Depuis le durcissement de leurs conditions de détention, les militaires arrêtés dans l’affaire des bérets rouges n’ont plus le moral. Le samedi 21 décembre 2013, nous avons fait un tour au niveau du Camp I de la gendarmerie où se trouvent les officiers, sous-officiers et hommes de rang arrêtés.
Cette fois-ci, nous avons eu de sérieux problèmes pour avoir accès aux locaux et aux cellules où sont incarcérés ces militaires. Mais, par finir, nous avons pu trouver une solution. Si à l’école de la gendarmerie, Amadou Haya Sanogo ne se plaint pas trop de ses conditions de détention, au Camp I, la réalité est tout autre. Car il n’est pas facile de voir les hommes du général Haya, les militaires en faction étant au nombre d’une vingtaine.
Parmi ces hommes, il y a deux policiers, Siméon Keïta et Siriman Fané qui sont frappés de deux mandats : le premier est l’affaire des bérets rouges ; le second mandat est l’œuvre du président du tribunal de la Commune VI dans l’affaire du Campus où des policiers ont ouvert le feu sur des étudiants à Badalabougou. Siméon et Siriman Fané sont cités dans cette affaire, mais comme ils étaient protégés par Kati, ils n’ont jamais voulu répondre devant le juge de la Commune VI, qui a profité de leur arrestation par le juge Karambé pour en rajouter. L’occasion fait le larron, dit-on.
Revenons au camp I. Ici, nous avons constaté qu’il y a trois catégories de militaires arrêtés. Les premiers sont arrivés suite à la minuterie du 30 septembre 2013 et la plupart sont des jeunes militaires de Kati. Le deuxième groupe, composé des fidèles compagnons (appelés les éléments du cercle) du général Amadou Haya Sanogo, est en détention suite à l’affaire du 30 avril 2012. Et le troisième groupe est un mélangé des deux premiers : des soldats qui font partie des deux affaires. Dans ce cas, on peut citer : Amadou Konaré et les éléments du cercle restreint du général Sanogo.
Au camp I, dans un premier temps, les éléments du cercle avaient bénéficié de certains avantages, mais aujourd’hui, ils sont dans des cellules comme les autres détenus, parmi les prisonniers du nord. Difficile d’avoir accès à eux, car on ne connaît pas leur répartition. Nous avons constaté que plusieurs personnes sont annoncées comme étant arrêtées. Mais, en réalité, elles ne sont pas arrêtées. C’est le cas de Diamou ou encore un certain Prosper Sylla, un militaire très influent de la tendance de Sinko Coulibaly. Selon les gendarmes, ils ne sont pas arrêtés.
Ce samedi 21 décembre 2013, la cour du Camp I était calme, comme dans un cimetière. Personne n’était dans la cour, même le maire de Tarkint, Baba Ould Cheick, lui qui aime la cour du Camp I, était dans sa cellule. Difficile même de voir des gens en mouvement. C’est au moment même où on allait prendre congé des gendarmes, que des bruits soudains, sous forme de cris, sortent d’une cellule.
Pour les gardes, c’était une querelle entre prisonniers qui ne dure pas, souvent, car ils finissent toujours par se comprendre. Mais ils ont dû se rendre très vite à l’évidence avec l’intensification des cris.
C’est ainsi que deux gendarmes se sont approchés de la cellule. Et c’est en ce moment que nous avons su qu’il s’agit de la cellule où se trouve le capitaine Christophe Dembélé, qui criait en disant : «Laissez-moi tranquille, je n’ai rien fait que ce qu’on m’a dit : je suis un tueur, je suis un tueur, j’ai tué, j’ai tué». Il revenait sur cette phrase à volonté et par finir, il a commencé à dire simplement : «Je suis un tueur, je suis un tueur, j’ai tué, j’ai tué». Les gendarmes ont informé le chef de poste afin de prendre des dispositions qui s’imposent. Pendant que certains détenus avaient peur, surtout ceux qui sont souvent dans la cour. Ils demandèrent alors aux gendarmes de le faire calmer, pétrifiés qu’ils étaient par ses révélations ahurissantes du capitaine Dembélé. Qui serait un bourreau ?
Selon nos dernières informations, la soudaine «folie» du capitaine Christophe aurait commencé à partir de la découverte des corps enterrés au cimetière d’Hamdallaye.
En tout cas, il a en fallu du temps pour le calmer. Avant lui, un autre élément du cercle restreint avait pété les plombs au niveau de l’instruction. Quand il allait avec les éléments de la gendarmerie pour localiser un charnier, l’adjudant-chef Fousseyni Diarra n’a pas pu se retenir. Il a été obligé de demander aux gendarmes de le ramener au Pôle économique.
De fait, le capitaine Christophe Dembélé n’est pas n’importe qui, car il était le garde de corps du général Amadou Haya Sanogo. Or, beaucoup de sources affirment que le charnier de Diago serait l’œuvre du cercle restreint de Sanogo. Et que les autorités n’en auraient pas été informées, y compris le directeur général de la SE qui, selon nos sources, n’était pas à Bamako au moment des faits.
Il faut ajouter que les gendarmes, qui s’occupent de ces prisonniers, travaillent pression de leur hiérarchie : entre ordre et contre-ordre, ils ne savent plus à quoi s’en tenir !