Les nouvelles autorités maliennes ont décidé de célébrer l’anniversaire de l’Armée malienne, le 20 janvier prochain, à travers un défilé militaire et la signature d’un soit disant accord de défense entre le Mali et la France. Mais au juste, c’est la mise sous tutelle française officielle de notre armée fantoche qui sera scellée, une sorte de pacte néocolonialiste au détriment d’un Etat qui n’a plus de souveraineté.
En principe, le 20 janvier consacre la commémoration de la souveraineté de l’armée malienne. Mais voilà que ce 20 janvier 2014, le gouvernement du Mali veut officialiser la mise sous tutelle française de notre armée nationale. D’abord, célébrer le 20 janvier, même de manière très modeste serait une sorte de foutaise car le Mali n’a plus d’armée et n’est pas encore sorti de l’auberge. Le pays reste en guerre tant que la situation de Kidal demeure confuse ; tant que le Mali n’aura pas retrouvé sa souveraineté. Par définition, une armée est un ordre structuré d’hommes armés visant à défendre un territoire et protéger d’autres unités militaires ou des unités civiles, devoirs auxquels l’Armée malienne a failli. Les objectifs d’une armée sont nettement dépendants des objectifs politiques du pays, ceux de l’Armée malienne sont l’inflation des grades. Aussi, une armée régulière est organisée en armée professionnelle, ce qui est loin d’être le cas de celle du Mali. Quant à sa souveraineté, le Mali l’a perdue depuis belle lurette. En effet, on parle de notion de souveraineté lorsqu’une nation est une véritable entité unique. A notre avis, un Etat qui doit célébrer l’anniversaire de son armée est un Etat souverain pouvant exercer son autorité politique et militaire sur l’ensemble de son territoire géographique, qui y applique ses lois à une population et qui agit selon sa propre volonté.
Pour rappel, en 1959 lorsque le Sénégal et le Soudan français décidèrent de former la Fédération du Mali afin de constituer un Etat économiquement et militairement fondé, le Président Modibo Keïta ne tenait qu’à une chose : une souveraineté totale. C’est à ce titre que le général Soumaré sera nommé chef d’état-major général des armées de ladite Fédération qui éclata en août 1960. Dans un de ses écris, le Commandant Modibo Naman Traoré a relaté : « Après l’éclatement de la Fédération du Mali, le Président Modibo Keïta fit appeler le général Abdoulaye Soumaré pour lui confier les destinées de la jeune armée nationale, pendant que le capitaine Pinana Drabo était envoyé à Ségou comme commandant en chef des armées. Après le congrès extraordinaire de l’Union soudanaise RDA lors duquel le Mali opta pour la voie socialiste de développement, l’évacuation des garnisons étrangères établies en différents points du territoire national fut exigée. Les Maliens entendaient aussi assumer le plein exercice de leur souveraineté militaire tant interne qu’externe. Cette décision très courageuse dans le contexte de l’époque fut acceptée par la France qui n’a opposé aucune réticence dans la passation de consignes ».
C’est à la suite de cette détermination à défendre soi même sa patrie qu’en 1960 les troupes françaises avaient commencé à quitter le Mali. En effet, c’est exactement le 20 janvier 1961 que le dernier soldat français quitta notre pays, matérialisant ainsi l’affirmation de la détermination des Maliens d’user de toute leur souveraineté militaire. Toujours selon le Commandant Modibo Naman Traoré, « dès lors, le Mali ne confiera plus de responsabilité de défense à une puissance tierce et développera d’ailleurs une diplomatie militaire multiforme et diversifiée, fondée sur l’intégration et la recherche de la paix et la sécurité dans le monde.
Aussi, en cas d’agression extérieure, le pays ne peut que compter sur ses propres forces. Il est à noter par ailleurs que le 3 août 1961, le président de l’Assemblée nationale, Mahamane Alassane Haïdara, a signé la loi N°81/ANRM portant organisation générale de la défense. Cette loi de défense avait pour objet d’assurer en tout temps, en toute circonstance, contre toutes les formes d’agressions, la sûreté et l’intégrité du territoire, ainsi que la sauvegarde de la vie des populations. Elle pourvoit de même au respect des alliances, traités et accords internationaux. Les principes de défense sont déterminés par les autorités constitutionnellement responsables ».
Les pères fondateurs du Mali se retourneront dans leurs tombes, le 20 janvier 2014, quand les nouvelles autorités signeront ce fameux accord de défense qui n’est autre que la remise sous tutelle française de l’Armée malienne.
Par ailleurs, on se demande vers quoi se dirige le Mali. Puisque, tout ceci intervient au moment où les experts de l’Otan se réunissent sur l’éventuel fédéralisme du Mali, chaque semaine depuis novembre dernier, sans aucune présence officielle ou militaire du Mali. Puisque les autres instruments de néocolonialisme, les programmes de coopération et de partenariat et autres ne sont plus très efficaces pour avoir la main mise sur une ancienne colonie, la France passe par un accord dit de défense.
ROKIA DIABATE