Le directeur de publication du quotidien privé malien L`Indépendant, Saouti Haïdara, a été grièvement blessé à Bamako par des hommes armés qui ont tiré dans la salle de rédaction, l`ont ensuite arrêté, emmené et frappé avant de le libérer, a appris vendredi l`AFP auprès de ses confrères.
Makan Koné, président de la Maison de la presse de Bamako, a rendu visite vendredi au journaliste. "Il est dans un état grave, les hommes armés lui ont cassé le bras droit qui est plâtré. Il a aussi été touché à la tête et est dans un très mauvais état", a déclaré M. Koné à l`AFP.
"Plusieurs hommes armés sont venus jeudi au siège du journal. Ils ont tiré en l`air, et manu militari, ils ont enlevé Saouti Haïdara", a affirmé un journaliste de la rédaction qui n`a pas souhaité être nommé.
"Devant nous, Saouti a été menacé alors qu`il donnait des instructions à l`imprimeur au sujet du journal" à paraître vendredi et "les hommes armés étaient très nerveux", a-t-il ajouté.
Quelques heures plus tard, M. Haïdara a été libéré, mais, selon le journaliste, "il a été battu, torturé, par les hommes armés. Saouti a été admis très rapidement dans un centre médical de Bamako. Il a été vraiment battu jusqu`au sang".
"C`est la démocratie que ces gens veulent tuer"
"Ils ont menacé de le tuer s`il porte plainte", a affirmé M. Koné, qui a condamné "ces atteintes répétées à la liberté d`expression". "C`est la démocratie que ces gens veulent tuer et nous allons organiser une marche, observer une journée presse morte", a-t-il ajouté sans préciser de date.
"Tous les acteurs de la transition (au pouvoir à Bamako) doivent prendre leurs responsabilités", car il s`agit d`une "opération de représailles sciemment montée contre la presse malienne qui ne fait que son travail", selon lui.
En juin, Saouti Haidara avait déjà été brièvement arrêté et libéré par la Sécurité d`Etat (services de renseignements) du Mali.
Le 12 mai, le directeur de publication du bi-hebdomadaire privé malien Le Prétoire, Birama Fall, avait connu le même sort. Il avait expliqué que la Sécurité d`Etat lui avait reproché de vouloir publier un article sur des "charniers" dont l`existence lui avait été révélée par "un ministre".
La semaine dernière, un journaliste avait, lui aussi, été enlevé et battu à Bamako avant d`être relâché par des hommes encagoulés et armés qui l`ont traité de "fouteur de m...".
L`organisation de défense des journalistes Reporters sans frontières (RSF) s`était inquiétée en mai des violations de la liberté de la presse depuis le coup d`Etat militaire du 22 mars, qui a accéléré la chute du nord du Mali aux mains de groupes armés.
Depuis le début de la crise malienne, plusieurs journalistes ont été agressés ou interpellés et une radio appartenant à un parti politique pro-putsch a été incendiée dans le centre.
Le Mali est en pleine tourmente depuis le coup d`Etat du 22 mars qui a renversé le régime du président Amadou Toumani Touré (ATT), aujourd`hui réfugié au Sénégal.
Les militaires qui avaient pris le pouvoir ont officiellement accepté en avril de le rendre aux civils, mais ils restent omniprésents à Bamako.
Peu après avoir quitté le pouvoir, ils avaient procédé à Bamako à une série d`arrestations dans les milieux politiques, économiques et militaires proches d`ATT ou considérés comme tels.