Le Mali va mal. Il est pris dans une véritable tour infernale. C’est la faute aux soldats de l’armée républicaine qui, en réalité, ne sont que de simples bidasses. Incapables qu’ils sont de rétablir l’intégrité territoriale, ils ont transformé, le 30 avril 2012, la capitale Bamako, en un immense champ de guerre. A l’origine de cet embrasement ahurissant, deux franges de l’armée, les bérets verts de l’ex-junte et les bérets rouges favorables au président déchu, Amadou Toumani Touré (ATT).
Pendant plusieurs heures, durant toute la soirée et la nuit, ils dépensèrent des énergies qu’on ne leur soupçonnait plus, à s’entredéchirer pour le contrôle de l’Office de la radiotélévision du Mali, de l’aéroport et du camp de Kati. Bilan, de nombreuses victimes, onze morts et une trentaine de blessés.
Ils démontrent ainsi, qu’ils ne croient pas en la culture de la démocratie, qu’ils aiment le pouvoir, la haine, la déchirure et la violence. Le pays est apparemment loin de revenir de l’enfer. Il s’est réveillé le matin de la célébration de la Journée internationale du travail dans le hululement des tirs à l’arme lourde et légère avec des forces qui se regardent en chiens de faïence.
Il est clair que les membres du Comité national de restauration de la démocratie et de la restauration de l’Etat (CNRDRE) ne sont plus les seuls maîtres à bord. Il faut compter avec les bérets rouges qui, à travers cette révolte, la première du genre, auraient mis en échec la tentative d’arrestation du chef d’état-major particulier d’ATT. Ce déchirement public, assez révélateur du malaise social, témoigne que tous les officiers subalternes, les sous-officiers et les hommes du rang ne sont pas acquis à la cause du CNRDRE.
Or, il y a peu seulement, on croyait que l’essentiel des troufions vivait et respirait sous l’impulsion du capitaine Amadou Haya Sanogo, fière allure, savourant encore un pouvoir qui avait officiellement chaviré entre les mains de Dioncounda Traoré et son Premier ministre, Cheick Modibo Diarra. Mal lui en prit, il est en passe de payer sa trop grande suffisance, son mépris soutenu des institutions de la République et des personnalités qui les incarnent.
Il n’y a qu’à voir l’arrestation et la claustration des gourous de l’ex-régime et le rejet des décisions de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao). Suffisamment trop pour exaspérer une bonne partie de la classe politique et des soldats qui attendaient d’exploiter la moindre gerçure. Mais, le Mali, qui mérite nettement mieux, n’en avait absolument pas besoin.
Le pays, meurtri par la guerre imposée à lui, ne pouvait pas se permettre de risquer une autre aventure avec des militaires, dont on sait vraiment peu, qui auraient pu remettre en cause le processus de normalisation, avec de nouvelles revendications. On ne trouvera pas grand monde pour apprécier ce coup, mais on tombera certainement sur un nombre impressionnant de personnes qui avanceraient que cela sonne comme un avertissement pour le chef de la junte.
Et que s’il venait à tirer ses marrons du feu, il ne devait pas se gargariser, au risque de verser dans la répression cinglante et aveugle des présumés auteurs du coup de force. Il devrait plutôt, la période du coup mou passée, savoir raison garder, en tempérant ses ardeurs. Avec un tout petit peu de lucidité, il ne devrait ménager aucun effort pour le rassemblement et la cohésion de toutes les forces armées loyales dont l’objectif primordial demeure la restauration de l’autorité de l’Etat sur l’ensemble du territoire.
Mieux, le capitaine Sanogo gagnerait à ranger son bâton de commandement, le temps du CNRDRE étant révolu, loin derrière, en vue de permettre aux nouvelles autorités d’envisager l’avenir avec le soutien, ô combien important, de la Cédéao, disposée à déployer des forces de protection des institutions dans son pays.
Quand on sait que la mission de cette force est susceptible d’évoluer vers une mission d’interposition et d’intervention, on peut, à bon droit, dire que le Mali ne pouvait pas espérer mieux de ses voisins. Il est alors grand temps que le capitaine le comprenne ainsi. Il est sur la sellette et le temps est compté.
Plus vite, il s’effacera, mieux cela vaudra… Tous les regards sont braqués sur lui. Que ne fera t-il donc pas pour les contenter et sauver du coup, le Mali ?