Mercredi dernier aux environs de dix heures précises, une colonne de véhicules militaires « TOYOTA » équipés de mitrailleuses, boucle la « Base B » où résidait le Général Amadou Aya Sanogo, ex chef du CNRDRE. Cette irruption des « Damiers » qui sont venus appuyer les forces spéciales de la Sécurité d’Etat (SE), composée comme d’habitude selon nos informations, à majorité d’éléments des bérets rouges et de la Gendarmerie nationale, avait un seul but : arrêter le Général quatre étoiles, Sanogo pour dit-on « son refus » de répondre à une convocation de la justice malienne afin qu’il s’explique sur les disparitions de bérets rouges lors du contre coup du 30 septembre 2012 et la mutinerie du 30 septembre dernier. Et ce matin du mercredi, le Général Sanogo, a été arrêté puis conduit au camp 1 de la Gendarmerie pour être entendu par les limiers qui l’attendaient pour ce faire. Récit d’une arrestation qui rend le supposé « bourreau, une victime » et qui provoque des grincements de dents au sein de la grande muette qui ne comprend pas l’humiliation qui vient d’être infligée à des leurs et qui est considérée comme un affront.
Depuis quelques jours, le Front du refus (FDR) et ses alliés n’arrêtent pas de mettre la pression sur le jeune régime d’Ibrahim Boubacar Kéïta afin qu’il arrête le Général Amadou Aya Sanogo qui est accusé de « séquestration, d’enlèvements, d’assassinats, disparitions… ». En réalité, ils n’avaient jamais baissé la garde. Et pour cause !
Chasse aux sorcières
Enfin, cette pression qui ressemble tout de même à « une véritable chasse aux sorcières, remarque un observateur avisé et l’entourage du Général Sanogo, a permis de mettre aux arrêts, celui-ci, devenu l’ennemi public numéro UN à abattre du FDR et leurs semblables. Son seul crime, explique un proche, est d’avoir balayé le régime du Général ATT « pendant qu’au même moment, un proche collaborateur de celui-ci est libéré, en l’occurrence le Colonel Abidine Guindo au nom d’une pseudo réconciliation de l’Armée, l’argumentaire trouvé par les détracteurs du régime d’IBK », matèle-t-on ça et là. Pour les supporteurs du Général Sanogo, la présence de bérets rouges et la manière dont le département de la Défense et des Anciens Combattants mène cette affaire, n’est autre qu’un règlement de comptes du RCP appuyé par leurs alliés politiques du FDR. « Si cela se confirmait, les choses risquent de prendre une autre tournure » a averti un haut gradé. Pour notre interlocuteur : « C’est la première fois dans l’armée qu’un Officier supérieur soit humilié de la sorte. Ce n’est pas normal que le Général Sanogo soit traité de la sorte. Ceci est un affront pour notre armée », a laissé entendre l’Officier.
En guise de rappel, c’est la première fois qu’un béret rouge soit nommé Chef d’Etat Major des Armées du Mali. Comme d’habitude précisent nos sources, c’est toujours un béret vert ou bleu. « Allez savoir pourquoi ?, s’interroge un soldat furieux.
Présence du Colonel Abidine Guindo
Lors de l’arrestation du Général Sanogo, la surprise est la présence parmi les forces spéciales de la SE, de bérets rouges et de leur chef, Colonel Abidine Guindo. « Une façon de se moquer de moi » a laissé entendre le Général Sanogo sur les antennes de la radio « Niètaa », dans la soirée de samedi dernier. « J’ai été invité à prendre place dans le coffre de la V8 et non dans mon véhicule», a expliqué l’ex homme fort de Kati.
Des questions sans réponse
De nombreuses questions demeurent sans réponse. Et pour cause, à qui profite l’arrestation du Général Sanogo qui ressemble fort bien à une tentative de déstabilisation du régime d’IBK?
Pour quoi le Colonel Abidine Guindo n’est pas aussi arrêté puisqu’il a aussi tenté un contre coup le 30 avril 2012, une action qui est condamnée par notre Constitution?
Quand est-il des morts civiles et militaires occasionnés par les bérets rouges lors de leur opération du 30 avril 2012 au sein des bérets verts à Kati, bérets bleus à Sénou, au GMS, à l’ORTM et à l’aéroport de Bamako-Sénou ?
Pour quoi ne parle-t-on par de cela lors que l’on sait que ce sont eux qui ont attaqué les positions des forces armées et de défense du Mali dans la capitale avec son corolaire de victimes et de dégâts?
Cette unité créée par le Général Moussa Traoré, vaut-elle mieux que les autres corps de l’armée ? Que vaut-elle réellement dans les missions de la grande muette ?
Quand est-il des bourreaux de nos militaires à Aguel’Hoc, Abeïbara, Ménaka ou Kidal ?
Enfin, pour quoi arrêter le Général Sanogo maintenant, pour quoi pas attendre après le second tour des législatives ? Le Président IBK était-il bien informé sur ce dossier sulfureux ? Wait and see !
Une trahison d’IBK ?
De l’avis général, cette arrestation qui est de nos jours interprétée par les citoyens, comme une « trahison » du locataire de Koulouba vis-à-vis de celui qui, avec son équipe, l’a aidé lors de la présidentielle dernière, à devenir Président de la République. En tout cas, l’indignation a pris la place à la retenue.
« Si le régime ne prend pas garde, l’arrestation du Général Sanogo risque de bien jouer sur le parti RPM qui est en ballotage lors du second tour des législatives et même sur sa crédibilité», remarque-t-on ça et là.
Aya, une victime…
L’arrestation du Général Sanogo, a été comme une onde de choc puisqu’elle a surpris le citoyen lambda qui crie au complot et martèle à la victimisation de celui qui est considéré comme un sauveur au même titre qu’IBK l’a été sous les règnes d’AOK et d’ATT.
En tout cas, l’arrestation de Sanogo, a crée une vague de soutien que le pouvoir tente d’étouffer, comme le dimanche dernier à Bamako, Kati et lundi dernier. « Il faut craindre que les autres corps de l’armée ne se joigne au mouvement du fait de la façon jugée incorrecte de l’arrestation du jeune Général Sanogo, qui ne devait pas accepter ce grade, cet autre cadeau empoisonné de Dioncounda Traoré », a lancé un ancien combattant.
Le Général et la troupe
L’arrestation du Général Sanogo mercredi dernier, n’a pas suscité jusqu’au moment où nous bouclons cette édition, au sein de la grande muette, un élan de solidarité réelle du fait des erreurs et fautes qu’il a commises. Quand même, ça chuchote. La dernière faute grave qu’il a commise qui est interprétée par les observateurs avisés et ses adversaires, comme la goutte d‘eau qui a débordé le vase, est la gestion de la mutinerie du 30 septembre dernier qui a vu des militaires exécutés, d’autres disparus. Mieux, beaucoup d’éléments ont pris leur distance avec le Général Sanogo et son équipe le fait qu’ils n’ont pas voulu respecter les engagements tenus au matin du 22 mars 2012 et pire, l’homme et ses camarades ont dévié ; ce qui a plongé le Mali dans la situation actuelle. Aussi, les rapports avec le régime de transition, avec le Premier Ministre Dr Cheick Modibo Diarra, tout comme Diango Cissoko, n’étaient pas des plus normaux.
Sanogo ne pouvait pas voir ce coup venir…
« Ce qui vient d’arriver au Général Sanogo, était prévisible car, l’homme ne pouvait pas voir le coup venir puisque très mal entouré et avait pris goût à l’argent, au matériel et au pouvoir. Sinon, la nomination de Soumeylou Boubèye Maïga à la Défense et aux Anciens Combattants, devait sonner l’alerte. Sachez qu’un Chef est prévisible. Il ne se laisse pas surprendre de la sorte. Mieux, sachant que son pouvoir était agonisant, pourquoi n’a-t-il pas écouté ses frères d’armes que d’agir comme il lui est reproché des disparitions, des exécutions sommaires à partir du 30 septembre 2013 ? En réalité, Sanogo a saboté notre révolution et se prenait pour un intouchable oubliant du coup comment il a été fait chef du CNRDRE ? Que d’espoirs et attentes ont été brisés en un temps record», remarque un Sous Officier qui a requit l’anonymat.
Cette autre haut gradé n’arrive pas à digérer selon elle : « la déviation faite du putsch mais n’apprécie pas du tout, la manière dont leur chef a été interpelé».
Arrestation de Sanogo, un pied de nez au peuple…
Qu’à cela ne tienne, pour nombre de citoyens, son arrestation est un pied de nez au peuple qui a vu en son coup d’état, un soulagement qui a évité au Mali, la guerre civile. Donc le héros du 22 mars 2012, devient l’homme à abattre du FDR et autres nostalgiques des régimes AOK et ATT. Mais le moment choisi, fait de lui une victime que les citoyens tentent de défendre par des marches, des points de presse malgré les menaces et arrestations.
Une façon de nous divertir
« Il reste à savoir si la solidarité réclamée par Sanogo à travers son appel sur la radio « Niètaa » samedi dernier et qui est relayé en boucle par les réseaux sociaux, sera entendu, car il s‘agit de sauver le Mali qui est en passe de devenir une énième province française », indique un fin connaisseur du dossier Mali. « Et c’est là où le cas Sanogo, est une goutte d‘eau dans l’océan », nous confie un leader de la société civile. « Cette affaire est une façon de divertir le peuple malien au moment où le MNLA déclare la guerre à notre armée au nord au nez et à la barbe de SERVAL et de la MINUSMA», explique un ressortissant du septentrion.
Chasse aux sorcières
« C’est une chasse aux sorcières qui vient d’être engagée », martèle un proche du Général Sanogo. « Ceci ne nous ébranlera pas », a-t-il poursuivi. « Le vrai combat, c’est sauver le Mali, le débarrasser des prédateurs et de leurs mentors », a conclu notre interlocuteur. « La grosse bourde du département de la Défense, demeure la présence des bérets rouges sur les lieux de l’arrestation du Général Sanogo. Ceux-ci ne sont qu’une unité dans l’armée mais que nos politiques veulent faire planer au-dessus des autres corps. En guise de rappel, ces bérets rouges viennent des bérets verts et ne sauraient être incontournable», explique un spécialiste. En tout cas, la réconciliation prônée par les nouvelles autorités, risque de prendre du plomb dans l’aile, si les bérets rouges (une unité) sont choyés au détriment des autres corps de l’armée. « C’est une faute à ne pas commettre », poursuit notre spécialiste de l’armée.
Elan de solidarité !!!
Comme on le voit, à l’allure où évolue l’affaire Sanogo, il devient de plus en plus, une victime aux yeux des maliens. Un fait que les maliens condamnent et sont solidaires comme ce fut le cas d’IBK. Il faut craindre dans les jours à venir que l’élan de solidarité en faveur du Général Sanogo, ne prenne de l’ampleur comme Paul Kagamé (Rwanda) ou Jerry John Rawlings du Ghana où le peuple a manifesté sa colère.
Pour le moment, les pouvoirs tentent de contenir les marches et autres protestations. Pour combien de temps cela va durer car, les rancœurs se ravivent de jour en jour déjà depuis la prise de fonction d’IBK où les citoyens attendent des décisions concrètes qui tardent.
Wait and see !
Bokari Dicko