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Le 26 Mars N° 783 du

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Femme et développement : Réenchanter l’Afrique
Publié le samedi 23 novembre 2013  |  Le 26 Mars




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Le rôle de la mère est fascinant et quasi mystique d’autant plus qu’il repose sur un aspect charnel encore mystérieux en dépit des avancées de la science. C’est la femme qui, proclame-t-on au Mali dans une formule apparente de lapalissade, engendre les rois, les ministres, les hommes richissimes. La procréation est son apanage exclusif, l’homme n’y accédera jamais.


La mère est l’icône de la maison. Son premier rôle demeure l’éducation des enfants mais en réalité, elle régente la vie de l’ensemble de la communauté familiale, allant jusqu’à s’immiscer dans les relations de couple de ses fils. C’est que dans le mental collectif, la réussite d’un homme dépend de sa mère : le nom, c’est le père mais la force, la baraka, c’est la mère, assène le dicton populaire.


Cette réussite, croit-on, découle surtout de sa souffrance. La souffrance devient ainsi une valeur positive, mieux, une valeur à sublimer puisque sa puissance est symétrique à celle de l’enfant. Plus elle est immense, plus la réussite de l’enfant est éclatante. Ainsi, tous les héros bâtisseurs d’empires sont salués à travers les noms et le martyre de leurs mères. Même si la mère d’un grand homme n’a pas souffert dans sa vie de couple, il faut la faire souffrir pour qu’elle cadre bien avec l’archétype de la mère d’un fils exceptionnel. Le père est gommé, il n’est que le géniteur.



Généralement, la souffrance voire la disparition physique préfigure la grandeur du fils. L’histoire de notre pays nous en offre des exemples édifiants.


Prenons la geste de Sunjata, la plus populaire. Le jour où le héros quitte le Méma pour voler au secours de son pays – nous sommes en 1235 – la conversation qu’il a avec sa mère, leurs adieux, résument la situation : « Djata, cours, pars vers le Manden, lui dit Sogolon, sa mère, un grand destin t’y attend. J’ai souffert, toute ma vie durant, dans ma chair de femme, méprisée, bafouée, humiliée, mais aujourd’hui je suis apaisée. Je suis venue sur cette terre, Djata, avec seule mission de te mettre au monde, toi le prédestiné, le Nankama. Toutefois, pour que ton destin s’accomplisse, il a été aussi tracé que je dois disparaître de ce monde. A l’aube, je ne serais plus en vie, je rendrai l’âme mais mon esprit continuera à te protéger. »


Une mère pour de vrai augmentera son pouvoir et son ascendant sur son fils et son entourage en cherchant à renforcer sa puissance protectrice. Elle recourt à des pratiques magiques, fréquente marabouts et devins, qui lui lisent l’avenir, la prévient des menaces qui planent sur elle et les siens, l’aident à conjurer le sort, à attirer la chance etc. Sur sa lancée, elle apprend elle-même versets, incantations, formules et potions magiques pour accroître ses dons, au point de devenir à son tour femme de savoir, qui n’est jamais prise de court par un mauvais évènement et qui, progressivement, se trouve dotée par la société d’une aura singulière. Canonisée de son vivant, élevée sur un piédestal, elle inspire crainte et respect.


La mère est nourricière, saluée à ce titre. Elle est comparée à la vache aux pis intarissables, quand elle met cette qualité au service d’autres enfants. Une mère nourricière accomplie reçoit une autre épithète : la bonne mère, fleuve nourricier. Ainsi, la nature dote la femme/mère d’un apanage, assorti de valeurs pendantes : le don de soi, la générosité et la bonté.


L’image de la sœur et de la femme-épouse complète celle de la femme-mère. Appesantissons-nous sur la femme-épouse.

La femme-épouse :
L’idéal féminin de la femme-épouse fait d’elle un être fort psychologiquement, nantie, à cause de cet état de fait, d’une capacité de protection de son époux, l’homme, fort dans le corps, mais faible dans la tête. Un proverbe tamasheq enseigne par exemple que « la femme est le pantalon de l’homme » c’est à dire qu’elle le protège et cache ses forces et ses faiblesses. Les Bamanans disent : ka soutra. Soutoura, voilà une autre valeur cardinale !



Partout, la socialisation de son époux lui est dévolue. Elle gère ses relations sociales, est sensée faire son bonheur et sa réussite, rien que par son intelligence, sa conduite et son savoir-faire, au point que l’adage populaire considère que lorsqu’un homme a la chance d’avoir une épouse cadrant avec les normes mentionnées, il surpassera en grandeur ses frères rivaux et tous ses semblables hommes. Cette responsabilité super protectrice est telle, qu’on va jusqu’à imputer à la femme les déviances de son mari, y compris les déviances extra conjugales. Si un homme, en effet, en arrive à tromper sa femme, croit-on, c’est parce qu’elle ne sait pas user de savoir-faire ou d’artifices pour le retenir à la maison. Allez savoir !



Sur l’échiquier du pouvoir, l’image de la femme-épouse, reflétée à travers les Premières dames, a recouvert celle de la reine-mère.

La soumission, comme arme de défense :
Nonobstant ce rôle essentiel, primordial, ce rôle de la vie, la femme s’est laissée doublée sur sa gauche par l’homme qui l’a assujettie grâce à sa force brutale. Dans ce contexte de domination des hommes et de partage des responsabilités, la femme, pour se défendre, a imaginé des scénarios de résistance pacifique, d’auto-protection, pour plaire non seulement à son époux, mais également à ses parents et amis. Cette tactique, globalement, est taxée de soumission. La femme africaine a vite été qualifiée de femme soumise, surtout par la littérature occidentale, qui n’a retenu que la façade, l’aspect qui saute à l’œil. Le fait de soumission est devenu un acte répréhensible, la femme sujet de compassion.



En passant au peigne fin cette « soumission », on se rend compte qu’elle est une posture d’humilité, majigin ; elle est aussi une « ruse de guerre » et au bout du compte, elle tend à consolider la réputation et la position centrale de la femme. La femme dite soumise devient la personne incontournable auprès de laquelle il faut se référer pour avoir à manger, être blanchi. D’une disponibilité à toute épreuve, aucun étranger ni aucun parent venu du village ou d’ailleurs, ne peuvent se passer de ses services.



Quant à sa relation avec son propre mari, elle est faite de soumission apparente. Dans ce registre, elle aiguise sa féminité pour lui plaire : petits plats, artifices de beauté, techniques de séduction, attentions particulières etc. Elle affine cette arme au point de la transformer en comédie : la comédie de l’effacement.



L’effacement de la femme africaine, en voilà une autre image d’Epinal ! En réalité, il participe, le plus souvent, du même jeu de recherche de l’équilibre dans le foyer. Je ne puis m’empêcher d’évoquer ce proverbe sud africain, qu’il me plaît de citer chaque fois que j’en ai l’occasion. Ecoutez-le bien, parce que l’image est forte et suffisamment symbolique : « la poule sait que le jour s’est levé, mais elle laisse le coq chanter. » N’est ce pas qu’elle fait pâlir cette expression, désormais usée, qui dit que derrière tout grand homme se cache une grande dame ?



Mais revenons à la souffrance dans le silence.



La souffrance dans le silence :
L’autre valeur référencée par le code de bravoure de la femme est la souffrance dans le silence, l’ai-je déjà dit, la capacité de subir, de se résigner, d’accepter. Souffrir dans le silence, sans se plaindre ni surtout colporter ses malheurs, est une vertu dont la femme doit se parer dans la culture malienne; c’est sa marque de fabrique. Dans ce domaine comme ailleurs, la femme s’est abritée derrière cette recommandation au point d’en faire une arme d’auto-protection, dans la mesure où ceux qui prêtent une oreille attentive aux récits de ses malheurs, ne sont pas forcément des amis, ni a fortiori, des protecteurs ; mais surtout, cette sublimation de la souffrance et son acceptation par la femme, lui permettent de contourner un rapport de force inégalitaire.


L’abnégation, élevée au stade de dispositif transcendantal, de foi, parachève le code chevaleresque de la femme au point qu’une fille répudiée en pleine nuit par son mari est immédiatement chassée par sa famille qui refuse de lui ouvrir les portes de la maison et lui intime l’ordre de retourner dans son foyer, même si son mari doit la tuer. La patience, la douceur, l’endurance, la tolérance et l’abnégation, sont supposées venir à bout de la méchanceté, de l’injustice, de l’épreuve de force. Ainsi, nous sommes dans une régulation sociale opposant la vertu au vice et à la force brutale, dont la femme reste la victime expiatoire et le porte-étendard.


De tout cela il résulte que la femme, arrivée à ce stade de perfection, devient la gardienne et la personnification vivante de toutes les valeurs décrites. Mieux, elle se transforme en monument de vertus, forgé à la suite d’une longue épreuve dans laquelle elle s’est trouvée dans l’obligation de renégocier « son moi ».



Ce qui est sûr, c’est que la société joue un rôle majeur dans la marche de la femme vers les vertus. Elle est confortée par le savoir-faire, le poids des mots, véhiculés par ces orfèvres du verbe que sont les griots, à la fois régulateurs et catalyseurs sociaux.



Ce code d’honneur a subi des influences, nous l’avons déjà annoncé. Dirons-nous tans pis ou parlerons-nous de menaces ? Peut-être les deux à la fois.



Menaces sur le patrimoine immatériel des femmes :
La vague de revendication féministe qui a secoué le monde à partir des années mille neuf cent soixante dix, s’est attelée à courir derrière l’égalité des sexes, dans une espèce de challenge à relever. Et la femme s’est vue affublée d’attributs du genre « dame de fer » dès l’instant où elle bousculait l’homme sur le terrain de la fermeté, voire de la force musclée ou même de l’apparence physique, jusqu’à le reléguer dans l’arrière cour d’une émasculation pitoyable et de faire de son pouvoir un infra pouvoir.



Tous ces mouvements atteignirent l’Afrique à travers sa frange intellectuelle formée à l’école occidentale. Un coagulant unit désormais toutes les femmes : le combat pour la libération des chaînes de l’oppression du mâle, brutalement apparu sur la scène comme l’ennemi historique à abattre. Les différences sont gommées. La femme cesse d’être plurielle ; elle devient un être collectif planétaire ; elle est une partout dans le monde, parle le même langage de solidarité transfrontalière, transcontinentale, transculturelle. La femme africaine subit, sans s’en rendre compte, déjà les contrecoups de la mondialisation. Vive l’ouverture !


L’allègement des tâches domestiques est devenu un secteur de revendication. Le développement de la technologie, mettant à la disposition des femmes l’équipement moderne, a assurément été une révolution, contribuant à leur soulagement. L’effritement et l’atomisation des familles ont accusé cette tendance à l’allègement. Qui plus est, le féminisme a inscrit dans son agenda le partage des responsabilités domestiques avec les hommes qui voient ainsi leur rôle se déplacer.


Dans le domaine de l’éducation des enfants, en plus des crèches, garderies et jardins d’enfants, tout un arsenal para technologique vient aider les mères et créer un facteur de différenciation sociale : laits dits maternisés, biberon, couches jetables, petits pots, landaus etc. Dans ce domaine-là également, l’éducation et la socialisation des enfants sont revues dans un cadre partenarial voire égalitaire avec l’homme.


De plus, les nounous, ou les « petites bonnes » des bébés, arrivent et élargissent le cercle familial ; elles travaillent elles aussi à plein temps tandis que Madame vaque à ses préoccupations orientées à remplir sa vie de femme épanouie entre bureaux et autres espaces de travail, salons de coiffure, ateliers de tailleurs, bijouteries, mariages, baptêmes sur les lieux desquels, la rivalité est sans pitié. C’est à qui paraitra le mieux, gratifiera le plus la cohorte des griots et griottes venues chanter les charmes, flatter les égo par le rappel des prestigieux arbres généalogiques. Vive l’allègement, que dis-je ? Vive la déresponsabilisation et la de responsabilité !
Mais si l’intellectuelle africaine s’inscrit dans ce mouvement d’émancipation, la grande majorité de ses soeurs bénéficient peu de ces avancées technologiques.


Par ailleurs, toutes les valeurs dont se parait la femme africaine, se dressent désormais comme autant de facteurs aliénants pour cette nouvelle catégorie de femmes. Plus question de se soumettre au mari. Plus question de s’effacer. Au contraire, il faut démontrer, publiquement si besoin, qu’on le domine. Plus question de se taire, encore moins de souffrir dans le silence. Adieu, bonnes vertus de grand-mère ! Et vive l’Affranchissement!


Cette nouvelle génération de femmes refuse de jouer son rôle de forçat, de pilier et de poubelle. Du coup, elle se trouve dépossédée de son rôle d’épicentre du système social, qui glisse subrepticement vers la petite bonne de la maison. Les relations belle-mère/belle-fille prennent un autre tournant. Elles deviennent conflictuelles. Ennemie public numéro un, les démêlés avec la « méchante belle-mère » agrémentent désormais les causeries de salon de la jeune femme émancipée, à telle enseigne que les relations belle-mère/belle-fille sont en train de devenir un cliché.


Face au bolide fait femme, les hommes résistent peu aux discours officiels mais se défendent tant qu’ils le peuvent, au sein de leurs foyers. La lutte des sexes se substitue à la lutte des classes. Beaucoup de couples se déchirent. Impréparés à un tel chamboulement, privés de vertus pour y faire face, les hommes perdent tout repère et certains croient trouver le correctif dans les remariages et la polygamie, pour corriger, prétendent-ils le plus souvent, leurs « méchantes femmes. » Mais les « méchantes femmes » s’accumulant, ils accumulent femme sur femme, soucis sur soucis, tracasseries sur tracasseries. Le foyer conjugal se transforme en chaudron de soupe pimentée. L’impréparation des jeunes couples, qui ont dans la plupart des cas, décidé de se marier à la faveur d’une rencontre aux résonnances de coups de foudre, sans se connaître plus amplement, sans que leurs familles se connaissent, accuse l’instabilité familiale si tant est vrai que le mariage, furu, c’est d’abord une affaire de responsabilités et de contraintes sociales dont l’amour kanu, si puissant soit-il, ne peut faire bon marché s’il veut rester solide. S’aimer à deux sans aimer la famille du mari et celle de son épouse, est difficilement gérable. Furu s’oppose bien à kanu dans leur essence.


Quid du rituel du mariage traditionnel, la retraite nuptiale de sept jours, avec le rôle important de la conseillère nuptiale, qui mérite d’être revisité, en tant que vecteur d’éducation et de socialisation du jeune couple et qui a été largué au musée des usages désuets par le féminisme des années 1970 ?
Et pourtant les femmes peuvent ré enchanter le Mali, l’Afrique et le monde.


Les femmes peuvent ré enchanter l’Afrique :


Les discours modernes sur l’émancipation, redevables des systèmes de valeurs importées, ont opacifié le rôle moteur de la femme africaine. Ils ont souvent souffert du délit d’impertinence et de simplicité. Notamment, ils n’ont pas suffisamment pris en compte la réalité de la culture, qui nous le savons, a comme caractéristique majeur l’entêtement et la forte capacité de résistance.


Aujourd’hui, des courants de pensée néo-maternistes, germés aux Etas Unis d’Amérique, propagés ensuite un peu partout en Europe notamment dans les pays scandinaves, prônent le retour à l’image de la femme-mère, femme au foyer, responsable de tout et de tous. Mais c’est la nature que ces courants, d’essence écolo-morale, replacent au cœur de la responsabilité féminine. La femme du XXIe siècle doit allaiter son bébé pendant de longs mois, travailler à temps partiel, rester à la maison, deux ans s’il le faut, pour couver, chouchouter, pouponner, pomponner, son rejeton. A bas le biberon ! Il existe même des hôpitaux dénommés « Hôpitaux amis du bébé » où l’on impose le « peau à peau ». On n’est pas l’amie de son bébé si on ne l’allaite pas.


Je pense que, face aux séismes qui nous secouent au point de nous ébranler dans nos certitudes les plus absolues, les femmes du Mali et d’Afrique peuvent ré enchanter en reconsidérant leur capital de vertus référencées. Je leur propose de le déterrer non pas dans un dessein de retour en arrière, mais de réappropriation.


Ensemble, avec la société entière, elles les reconsidéreront à l’aune des enjeux actuels car je crois à la fluctuation et à la relativité des valeurs en fonction des défis qui se posent à chaque génération d’hommes. On a beau être fervent défenseur des traditions ancestrales, on ne peut pas clamer dans le contexte d’aujourd’hui que se taire, s’effacer, souffrir dans le silence sont salutaires pour les femmes. Au contraire, je souscris à tout ce qui est défense des droits de la femme, d’abord en en tant qu’Etre humain, ensuite en tant qu’être privé de droits liés à son sexe. Cependant, je dis qu’il y a un esprit en l’air ; on peut le capter, cet esprit, je le sens, dans les vertus du compromis, de la patience, de la tolérance, de la souplesse, de l’humilité.



Il s’agit donc d’une ré appropriation, par les femmes, des valeurs qu’elles ont forgées au bout d’un long processus de socialisation forcé, devenu pli culturel au bout du souffle ; elles en tireront la quintessence, la sève salvatrice aussi bien pour elles-mêmes que pour l’ensemble de la communauté.


L’on ne devra pas perdre non plus de vue que nos sociétés sont traversées par des questions et des questionnements qui se posent ailleurs dans le monde. Connaître au mieux ces questions et les gérer sans mimétisme en tenant compte de nos propres réalités, là réside le défi.


Dores et déjà, nous savons que de nouveaux concepts, élaborés ou en cours d’élaboration, font désormais partie du dictionnaire de la problématique féminine et doivent être assimilés : le concept même de femme qui s’étend désormais à toute personne de sexe féminin, y compris la petite fille. Ce sont aussi, en plus de la promotion de la femme, des concepts d’équité, de parité, d’égalité des genres, d’approche selon le genre, ou encore, d’égalité, de participation, d’implication, de leader et son corollaire leadership, de discrimination positive ou d’autonomisation etc.



En retombant sur nos pieds maliens, le modèle féminin ne devrait-il pas être transfiguré en code de contribution à la renaissance de l’Afrique ? La femme ne devrait-elle pas réhabiliter le sein nourricier auquel tout le monde s’abreuve d’abord, pour apporter plus de bonté, plus de douceur, plus de compassion, plus de sagesse et reprendre en main le pouvoir d’éducatrice, de socialisation de ses enfants qui était le sien et dont sa spoliation a engendré des effets pervers !


Aussi, en jouant avec des artifices qui ont longtemps été les siens, elles revisiteront leur autorité sur leurs enfants et leurs hommes, les propulseront dans un contexte plus pacifié, plus élargi, dépassant le cadre étriqué des familles pour s’ouvrir à la société et au monde. En d’autres termes, le combat des femmes doit être redéfini dans une perspective démocratique qui n’a de but que de tendre vers la dignité et le bien-être de tous, femmes et hommes. Il contribuera, ce combat, à identifier les futurs possibles pour des initiatives citoyennes toujours plus probantes pour le devenir de notre destin collectif.


Pourquoi ne pas également injecter une dose de sacré dans la redéfinition de ce statut de la femme en tant que mère nourricière collective, généreuse ? L’un des effets collatéraux du triomphe de la raison a justement été le gommage du côté sacré qui régulait les relations humaines en Afrique. En effet, c’est parce que les mentalités étaient rituellement ancrées qu’elles ont été môle de résistance. Par exemple, quand une jeune fille se mariait, – c’est d’ailleurs toujours le cas – la femme de caste qui l’amenait dans son foyer conjugal était toujours chargée du message suivant adressé à la belle-mère et à toute la belle famille par les propres parents de la jeune femme : « nous vous confions cette enfant, nous vous demandons de la mettre entre votre chair et votre peau ; elle appartient désormais à votre famille. Nous ne voulons rien savoir la concernant ; toute sa gestion vous échoit, morte ou vivante.»


N’est-ce pas dans ce ressourcement réajusté que nous devrions éduquer nos filles, en insistant également sur les vertus du travail, valeur libératrice, valeur émancipatrice ?
Quant aux hommes, je voudrais leur faire passer le message comme quoi, une relation de couple doit se jouer comme une symphonie dans laquelle le dialogue, la communication occupent une place de choix.

Extrait de l’intervention de Mme Adame Ba Konaré sur le problématique féminine
(Hôtel Radisson le 8 mars 2010)

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