Contribution de la Sidh Mali à la 18ème édition de l’Eid : «La Sidh-Mali s’ébroue de confusion devant la liberté offerte aux individus aux mains maculées du sang»
La Société internationale pour les droits de l’homme (Sidh) regroupe des associations nationales de promotion et de protection des droits de l’homme dans les domaines suivants : la liberté d’expression, la liberté de presse, la séparation des pouvoirs, l’indépendance de la Justice. Dans chaque pays, la Sidh associe à ces droits civils et politiques les droits économiques et sociaux les moins bien garantis.
Au Mali, la Sidh agit chaque année par pôle d’intérêt, à savoir, le droit à la vie, entamé par le fléau de l’insécurité routière. Cette année, la Sidh, fidèle à ses missions, a fait une contribution remarquable lors de la 18ème édition de l’Espace d’interpellation démocratique (Eid). C’était le mardi 10 décembre 2013 au Centre international de conférence de Bamako. La cérémonie était présidée par le Premier ministre Oumar Tatam Ly.
Le président de la Sidh-Mali, Moumouni Guindo, a porté son intervention sur le droit à la dignité et au bien-être attaqué rudement par l’exploitation économique des enfants réduits à la mendicité dans l’indifférence générale. Car, la Sidh-Mali vibre à l’unisson avec tous les combattants des droits humains.
Dans une intervention bien pointillée, il est parti de la cadence tumultueuse de la forêt dense des plus graves dénis des droits humains qui affligent et assomment le Mali depuis janvier 2012. Moumouni Guindo a affirmé que la forêt émerge de grands arbres inhospitaliers. Au Nord du pays, des forces hostiles et obscurantistes ont imposé une chape de plomb sur les droits les plus naturels de la personne à travers des actes innommables comme les assassinats d’enfants, de femmes et de vieillards, les viols, les pillages, les destructions d’éléments du patrimoine culturel, les mutilations, les homicides barbares extrajudiciaires… Au Sud du pays, une ligue multi-bande a mis la République sens dessus-dessous en perpétrant un coup d’Etat, crime imprescriptible aux termes de la Constitution ; en semant la désolation dans de nombreuses familles affectées par la mort brutale ou la disparition forcée d’un ou plusieurs des leurs ; en pillant et en saccageant le patrimoine public…
Moumouni Guindo a ajouté que c’est au paroxysme de l’enivrement que le président de la République a été passé à tabac dans son Palais ! Jamais, selon lui, l’impunité n’a eu de plus beaux atours. «Jamais, l’impunité n’eut de plus funestes contours. Des actes récents posés par la justice malienne, émergeant -osons l’espérer- de son indolence, suscitent un espoir réel». Les actions judiciaires engagées contre des personnes soupçonnées des méfaits du Sud sont à encourager et la Sidh-Mali exprime son soutien sans faille à ces actions courageuses et salvatrices. Néanmoins, la Sidh-Mali s’émeut des jours tranquilles que coule l’impunité des auteurs et acteurs des maléfices du Nord. La Sidh-Mali s’ébroue de confusion devant la liberté offerte sur des plateaux dorés à des individus aux mains maculées du sang et de la dignité de paisibles citoyens. La Sidh-Mali s’époumone d’incompréhension devant cette politique de «deux poids, deux mesures» !
Les droits humains sont universels et à ce titre, le président de la Sidh-Mali dira que nul distinguo ne doit être introduit dans le traitement de fauteurs de troubles, selon que les uns soient au Nord et les autres au Sud. «C’est un exaltant mais contraignant devoir pour l’Etat que d’assurer l’égalité de tous devant la loi, sans considération de latitude. Ces grands arbres inhospitaliers ne sauraient obstruer le regard perçant, mais larmoyant de la Sidh-Mali sur les sous-bois luxuriants de la forêt de dénis de droits humains au Mali», a-t-il dit.
Pour lui, sous les grands arbres au Mali, bourgeonnent des atteintes qui, au quotidien, empoisonnent la vie du citoyen. Un de ces bourgeons à la sève empoisonnée est l’exploitation des enfants mineurs par des adultes à travers la mendicité : des bébés, des nourrissons, de petits enfants sont contraints à quémander de l’argent au profit d’adultes bien portants et personne ne s’en émeut. Un de ces bourgeons empoisonnés, c’est aussi le mal-être des piétons dans les grandes villes du Mali.
«Qui, dans cette salle, n’est pas quotidiennement obligé de courir comme un sprinter pour traverser les routes passantes ?», se demande Moumouni Guindo. Il pense que ce n’est pas normal de devoir courir à tout rompre pour traverser une voie. Ce spectacle est un signe particulier des villes maliennes où les marquages de passages-piétons sont de simples parements des voies bitumées. «Que d’écoliers sont fauchés sur la route de l’école ! Que de mères de familles sont mortellement renversées sur la route du marché ! Que de vendeuses ambulantes sont écrasées sous les roues d’automobilistes rois du bitume ! C’est donc un déni du droit à l’égalité des citoyens, du droit à la vie, du droit à l’intégrité corporelle, du droit au bien-être. Et l’Etat en est redevable», a-t-il poursuivi.
L’Etat, selon lui, ne peut continuer à se complaire à laisser automobilistes et motocyclistes blesser, tuer des piétons et s’enorgueillir d’envoyer une bringuebalante voiture de secours de la Protection civile pour ramasser les morceaux de chair et d’ossements pour le service des urgences ou la morgue.
Autre bourgeon empoisonné, c’est également, au sens propre, le poison que représente la gangrène virulente et purulente des emballages plastiques, dont la prolifération entame profondément et durablement le droit à une qualité de vie. «À l’initiative du Gouvernement, deux lois ont été votées par l’Assemblée nationale pour bannir à jamais la circulation des sacs plastiques. La Sidh-Mali en appelle au Gouvernement afin que, pour une fois, une loi produise tous ses effets dans toute sa rigueur. Et ce sera Justice», a-t-il conclu.
Kassim TRAORE