Comme s’il était médiateur dans la crise malienne pour gagner un quelconque prix ou bénéficier de dividendes particulières, les contempteurs du président Blaise Compaoré disent déjà qu’il a échoué dans son rôle au Mali. En quoi a-t-il échoué ? S’il y a échec, ce sont plutôt les Maliens qui auront échoué dans la résolution d’une crise dont ils sont non seulement les premiers concernés, mais les principaux bénéficiaires. Dans tous les cas, que ce soit les Maliens, les Burkinabè, les Ivoiriens, les Nigériens, les Mauritaniens, les Algériens (les ressortissants de la CEDEAO) de l’Union du Maghreb arabe (UMA), les Français ou les Italiens, nous avons tous intérêt à ce que la médiation au Mali aboutisse et qu’elle permette à ce pays frère (sur tous les plans) de retrouver sa stabilité, son intégrité afin d’envisager son développement.
Le Premier ministre malien par intérim Cheikh Modibo Diarra (g) en visite au Burkina Faso le 22 juin 2012 / AFP
La situation actuelle du Mali est bien comparable à la même crise que la Côte d’Ivoire a connue dix ans durant. Nous en avons tous souffert, d’une manière ou d’une autre. Si bien que se préoccuper de la situation du Mali est une toute autre manière de s’occuper des problèmes des Burkinabè. La toute petite preuve est que lorsque « ça a pété » au Mali, les frontières du Burkina sont envahies depuis lors par des réfugiés auxquelles il fallait chercher asile. Bobo-Dioulasso accueille en ce moment un important contingent de réfugiés. En même temps, les Burkinabè vivant au Mali ne sont pas non plus en sécurité. On l’a déjà vu avec la crise en Côte d’Ivoire, pour citer encore ce cas. D’ailleurs, les problèmes des Maliens ne sont-ils pas ceux des Burkinabè ?Dans la Léraba, les populations à la frontière qui ont déjà vécu le drame ivoirien sont bien apeurées. Elles l’ont fait savoir à leur député Mélégué Traoré lors d’une tournée de ce dernier dans sa circonscription électorale. S’occuper de la question malienne n’est-elle pas trouver des solutions aux préoccupations des Burkinabè ? Il n’est un secret pour personne que les relations commerciales qui existaient entre les villes de Tombouctou et de Gao et des villes du Burkina telles que Djibo et Ouahigouya sont actuellement arrêtées. Suite à la crise que connaît le Nord du pays. Travailler à rétablir la paix au Mali, n’est-ce pas permettre la reprise de ces relations commerciales qui nourrissent des Burkinabè ?
Ce qui compte aujourd’hui dans cette question malienne, est que les débats se dépassionnent, que la tension retombe et que les positions maximalistes et nationalistes incompréhensibles des uns et des autres reviennent à la raison pour qu’enfin, le médiateur de la CEDEAO puisse travailler sereinement et ramener tous ceux qui semblent égarés, sur le chemin de la sagesse. Cela fait souvent peur et en même temps que cela révolte quand on entend certains propos du genre : « le médiateur a échoué » ; « Blaise laisse les problèmes des Burkinabè pour s’occuper des problèmes des autres ». Aujourd’hui la Côte d’Ivoire est en paix.
N’est-ce pas que le Burkina et les Burkinabè sont en paix ! Le trafic routier entre les deux pays a repris. Bobo-Dioulasso qui était complètement asphyxiée par cette crise qui a duré dix ans a repris un peu de ses activités. Banfora revit. Les commerçantes de fruits et légumes exportent leurs produits en Côte d’Ivoire. Les transporteurs en commun ont repris leurs activités et font de bonnes affaires quand bien même l’état de la route entre Ouangolo et Bouaké laisse à désirer. En retour, les produits ivoiriens (atiéké, graines de palme et son huile, l’avocat, la banane plantain, etc) arrivent sur nos marchés à la satisfaction des consommateurs.
Les milliers de retraités burkinabè de Côte d’Ivoire qui ne percevaient plus correctement leurs pensions entrent aujourd’hui dans leurs droits avec moins de difficultés. N’est-ce pas résoudre les problèmes des Burkinabè ça ? Personne n’a intérêt à ce que Blaise Compaoré échoue dans sa médiation au Mali. Car, ce ne sera pas la personne de Blaise qui a échoué, mais tout un pays de dialogue auquel ses pairs ont eu confiance, toute une sous-région qui n’aura pas pu résoudre ses propres problèmes. « Aqmi » et ses terroristes n’ont pas de frontières.