La trahison par rebelles de leurs alliés extérieurs et intérieurs et ses lourdes conséquences multidimensionnelles et la résurgence des attaques jihadistes ont suffi à éloigner définitivement du dossier de Kidal les relents d’honnêteté intellectuelle qui l’entouraient avec l’implication de l’armée malienne comme acteur de la sécurité de cette ville.
Lorsqu’on s’enchevêtre dans une situation au point de ne plus pouvoir s’en sortir ; il demeurera toujours une alternative, celle de confesser sa faute, de collaborer avec la justice pour jouir au moins de circonstances atténuantes. Manifestement à Kidal, stratégiquement appelé le fief des touareg, l’on assiste de plus en plus à la création d’une troisième voie.
Cette voie est la suivante : la sécurité à Kidal, ce n’est plus de la responsabilité de la Force Serval et de la Minusma, pendant que l’armée malienne est cantonnée essuyant au quotidien les humiliations infligées par une bande d’illuminatis à la solde du MNLA. Cette voie désormais, c’est que la sécurité à Kidal relève et de la Force Serval et de la Minusma et de l’armée malienne.
L’on remarquera aisément un changement de donne avec l’entrée en lice de l’armée malienne comme coresponsable de la sécurité à Kidal quand bien même il n’en a que dalle.
Dans tous les cas, le discours propagandiste a été rapidement remodelé et adapté à cette nouvelle donne.
L’on entendra désormais, dans tous les discours, le nom de la stoïque armée malienne, à travers ses unités basées à Kidal, comme partie prenante de la sécurité.
Le matraquage médiatique se chargera du reste, à savoir faire gober aux esprits les moins éclairés que l’armée malienne est réellement partie prenante de la sécurité à Kidal.
Ce qui pourrait avoir un double avantage pour les uns et un double désavantage pour nous.
Primo, ce recalibrage du discours, sans aucun changement dans le dispositif militaire de protection du MNLA, peut contribuer à calmer les ardeurs des pourfendeurs d’une certaine politique internationale à Kidal. La grande partie de la population, la moins avisée, céderait facilement à ce chant de sirène sur les notes d’un patriotisme passablement laminé. Ce, d’autant plus que les Maliens n’entendent plus souffrir que Kidal soit une ville du territoire malien sous tutelle internationale où c’est justement l’armée malienne qui n’a pas droit de cité pour des alibis qui, du reste, ne résistent plus à aucune critique sérieuse. En servant à cette population ce qui lui est le plus cher, on s’aliène imparablement sa sympathie. Quoi de plus réconfortant pour des troupes qui évoluent sur un théâtre d’opération extérieur ?
Mais le fait est qu’au-delà du discours et des apparences, c’est le statu quo ante pour l’armée nationale. Hier comme aujourd’hui, l’on s’obstine à la confiner dans un rôle à la portion congrue. C’est bien cela la situation qui doit changer. Cela, sans aucune forme d’ingratitude pour l’aide reçu d’autres pays au plus fort de la crise sécuritaire attisée par une rébellion touareg de toute évidence en mission commandée.
Secundo, le nouveau discours permettrait de partager avec l’armée malienne la responsabilité de tous les revers qui seront essuyés à Kidal. Et c’est à ce niveau que certains médias occupent le devant de la scène. Le schéma est très simple : chaque fois qu’il y’a une situation sécuritaire peu glorieuse, l’on associe le nom de l’armée nationale. Avec la haute fréquence de telle information, l’on finit par croire effectivement que l’armée malienne est aussi présente que les autres armées. Cette manière de procéder relève d’un lavage de cerveau pour faire croire à ce qu’on veut faire croire. C’est une technique éprouvée autant par les grandes démocraties que par les pires dictatures. Tout le monde en connaît les résultats désastreux sur une population qui se retrouve réduite à une situation de servilité du fait d’une atrophie des capacités intellectuelles.
Dans le cas de Kidal, dans la présentation actuelle des choses, s’accommoder du nouveau discours savamment distillé reviendrait à accepter que l’autre prenne le contrôle de son cerveau.
À ce stade, il serait préférable de mourir sous les balles de l’ennemi.
Il s’agit là des deux armes de destruction massive, pire que les bombes déversées sur l’Irak parce qu’ayant pour cible les facultés intellectuelles des personnes.