“Ma maison fut envahie par un groupe de militaires dont des bérets rouges, dont Abédine Guindo”... c’est “le même Ministre de la Défense, Soumeylou Boubèye, (qui) est à la base des derniers évènements survenus à Kati. C’est lui qui a appelé les gens à se révolter”... “C’est le même Ministre qui a dit au président que je refuse (d’aller chez le juge)”.... “Rfi à longtemps diffusé que j’ai refusé de me rendre au tribunal. Celui qui le disait s’appelle Serge Daniel. Appelez-ce Serge Daniel et dites lui qu’il m’a dit de bouche à bouche chez moi qu’il n’a rien obtenu avec nous pendant la transition et qu’il ne peut rien dire de bon, de potable sur nous”.
Un “speech” (prononcez: sipitch”), vous connaissez? C’est tout simplement un petit discours presque improvisé en anglais. C’est un “speech” que le Général Amadou Haya Sanogo a préparé sur les circonstances de son arrestation et qu’il a fait “courrir” par ses propores moyens. il ne s’agit donc pas d’une interview, ni d’un entretien avec un journaliste. Le brûlot est distribué sous cape à Bamako, de téléphone cellulaire à téléphone cellulaire. “Nouvel Horizon” a obtenu copie de ce “speech” sonore et est convaincu qu’il s’agit bien de la voix du général Sanogo.
Les propos tenus par le général Amadou Haya Sanogo sont d’importance et doivent être versés au dossier. Le rôle du “Nouvel Horizon” n’étant ni de dire que Sanogo est coupable, ni d’affirmer qu’il ne l’est pas, nous sommes donc dans notre rôle de lui donner la parole même si on le condamnait à mort demain. Nous avons donc transcrit, fidèlement, les propos de l’accusé et nous vous les proposons. Lisez plutôt.
"Mes chers compatriotes, maliennes et maliens de l’intérieur comme de l’extérieur, je vous salue tous, bonjour, bonsoir. C’est moi le Général Amadou Haya Sanogo qui vous parle. Si j’ai décidé aujourd’hui de vous transmettre ces paroles, c’est pour vous dire que rien ne vaut le pays. Je ne vous parle pas aujourd’hui en tant que général, parce que le Gouvernement lui-même l’a démontré. Même l’autre jour où ils ont lu un communiqué me concernant, ils n’ont pas parlé de Général Amadou Haya Sanogo. Ils ont bien précisé Monsieur Amadou Haya Sanogo. Donc, c’est M. Amadou Haya Sanogo qui vous parle. Écoutez-moi bien.
Premièrement, dans cette affaire là, le président de la République Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK) et moi-même ont été trahis. Les ennemis du pays, ceux qui détruisent ce pays ont créé et orchestré de toutes pièces un mensonge d’État en induisant le président de la République dans l’erreur, en le poussant à prendre une décision. De ce fait, ils l’ont trahi et ils m’ont trahi aussi, mais les deux trahisons n’ont pas la même nature.
Trahir aujourd’hui IBK, c’est affaiblir son pouvoir pour mettre fin à son règne plus tard.
Pour ce qui me concerne, leur objectif est de m’assassiner. Le premier exemple le plus proche, ils ont fait circuler que le Général Sanogo refuse d’aller au tribunal. Mais je dis qu’il n’y a pas d’homme, il n’y a pas de femme, de jeune, de vielle personne, de juge qui est venu me dire : “tiens voici la convocation chez le juge tel jour”. Il n’ ya aucune personne qui m’a informé de me rendre chez le juge tel jour.
Comme Dieu fait bien les choses, à la veille de mon interpellation le mercredi 27 novembre 2013, le mardi matin vers 10 heures, il y a un garde qui s’est présenté à mon domicile avec un courrier que mon secrétaire a enregistré dans le cahier avec toutes les références. Le papier qui se trouve dans l’enveloppe est signé du Ministre de la Défense, Soumeylou Boubèye Maïga, et non le Procureur de la République ou le Ministre de la Justice ou même le juge d’instruction qui devrait m’interroger.
Sur le champ, j’ai immédiatement appelé mon avocat pour lui demander: “Est-ce que là où je suis aujourd’hui, je dois être convoqué de cette façon ?”
À chaud, nous avons écrit au Ministre, il l’a reçu. Nous avons également écrit au chef d’État-major particulier du président de la République, au contentieux de l’État, au directeur général de la gendarmerie. J’ai dis à tous ceux-ci que j’ai reçu mon papier de convocation et que je ne refuse pas de me rendre au tribunal. Mais je voudrais comprendre est-ce le juge chez qui je dois me rendre est compétent pour me recevoir ? Je n’ai pas eu de réponse à cette interrogation, aucun d’eux n’a répondu à mon courrier.
Le mercredi matin, à ma grande surprise, personne n’est venue me dire qu’ils vont m’amener de force parce que j’ai refusé de me rendre au tribunal. J’ai appelé le Directeur de l’Institut, le Colonel Modibo, il est encore vivant, il m’a rejoint à mon domicile le matin, il m’a dit qu’on se rende ensemble chez le juge. Je lui ai dit que je suis là avec mon escorte qui m’accompagnera chez le juge, puisqu’il s’agit de traverser la ville de Bamako, après nous allons retourner. Mon avocat est là il peut confirmer mes propres, il n’est pas mort.
À notre surprise, ma maison fut envahi par un groupe de militaires dont des bérets rouges, dont Abédine Guindo particulièrement qui a quitté la prison l’autre jour parce qu’il serait malade. Abédine, habillé en tenu militaire, est venu remercier les gens pour le travail qu’ils viennent d’accomplir.
Ils sont rentrés chez moi me demandant de les suivre. J’ai pris mon véhicule 4x4, mon chauffeur, mon aide de camp et mon avocat. Ils m’ont dit de sortir de mon véhicule 4x4 pour rentrer dans le coffre d’un autre véhicule militaire et j’ai agi selon leur gré. J’ai ordonné à tous mes éléments de tout faire pour qu’il n’y ait pas de bruit, de ne tirer aucun coup de feu parce que cette affaire n’est plus une affaire de justice, tribunal, mais autre chose.
Tenez bien, vous avez donné la convocation le mardi à une personne, elle ne vous a pas dit qu’elle n’ira pas au tribunal, vous envahissez son domicile par des groupes de militaires. Le nombre de militaires, qui sont rentrés chez moi, est beaucoup plus nombreux que ceux qui sont à Kidal aujourd’hui : des gens du bataillon para et autre. Mais cela ne m’a pas offusqué. Quand l’arbre tombe, les chèvres vont monter là-dessus. Sinon moi je sais qui est qui, on se connaît entre nous.
Maintenant, laissons cela de côté. Comment tout cela a commencé ? Le même Ministre de la Défense, Soumeylou Boubèye, est à la base des derniers évènements survenus à Kati. C’est lui qui a appelé les gens à se révolter. Après ces évènements, puisqu’à Kati il y a eu beaucoup de révoltes, d’incidents à Kati, on dit Général Sanogo, Général Sanogo, j’ai dit je vais quitter Kati pour venir à Bamako. Comme ça, si un militaire commet des bêtises, il ne sera pas dit que c’est le Général Sanogo qui lui a ordonné de faire. Ce jour là, j’ai également dit à tous les militaires de Kati de ne pas tirer.
En quittant Kati pour Bamako, c’est le même Ministre de la Défense qui a déterminé et signé le nombre de militaires auxquels j’ai droit pour ma garde rapprochée, pour ma sécurité. Deux jours après mon arrivée à Bamako, le même Boubèye a signé un autre papier pour renvoyer à leurs unités tous ces militaires chargés de ma sécurité me laissant seul à mon sort. Est-ce que moi, je mérite cela ?
Depuis ce jour, j’ai senti qu’une trahison se trame contre moi. C’est le même Ministre qui a dit au président que je refuse.
Maintenant, la presse a pris le relais. Rfi à longtemps diffusé que j’ai refusé de me rendre au tribunal. Celui qui le disait s’appelle Serge Daniel. Appelez-ce Serge Daniel et dites lui qu’il m’a dit de bouche à bouche chez moi qu’il n’a rien obtenu avec nous pendant la transition et qu’il ne peut rien dire de bon, de potable sur nous. Qu’il montre la preuve s’il a vu une seule convocation d’un juge de Bamako me concernant et que j’ai refusé de répondre à ladite convocation.
Héyi ! Qu’ils ne soient pas la cause de la ruine de ce pays. Ne laissez pas ces gens là détruire le pays. Ceux qui ont détruit le pays sont connus. Ils sont allés tromper le président de la République. Après les élections, moi le même Sanogo ai sillonné tout le pays pour appeler les gens à soutenir les actions du président de la République. Je suis entré dans toutes les grandes familles de Bamako pour dire aux notables de soutenir le vieux (IBK) dans ses actions. Je ne serai pas le premier qui va dire non au président de la République, jusqu’à la fin du monde.
Malgré tout cela, ils sont allés lui dire que c’est moi qui refuse ! Alors que cela n’est pas vrai. Donc si on regarde bien cette affaire, je veux que les gens sachent raison garder. IBK est notre président, c’est nous qui l’avions choisi parce que nous l’aimons. Mais les mêmes qui l’ont induit dans l’erreur sont les mêmes gens qui ont trahi moi général Sanogo.
L’autre jour, quand ils m’ont interpellé, ce qu’ils cherchaient chez moi est très simple: ils sont venus pour m’assassiner. Si mes gens avaient bougé d’un pas ou s’ils résistaient un tout petit peu, ça allait être le carnage. Ils allaient assassiner tout le monde chez moi pour dire après que nous avons résisté et que nous sommes tous morts malheureusement. Mais Dieu n’a pas voulu cela et je prie pour que nous ne soyons pas des martyrs d’une trahison. Pensez toujours à ce pays.
Après, ce que je veux dire aux militaires, c’est que la patrie a besoin de nous réunis. N’acceptez jamais d’être divisés du fait des combines d’un seul homme mal intentionné. Réunissez-vous et préparez-vous au service de la nation au nom du président de la République.
Il (Soumeylou Boubèye Maïga) a pu convaincre certains militaires dont je veux taire le nom aujourd’hui. Ne soyez pas bernés par un seul homme. Les Maliens vont comprendre dans les jours à venir. Faire arrêter quelqu’un n’est pas le travail d’un militaire. Ce sont les militaires à la solde de Boubèye qui ont dirigé l’opération contre moi, je n’ai jamais reçu une convocation, je n’ai jamais refusé de répondre à une convocation. Voilà ce que je voudrais vous dire aujourd’hui.
N’échangez pas ce pays pour rien au monde. Le jour où nous-même serons la cause et acceptons de détruire ce pays, ce jour là, nos ennemis vont rire largement. J’ai l’habitude de dire que certains dirigeants de ce pays sont des apatrides, ils ne sont pas des maliens. Un vrai malien n’acceptera pas de trahir son pays, le conseiller du président de la République n’acceptera pas de l’induire dans l’erreur, de lui montrer le mauvais chemin.
Je le répète, moi je suis un militaire, je suis un Général ; mais je ne parle pas aujourd’hui en tant que général. Comme le Gouvernement lui-même l’a démontré que c’est Monsieur Amadou Haya Sanogo qui est traduit, donc c’est Monsieur Amadou Haya Sanogo qui vous parle. La trahison là est profonde, le tribunal est la partie visible, la partie la plus simple et facile, aujourd’hui Dieu merci, Allhamdoulillah.
Le jour où ils sont allés chez moi, ils étaient venus pour m’assassiner, c’est Dieu qui n’a pas donné mon âme à ceux qui sont venus m’assassiner et Dieu ne peut pas donner mon âme à mes ennemis. Sali ala wa Salam. Aw ni tiè aw ka Tolomadjò la.”
Propos transcrits par la Rédaction du Nouvel Horizon
Inculpation du général Amadou Haya Sanogo : Les proches des victimes contre toute forme d’injustice
Pour mettre en garde contre toute forme d’injustice dans l’inculpation du général Amadou Haya Sanogo, “pour meurtres et assassinats et complicité de meurtres et assassinats”, et rappeler leur soutien aux plus hautes autorités à travers le Ministère de la Justice, Garde des Sceaux, afin que triomphe la vérité dans cette affaire, des proches des victimes ont rencontré la presse.
Pour cesdits proches, “le Mali est un État de droit, et nul n’est au-dessus de la loi, et nul ne doit se rendre justice soi-même. Donc dans l’affaire des bérets rouges du 30 avril au 1er mai 2012 (il s’agit des évènements du contre coup d’État) et celle de la mutinerie du 30 septembre dernier, le Général Amadou Haya Sanogo ne devait pas se rendre justice lui-même à travers des meurtres et assassinats et complicité de meurtres et assassinats. Quelque soit le pouvoir d’un homme, il appartient à la justice de faire son travail”.
Un autre proche des victimes ajoute que “certaines personnes se croyaient intouchables au Mali. Mais une chose est sûre et certaine, cette affaire Sanogo n’est que le début du commencement”.
Ces proches des victimes comptent sur le président Ibrahim Boubacar Keïta, parce qu’il est un homme de poigne capable de combattre toute forme d’injustice et d’impunité au Mali, pour que l’affaire Amadou Haya Sanogo soit menée jusqu’au bout.
Certains ont précisé qu’ils mettront en place tous les moyens à la limite de leur possibilité pour accompagner les plus hautes autorités pour le rayonnement de la vérité et toute la vérité dans cette affaire.
Depuis le mercredi 27 novembre dernier, l’ex-chef de la junte militaire de Kati, le Général Amadou Haya Sanogo, est inculpé par la justice malienne pour meurtres et assassinats et complicité de meurtres et assassinats. Ce, après avoir été conduit manu-militari devant le juge d’instruction Yaya Karembé, en charge du dossier, à la suite d’une série de refus de sa part de répondre aux différentes citations de la justice.
A ce jour, de nombreuses organisations et associations de défense des droits de l’homme se sont portées partie civile contre l’inculpé et exigent à ce que toute la lumière soit faite dans cette affaire.
Tougouna A. TRAORÉ