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Si ATT est poursuivi pour haute trahison : A quand des poursuites judiciaires contre les députés sortants ?
Publié le lundi 6 janvier 2014  |  Le Prétoire


© aBamako.com par A S
Demandes de levée d’immunité de députés
Bamako, le 29 juin 2013 à l`Assemblée Nationale. L’Assemblée nationale a donné son feu vert à la levée de l`immunité parlementaire de 9 députés


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La fin de l’année 2013 a été marquée par la volonté du Gouvernement malien d’ouvrir une éventuelle poursuite judiciaire contre l’ancien Président du Mali, Amadou Toumani Touré, pour haute trahison. Si Att peut être poursuivi pour ces faits, qu’en est-il de la responsabilité pénale et le sort des députés sortants qui sont aussi comptables de la situation chaotique devant leurs compatriotes ? Le parquet général près de la Cour Suprême qui a l’opportunité des poursuites aura-t-il le courage et les coudées franches d’ouvrir des poursuites judiciaires contre les députés de l’ancienne législature dont Ibrahim Boubacar Kéita en personne?

Le concept ‘’haute trahison’’ apparait nouveau pour beaucoup de nos compatriotes. Qu’est ce que la haute trahison, ses enjeux et ses implications ? Ce sont autant de questions auxquelles nous allons tenter de répondre dans cet article. Il n’ya pas une définition unanime sinon juridique de la haute trahison. Elle s’analyse à travers un certain nombre d’éléments. Elle tient d’abord à la qualité des personnes mises en cause et surtout du contexte social et politique du pays. Dans notre pays et comme la plupart des Etats, ce sont les hautes personnalités qui sont poursuivies pour cette infraction. La Constitution du 25 février 1992 prévoit la création de la Haute Cour de Justice. C’est une juridiction particulière et a son siège à l’Assemblée nationale. Cette juridiction est composée de députés à l’Assemblée nationale désignés à chaque renouvellement général de l’hémicycle. Les membres désignés élisent, en leur sein, un Président. Figure comme membre de la Haute Cour au moins un magistrat professionnel. A l’audience, le ministère public est représenté par le procureur général près de la Cour Suprême.

C’est le titre X de la Constitution du 24 février 1992 qui parle de la Haute Cour de Justice. C’est une commission de l’Assemblée nationale. La Haute Cour de justice est compétente pour juger le président de la République et les ministres mis en accusation devant elle par l’Assemblée nationale pour haute trahison ou en raison des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions ainsi que leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’Etat. Elle élit son président parmi ses membres. Ce dernier préside les débats à l’audience. La loi fixe le nombre de ses membres, les règles de son fonctionnement ainsi que la procédure suivie devant elle (article 96).

La mise en accusation est votée par scrutin public à la majorité des 2/3 des députés composant l’Assemblée nationale (article 95). Sont jugés devant la Haute Cour de justice, les cas de crimes et délits et les peines résultant des lois pénales, c’est-à-dire, dans le code pénal. La Haute Cour de Justice contrôle la constitutionnalité des actes posés par le Chef de l’Etat et les membres du Gouvernement dans l’exercice de leur fonction. Par là, il s’agit de savoir, est-ce que le Président ou un membre du Gouvernement a violé la constitution dans l’exercice de ses fonctions. La Haute Cour exerce le contrôle politique de l’action gouvernementale. Sont traduits devant elle, le Président de la République et les membres du Gouvernement. En audience, la cour s’inspire du code pénal pour voir si réellement il y a infraction à la loi pénale. Dans l’hypothèse où l’infraction de haute trahison est consommée, les peines varient de l’emprisonnement à la perpétuité à la peine de mort pour le cas du président de la République.

S’agissant du cas spécifique d’Amadou Toumani Touré poursuivi pour haute trahison, c’est en se référant à son serment et à ses prérogatives que l’on pourrait situer sa responsabilité dans le chaos de l’Etat. Certains chefs d’inculpation sont retenus contre lui à savoir : « violation de serment prêté, non opposition aux forces étrangères, destruction ou détérioration volontairement de l’outil de défense nationale, démoralisation de l’armée, opposition à la circulation du matériel de guerre, et négligence ou inobservation des règlements ».

Ces faits, selon le communiqué gouvernemental, sont prévus et réprimés par les articles 33 à 39 du Code Pénal malien. Rappelons qu’à travers le monde entier plusieurs dirigeants et surtout opposants ont été jugés pour haute trahison parmi lesquels l’ancien Président roumain Nicolae Ceauescu en 1989 et Nelson Mandela. Le premier a été mis à mort, quant au second, ayant échappé de peu à la peine de mort, Mandela fit 27 ans en prison.

La haute trahison est une arme redoutable entre les mains des pouvoirs publics. Elle est mise en œuvre contre les adversaires politiques en vue de mettre fin à leur carrière ou pour ternir leur image d’homme d’Etat. Il faut retenir aussi que l’invocation de la haute trahison est subjective et opportuniste. Elle est rarement impartiale. Son invocation tient beaucoup aux circonstances (temps de paix, de guerre ou de troubles) et elle est, de surcroît, souvent relative au niveau et au statut de l’accusé.

Si Att peut être poursuivi pour haute trahison, qu’en-est-il de la responsabilité pénale des députés sortants ? Ces derniers, disposant de la motion de censure, n’ont rien fait pour interpeller les différents gouvernements sur la situation sécuritaire. Le minimum pour eux, c’était d’interpeller le Gouvernement de Mariam Kaidama Cissé et de voter une motion de censure. C’est une véritable arme juridique entre leurs mains. Le fait de s’abstenir de ce droit et de laisser l’Etat couler incrimine aussi les députés des deux dernières législatures. Ne sont-ils pas aussi responsables du chaos sécuritaire et social au même titre que l’ancien Président ? Au vu de la constitution en vigueur, les députés contrôlent l’action gouvernementale. Ils peuvent par des questions orales interpeller un ministre ou le chef du gouvernement. Au pire des cas, ils peuvent destituer le premier ministre et son gouvernement par une motion de censure dès que la nécessité s’impose. Par cet acte, ils bloquent l’activité du président de la République. C’est une façon d’interpeller le Chef de l’Etat et de le ramener vers le droit chemin. Malgré leurs prérogatives, les députés des deux dernières législatures, au nom du fameux consensus d’Att, se sont contentés de leurs salaires, indemnités et autres avantages en nature laissant le pays sombrer. Ils doivent rendre compte aux populations dans la mesure où ils ont émargé sur le budget d’Etat pendant 5 ans pour certains et dix ans pour d’autres. De même, la société civile et d’autres forces de pression et de propositions ne sont-elles pas aussi comptables du désastre ?

La question qui se pose est de savoir si le Parquet général près la Cour Suprême présidé par Bouaré aura la volonté, le courage et surtout les coudées franches pour ouvrir une procédure judicaire contre les députés sortants de l’ancienne assemblée nationale dont Ibk lui-même était membre. Il faut situer les différentes responsabilités si le pouvoir veut être logique avec lui-même. En ce sens que les députés sont les représentants directs du peuple. Ils doivent donc rendre compte. A l’heure actuelle, les cadres maliens doivent s’assumer, prendre leurs responsabilités, n’avoir de compte à rendre qu’à leur conscience afin qu’on ne retombe plus dans les mêmes travers. Ils ont aussi leurs parts de responsabilité dans l’effondrement de l’Etat. Le Mali n’a plus droit à l’erreur. Nous n’avons que le Mali pour nous.

L’avenir nous édifiera !

Birama FALL

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