La route du Sahel va métamorphoser le visage des zones qu’elle traversera
Les travaux de construction de la route Tombouctou-Goma-coura reprendront au premier trimestre 2014. La confirmation en a été donnée par les responsables du ministère de l’Equipement et des Transports et ceux de la Cellule d’appui à l’ordonnateur du fonds européen de développement (CONFED) qui travaillent depuis plusieurs mois dans ce sens.
Les travaux de construction de la route Tombouctou-Goma-coura avaient été interrompus le 17 janvier 2012, le jour même de l’attaque par des bandits armés du camp militaire de Ménaka. Le coup d’Etat militaire de mars 2012 et l’insécurité qui a affecté la partie nord de notre pays dans laquelle se trouve la zone du projet ont contraint les entreprises à abandonner le chantier.
Avec le retour progressif de la paix et de la sécurité dans les sites du projet, les responsables du ministère en charge des routes et la CONFED ont repris langue avec aussi bien le bailleur le fonds qu’est l’Union européenne qu’avec les entreprises chargées de l’exécution des travaux.
Ces entreprises sont notamment la portugaise Zagope et la française Sogea-Satom. « Nous avons effectué plusieurs missions contradictoires d’évaluation non seulement sécuritaire, mais également des pertes enregistrées par les entreprises dans leur départ précipité », a expliqué un responsable de la Direction nationale des routes qui a indiqué que les entreprises ont subi de lourdes pertes en matériel et en équipements, pertes évaluées à plusieurs centaines de millions de F cfa. L’Etat a promis de dédommager les entreprises pour faciliter une reprise rapide des travaux. Il y a surtout de nombreux camions et des engins lourds que les entreprises n’ont pas pu évacuer, mais il ne faut pas oublier que les bases vie des entreprises ont également été entièrement détruites par les terroristes qui occupaient les lieux. Les missions d’évaluation ont permis de dresser l’état des matériel et équipements récupérables ou ne pouvant plus l’être.
« Nous avons souvent des divergences. Mais la volonté de chaque partie d’aboutir à la réalisation du projet a toujours prévalu », ont précisé les responsables de la Direction nationale des routes.
La valeur des pertes enregistrées par l’entreprise Sogea-Satom est estimée à près de 4,5 milliards de Fcfa, a précisé la CONFED qui a indiqué aussi que le matériel utilisable sera réparé et celui non récupérable sera renouvelé aux frais de l’Etat. « Plus de 750 personnes travaillaient sur le chantier qui avançait à un bon rythme. Aujourd’hui il faut gérer les conséquences de la démobilisation du personnel et de la perte du matériel. Car les assurances ne couvrent pas les situations de guerre », a indiqué le coordinateur du CONFED, Elly Prosper Arama.
80 MILLIARDS DE FCFA TOUJOURS DISPONIBLES. Dans le cadre du processus de rédémarrage du chantier, les parties ont élaboré un protocole d’accord qui va bientôt être signé. En outre, l’Etat est en train d’examiner les conditions d’indemnisation des pertes de l’entreprise Sogea-Satom chargée de l’exécution des travaux des lots 2 (Léré-Niafunké, 121 kilomètres) et 3 (Niafunké- Tombouctou et Diré-Goundam, 198 kilomètres). Dans la même logique, Sogea-Satom a soumis un plan de sécurisation de la zone du projet, plan en cours d’évaluation par les responsables des forces armées et de sécurité. L’Etat prendra en charge l’exécution de ce plan de sécurité en termes de personnel et de coût financier.
« Il reste encore beaucoup à faire. Mais je pense que la volonté les parties – notamment l’intérêt que l’Union européenne accorde au projet – permettra de surmonter les défis », a commenté le coordinateur du CONFED. L’entreprise portugaise Zagope aussi est prête à reprendre les travaux du lot 1 (Goma-coura-Léré long de 165 kilomètres). « Zagope avait demandé plusieurs milliards de F cfa de dommages et divers. Mais grâce aux négociations, cette somme a été revue à un peu plus d’un milliard de F cfa », a indiqué notre interlocuteur qui a salué le retour des partenaires techniques et financiers du Mali.
S’agissant du financement de la route, l’Union européenne a encore renouvelé sa confiance en notre pays. Les 80 milliards de Fcfa du 10ème Fonds européen de développement (FED) promis sont toujours disponibles pour financer l’ensemble des travaux. En outre, l’Union européenne a décidé de prendre en charge le surcoût des travaux à travers des avenants.
La construction de la route Tombouctou-Goma-coura sera réalisée en trois lots. Le premier concerne le tronçon Goma-coura-Léré long de 165 kilomètres. Celui-ci sera construit en 25 mois. Les travaux seront exécutés par l’entreprise Zagope pour un montant de 31,5 milliards de Fcfa. Le second lot concerne le tronçon Léré-Niafunké long de 121 kilomètres. Ces travaux vont coûter 22 milliards de Fcfa et seront exécutés par l’entreprise Sogea-Satom en 25 mois. La troisième tranche porte sur le tronçon le Niafunké- Tombouctou et Diré-Goundam long de 198 kilomètres. Les travaux seront exécutés également par l’entreprise Sogea-Satom, pour un montant de 20,5 milliards de Fcfa et un délai d’exécution de 24 mois.
DEUXIÈME PLUS LONGUE DES ROUTES NATIONALES. La route sera construite suivant les normes internationales. Les travaux prévoient deux types d’aménagement. Ainsi le tronçon Goma-coura-Tonka qui englobe les lots 1 et 2 et une partie du lot 3 aura une plate forme de 10 mètres. La largeur de la chaussée sera de 7 mètres tandis que la largeur du revêtement sera de 9,30 mètres. Les travaux consisteront en l’élargissement de la plate-forme, son revêtement en enduit superficiel bicouche en rase campagne et tri-couche à la traversée des agglomérations. 319 dalots dont 158 sur le lot 1, 106 sur le lot 2 et 55 sur le lot 3 vont être construits sur ce tronçon. Quant au tronçon Tonka-Tombouctou et Goundam-Diré qui englobe le lot 3, il avait fait l’objet d’aménagement en 2004. Les travaux permettront de réaliser une plate-forme de 8,60 mètres et une chaussée de 7 mètres. La largeur de son revêtement sera de 8 mètres. Ce tronçon sera également revêtu en enduit superficiel en rase campagne et tri-couche à la traversée des agglomérations.
La route Tombouctou-Goma-coura va relier la Région de Tombouctou à celles de Mopti et Ségou par le bitume en offrant toutes les commodités de circulation et de sécurité. Le lancement des travaux de cette gigantesque infrastructure longue de 484 kilomètres avait été effectué en novembre 2010 par l’ancien président de la République, Amadou Toumani Touré, pour un délai d’exécution cumulé d’environ 50 mois pour l’ensemble des travaux.
La route Tombouctou-Goma-coura appelée aussi la route du Sahel va traverser plusieurs villes et localités notamment Niafunké, Léré, Tonka, Diré ou encore Goundam qui sera relié dans le même cadre à Diré par une bretelle. Elle est le dernier volet du projet de construction de la route Niono-Goma Coura-Tombouctou et s’inscrit dans le cadre la politique de désenclavement intérieur et extérieur du pays. Elle permettra du coup de relier par une voie digne de ce nom la Région de Ségou, zone de production agricole par excellence, à celle de Tombouctou.
Autre avantage : avec la construction du tronçon Niono-Goma-coura, la route va également mettre fin aux longues heures d’attente pour la traversée du fleuve par bac. Car elle permet d’accéder directement à la ville de Tombouctou sans traverser le fleuve. La réalisation permettra également de faire baisser la pression sur « La Route de l’espoir » qui connaît une forte dégradation causée par la densité du trafic qu’elle subit.
La route Niono-Tombouctou va désenclaver une trentaine d’agglomérations qui vont également bénéficier de 12 forages équipés de pompes manuelles. Elle permettra de développer les potentialités du Delta du Niger, de renforcer la compétitivité et l’intégration des Régions concernées, et d’améliorer le secteur du transport de cette partie du pays.
La réalisation ouvre une autre étape. Outre cette route, elle va contribuer à la réalisation de l’axe transsaharien Bourem-Kidal et Bourem Gao. La construction de ces voies s’inscrit dans la mise en œuvre des actions pour développement des régions Nord. Elle permettra une meilleure intégration des régions du Nord au reste du pays contribuant ainsi au développement économique et social, à travers le renforcement de la sécurité.
Le présent projet s’inscrit dans le désenclavement intérieur des régions sahéliennes identifiées comme extrêmement déshéritées et dépourvues d’infrastructures de base indispensables à toute promotion du développement. Cette route est la plus longue des routes nationales après la nationale 40 qui relie Tombouctou à la Mauritanie sur une distance de 1022 kilomètres.
Elle est également le plus grand investissement routier de l’Union européenne en Afrique de l’ouest. Notons que les appuis de l’Union européenne ont permis à notre pays de réaliser en dix ans plus 1400 kilomètres de routes bitumées. Une performance révélatrice de l’importance du problème de désenclavement dans notre pays.
Be. COULIBALY
NIONO-GOMA-COURA AUSSI
C’est l’entreprise Sogea-Satom qui va également exécuter les travaux de construction de la route Niono-Goma-coura pour un coût estimé à 15,6 milliards de F cfa. Avec ses 81 kilomètres, Niono-Goma Coura est le premier segment de la Route nationale 33 qui va de Niono à Tombouctou en passant par Nampala, Niafunké, Tonka, Diré et Goundam sur une distance totale de 565 kilomètres.
Bien avant la crise sécuritaire et politique qui a affecté notre pays en 2012, l’exécution des travaux de construction de la route Niono-Goma-coura a connu plusieurs problèmes qui ont obligé l’administration à résilier en 2010 le marché initial. Les travaux ont été confiés à Sogea-Satom qui a été par la suite contraint d’abandonner le chantier pour des raisons sécuritaires. « Nous avons renoué le dialogue avec l’entreprise et l’Union européenne qui finance les travaux. Tout est en bonne voie pour la reprise des travaux », nous a-t-on confié à la CONFED.
Les travaux consistent en la réalisation d’une route bitumée à deux voies de 10 mètres de largeur comprenant une chaussée de 7 mètres de largeur et deux accotements de 1,5 mètre de largeur chacun. La structure de la chaussée est constituée d’une couche de fondation et d’une couche de base renforcée pour le trafic prévu sur 15 ans par des couches supplémentaires de latérite. Une bretelle de 2 kilomètres sera construite pour relier le village de Dogofri au périmètre irrigué d’Alatona.