce, pour plusieurs raisons.
Le juge Karembé a-t-il les mains liées ?
En clair, dans cette affaire on a l’impression que la justice au lieu de réactiver les choses est en train de les enterrer. L’inertie de ce pouvoir important dans un pays démocratique conduit à la dérive.
Il a fallu quelques tapages médiatiques de quelques caïds du Général Sanogo dans la presse, pour que de nombreux magistrats se tirent la couverture sur soi. Et mettre le jeune magistrat Karambé seul face à son destin. Du coup, lui est en train d’assister à l’enlisement de son travail au vu et au su de tout le monde.
Et pourtant lors de la cérémonie solennelle de la rentrée des Cours et tribunaux du Mali, le bâtonnier de l’ordre des avocats du Mali, Me Isaac Keïta a rappelé au président Ibrahim Boubacar Keïta, que « les événements du 30 Avril n’ont pas encore été élucidés. Les familles attendent impatiemment les nouvelles de leurs proches ». On ne peut plus dire davantage.
Moustapha Diawara