Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a estimé jeudi que l`usage de la force dans le nord du Mali était probable "à un moment ou à un autre" et que, pour Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et ses alliés, la France était "l`ennemi principal".
M. Fabius a expliqué qu`au Mali, il fallait "essayer de rétablir la légalité constitutionnelle au sud", évoquant les "efforts de la Communauté économique des Etats d`Afrique de l`Ouest (Cédéao) et de l`Union africaine (UA), appuyés maintenant par une résolution (du Conseil de sécurité) de l`ONU (...) pour faire qu`il y ait un gouvernement inclusif, pour que la junte soit
mise hors-la-loi".
"Ensuite, à partir du moment où la légalité sera rétablie au sud, il faut s`intéresser au nord, c`est-à-dire qu`à un moment ou à un autre, il est probable qu`il y aura utilisation de la force", a estimé le chef de la diplomatie française. Il a précisé qu`une telle intervention serait menée par des Africains avec un soutien international.
"La France pour des raisons évidentes ne peut pas être en première ligne" d`une éventuelle intervention militaire, a poursuivi M. Fabius, mettant en avant "le risque d`une réaction contre le colonisateur". La France a été la puissance coloniale dans la plupart des Etats de la région.
Le Conseil de sécurité de l`ONU a, dans une résolution adoptée la semaine dernière, appelé à des sanctions contre les rebelles du nord du Mali qui s`allieraient à Al-Qaïda.
La résolution "soutient pleinement" les efforts des organisations régionales, dont la Cédéao et l`UA pour régler la crise au Mali. Mais elle ne leur donne pas encore de mandat de l`ONU pour déployer une force africaine contre les rebelles qui contrôlent le nord.
Le Conseil se contente "de se déclarer prêt à examiner plus avant cette requête une fois que des informations supplémentaires auront été fournies en ce qui concerne les objectifs, les moyens et les modalités du déploiement envisagé".
La Cédéao prépare depuis plusieurs semaines l`envoi éventuel d`une force au Mali, dont l`effectif est actuellement fixé à quelque 3.300 hommes. Ses dirigeants ont appelé le Conseil de sécurité à "accélérer" l`adoption d`une résolution autorisant formellement son déploiement.
"Le Mali, c`est une affaire extrêmement grave, car c`est la première fois que des terroristes se greffent sur des villes importantes et sont peut-être en situation de se greffer sur un Etat", a souligné M. Fabius.
Evoquant par ailleurs les six otages français détenus au Sahel par Aqmi, le ministre a déclaré penser qu`ils étaient vivants mais séparés.
"Nous avons toutes les raisons de penser qu`ils sont en vie", a-t-il dit. Interrogé pour savoir s`ils étaient détenus ensemble, il a répondu par la négative.
Quatre des otages, des employés du groupe nucléaire public Areva et de son sous-traitant Satom, ont été enlevés le 16 septembre 2010 à Arlit dans le nord du Niger, avec trois autres personnes, libérées depuis.
Deux autres ont été kidnappés le 24 novembre 2011 par des hommes armés dans
leur hôtel à Hombori (nord du Mali) et emmenés vers une destination inconnue.
A la faveur d`un coup d`Etat à Bamako, le nord du Mali est tombé fin mars aux mains des rebelles touareg du Mouvement national de libération de l`Azawad (MNLA) et surtout des groupes islamistes Ansar Dine et Mouvement pour l`unicité et le jihad en Afrique de l`Ouest (Mujao) et de leur allié Aqmi. Les islamistes ont chassé mercredi le MNLA de son dernier bastion et sont désormais les maîtres de toutes les grandes villes du nord du pays.